Le point sur l'évaluation environnementale des documents d'urbanisme :


I. Bref historique de l'évaluation environnementale :

L’évaluation environnementale des documents d’urbanisme a pour origine la Loi de Protection de la Nature du 10 Juillet 1976. Ses décrets d’application précisent notamment que le rapport de présentation des documents d’urbanisme (schémas directeurs d’aménagement et d’urbanisme et plans d’occupation des sols) devaient comporter une analyse de l’état initial de l’environnement et apprécier la mesure dans laquelle le schéma ou le plan prenait « en compte le souci de sa préservation ». La loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU) du 13 décembre 2000 a renouvelé en profondeur la planification locale en créant les SCOT (Schémas de Cohérence Territoriale) ainsi que les PLU (Plans Locaux d’Urbanisme) et a placé l’environnement dans toutes ses composantes au cœur des objectifs assignés à ces nouveaux documents, au même titre que les autres considérations d’aménagement du territoire. Cette loi SRU a également posé les bases d’une évaluation de tous les SCOT et PLU au regard de l’environnement, en prévoyant que leurs rapports de présentation comportent un état initial de l’environnement, une évaluation des incidences des orientations sur ce dernier et un exposé de la manière dont le schéma ou plan prend en compte le souci de sa préservation et de sa mise en valeur.

En juin 2001, la directive européenne 2001/42 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement (directive EIPPE) a introduit une évaluation environnementale des plans et programmes, dont les documents d’urbanisme font partie. Elle a renforcé et précisé le contenu attendu de l’évaluation et a introduit la consultation spécifique d’une autorité environnementale. La traduction en droit français de cette directive (transposée aux articles L.121-10 et suivants et R121-14 et suivants du Code de l'urbanisme) prévoit que cette évaluation environnementale soit intégrée au rapport de présentation des documents d’urbanisme. Enfin, la loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010, introduit des évolutions importantes dans le code de l’urbanisme, évolutions relatives à la lutte contre le changement climatique, l’adaptation à ce changement, la maîtrise de l’énergie, la lutte contre la régression des surfaces agricoles et naturelles, la préservation de la biodiversité à travers la conservation et la restauration des continuités écologiques. Toutes ces thématiques deviennent des objectifs explicites des documents d’urbanisme. Cette même loi étend le champ de l’évaluation à certaines Cartes Communales et conduit à élargir le champ des PLU concernés par une évaluation au sens de la directive EIPPE. De plus, les ‘’schémas de secteur’’ qui peuvent préciser le contenu du SCOT sont également soumis à évaluation.



II. Le champ d'application de l'Evaluation Environnementale :

De nombreux documents d’urbanisme sont soumis à Evaluation Environnementale (EE). C’est notamment le cas des DTA (Directive Territoriale d'Aménagement), du SDRIF (Schéma Directeur de la Région Île-de-France), de l'ensemble des SCOT (schéma de cohérence territoriale), des schémas de secteur et certains PLU. Plus précisément, il existe, en France, un nombre très élevé de PLU du fait du grand nombre de communes et de leur faible dimension. Partant de ce constat et conformément à l'article 3-3 de la directive EIPPE, ceux-ci sont en principe dispensés d’évaluation environnementale dans la mesure où ils ne couvrent généralement qu’une commune et ne concernent donc que « de petites zones au niveau local ». En effet, le but de la directive est d'imposer une EE au niveau le plus pertinent, c’est-à-dire à un niveau qui permette à la fois une vision globale mais suffisamment détaillée. En conséquence, sont par principe exonérés d'EE les documents d’urbanisme couverts par un SCOT ayant fait lui-même l'objet d'une telle évaluation. Toutefois et par exception, certains PLU considérés comme « susceptibles d’avoir des effets notables sur l’environnement » sont tout de même assujettis à une évaluation environnementale au sens de la directive. Ces PLU spécifiques sont limitativement énumérés par l’article R. 121-14 du code de l’urbanisme :

