
Le contrat de performance énergétique, comme une solution innovante en matière d’économie d’énergie des bâtiments
Par Laura KRZYWANIA
Juriste Environnement
Posté le: 31/01/2013 20:59
La consommation énergétique des bâtiments constitue une préoccupation majeure tant au niveau national, qu’européen au regard de l’objectif de préservation des ressources planétaires. Le secteur du bâtiment s’avère être le plus gros consommateur d’énergie. En effet, il représente environ 40% de la consommation énergétique en France et en Europe et génère environ 23% des gaz à effet de serre. Afin de contrer ces pertes énergétiques en matière de bâtiment, il était devenu indispensable de prévoir un outil juridique adéquat. Cet outil qui a reçu la dénomination de contrat de performance énergétique (CPE) a été introduit en France, en vertu de la loi du 3 aout 2009 dite Grenelle I.
Ce dispositif découle du droit communautaire, notamment la directive CE 2006/32 du 5 avril 2006 et a pour objectif essentiel de permettre la réduction efficace de la consommation énergétique des bâtiments. Il est d’ailleurs ainsi définit comme « un accord contractuel entre le bénéficiaire et le fournisseur (normalement une Société de Services Énergétiques) d’une mesure visant à améliorer l’efficacité énergétique, selon lequel des investissements dans cette mesure sont consentis afin de parvenir à un niveau d’amélioration de l’efficacité énergétique qui est contractuellement défini. » Afin de parvenir à cet objectif, la France en application de la loi Grenelle I, prévoit de diviser par quatre avant 2050, le taux des émissions des gaz à effet de serre.
Le contrat de performance énergétique constitue une solution innovante à plusieurs égards.
Tout d’abord, il a un champ d’application étendu. Il vise non seulement les bâtiments, mais également leurs parcs, plus généralement, tout ce qui vise à l’amélioration de l’efficacité énergétique. Peuvent donc être pris en compte dans le contrat de performance énergétique, les travaux, les systèmes de production, de distribution et régulation du chauffage, de la climatisation, de l’éclairage, de l’eau chaude sanitaire, mais aussi le comportement des usagers.
Ensuite, l’objectif affiché étant la réduction des consommations d’énergie, ce contrat de performance peut revêtir plusieurs formes qui permettront d’atteindre à des niveaux variables, la réduction des consommations énergétique.
Il en existe trois types :
-Le premier type de CPE « fournitures et services » comportent la fourniture de services d’efficacité énergétique par la société de biens et de matériels dont la société assure la maintenance pendant la durée du contrat. Ce type de contrat englobe deux types de situations selon la nature et le type de biens et matériels concernés. D’une part, les systèmes de