a) « Les PLU qui permettent la réalisation de travaux, ouvrages ou aménagements susceptibles d'affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, (ceux-ci sont toujours assujettis à une évaluation environnementale) ;

b) Les PLU dont le territoire n'est pas couvert par un SCOT ayant fait l'objet d'une EE et pouvant avoir des incidences notables sur l’environnement. Sont présumés comme tels les PLU relatifs à un territoire d'une superficie supérieure ou égale à 5 000 hectares et comprenant une population supérieure ou égale à 10 000 habitants et les PLU qui prévoient la création, dans des secteurs agricoles ou naturels, de zones U ou AU d'une superficie totale supérieure à 200 hectares ; ».
Doivent donc faire l'objet d'une EE : les DTA et le SDRIF, les SCOT et schémas de secteur, les PLU qui permettent la réalisation de travaux, ouvrages ou aménagements susceptibles d'affecter de manière significative un site Natura 2000 et enfin les PLU dont le territoire n'est pas déjà couvert par un SCOT ayant fait l'objet d'une EE, si ce PLU est relatif à un territoire d'une superficie supérieure ou égale à 5 000 hectares et comprenant une population supérieure ou égale à 10 000 habitants, ou si ce PLU prévoient la création, dans des secteurs agricoles ou naturels, de zones U ou AU d'une superficie totale supérieure à 200 hectares.,Précisons qu’à compter du 1er février 2013, la liste des PLU concernés sera modifiée. Seront ajoutés les PLU intercommunaux comprenant les dispositions d'urbanisme d'un SCOT et ceux tenant lieu de plans de déplacements urbains (PDU) ainsi que les PLU et Cartes Communales dont le territoire comprend en tout ou partie un site Natura 2000 et enfin les PLU susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement au sens de l'annexe II de la directive 2001/42. Il convient par ailleurs de préciser que si la plupart des PLU ne relèvent pas de cette liste et ne sont donc pas assujettis à l’évaluation environnementale au sens de la directive 2001/42, ils continuent toutefois de faire l’objet de l’étude d’environnement au sens de la loi SRU.

- EE systématique ou au cas par cas ? :

à cette liste de documents systématiquement soumis à EE s'ajoute un certain nombre de PLU soumis à un examen «au cas par cas» permettant de définir si le document considéré doit ou non faire l'objet d'une évaluation environnementale. La liste des projets soumis à cette procédure d’examen figure à l’article R.122-2 du code de l’environnement. Sont concernés par cette étude « au cas par cas » les PLU susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement au sens de l’annexe II de la directive EIPPE de 2001, ainsi que les cartes communales des communes limitrophes d’une commune dont le territoire comprend en tout ou partie un site Natura 2000, s’il est établi qu’elles sont susceptibles d’affecter un tel site, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés.


- Les évolutions du PLU entrainant une EE :

Certaines évolutions ou modifications des PLU peuvent être soumises à évaluation environnementale. C'est principalement le cas, jusqu’au 31 janvier 2013, des évolutions susceptibles d’avoir des incidences sur un site Natura 2000. Ensuite, à compter du 1er février 2013, seront également soumises à évaluation environnementale : 1. les révisions et certaines déclarations de projet mettant en compatibilité un PLU intercommunal comprenant les dispositions d’un SCOT ; 2. les révisions et déclarations de projet si un examen au cas par cas conclut qu’une telle évaluation est nécessaire.

A contrario, certaines modifications "de faible ampleur" n'entrainent pas l'obligation de réaliser une EE :
- la modification et la révision de documents, à l'exclusion des SCOT, ne portant pas atteinte à l’économie générale du document ;

- certaines modifications et révisions simplifiées des PLU ou SCOT, sauf s’elles autorisent des opérations en zone Natura 2000.

Enfin, une évaluation environnementale ne sera pas imposée aux déclarations de projet pour lesquelles la réunion d’examen conjoint s’est tenue avant le 1er février 2013 ni aux révisions de PLU lorsque le débat sur le PADD a déjà eu lieu au 1er février 2013.


III. Le contenu de l'EE :

L’objectif de l’évaluation environnementale est de prévenir et d’évaluer l’impact sur l’environnement des décisions en matière d’aménagement du territoire. C'est une prise en compte de l’environnement en amont des projets, avant leur adoption. La loi SRU prévoyait déjà une évaluation des incidences sur l’environnement de tous les documents d’urbanisme mais elle était réalisée en fin de procédure et peu développée. La directive de 2001 a induit un véritable changement de posture : l’évaluation doit être réalisée tout au long de la procédure afin de permettre aux décideurs de modifier leurs orientations. À la différence des études d’impacts, dont les conclusions servent avant tout à faire évoluer les conditions de mise en œuvre d’un projet finalisé, la directive EIPPE impose la réalisation d’une évaluation environnementale préalable ou ‘’stratégique’’, dans la mesure où ses conclusions doivent être intégrées de façon à réorienter éventuellement les objectifs des documents en cours d’élaboration. C'est pourquoi l’évaluation environnementale prend la forme d'un rapport environnemental qui sera lui-même intégré au rapport de présentation du document d’urbanisme concerné. Ce rapport doit établir un état des lieux précis et complet des enjeux environnementaux du territoire concerné, exposer les solutions d’aménagement retenues, leurs incidences et les raisons de ces choix d’aménagements. Il doit également comporter un résumer et a pour objectif de faciliter l'information et la participation du public. Cette directive impose également plusieurs améliorations : un contenu plus étoffé du rapport de présentation, l'obligation de consulter en amont une autorité environnementale, la consultation du public, qui doit avoir accès à l'avis de l'autorité environnementale et l’obligation de réaliser un bilan des incidences du plan d’urbanisme dans un délai de 6 ans. De plus, un complément au rapport de présentation exposant la prise en compte de l’évaluation environnementale et des consultations diverses doit être incéré, en fin de procédure, dans le document ainsi que leurs apports et leurs limites, et, depuis l'entrée en vigueur du protocole de Kiev (juillet 2010), la prise en compte des questions de santé.

Concrètement, le rapport doit exposer le diagnostic des besoins existants sur le territoire en cause et décrire l’articulation du document en cause avec les autres documents d’urbanisme et les plans ou programmes soumis à évaluation environnementale avec lesquels il doit être compatible ou qu’il doit prendre en considération (SDAGE, SAGE, etc.). Le rapport doit également analyser l’état initial de l’environnement et ses perspectives d’évolution en exposant, notamment, les caractéristiques des zones susceptibles d’être touchées de manière notable. Cet état initial est une étape essentielle du processus qui a pour but de hiérarchiser les enjeux environnementaux, de localiser les secteurs les plus vulnérables, de décrire l’évolution de l’environnement si le plan n’était pas mis en œuvre, d’analyser les incidences notables prévisibles du document évalué sur l’environnement et d’exposer les conséquences éventuelles sur la protection des zones revêtant une importance particulière pour l’environnement (notamment les sites Natura 2000). Il doit également expliquer les raisons qui justifient le choix opéré par rapport aux objectifs de protection de l’environnement établis au niveau international, communautaire ou national (protocole de Kyoto, directive cadre sur l’eau, stratégie nationale du développement durable, etc.). Enfin, ce rapport doit présenter les mesures envisagées pour éviter, réduire et, si possible, compenser s’il y a lieu les conséquences dommageables sur l’environnement. Il devra également présenter les modalités de son suivi (ex : un PLU fera l’objet d’une analyse des résultats au plus tard 10 ans après son approbation) et inclure un résumé non technique des éléments précédents et une description de la manière dont l’évaluation a été effectuée.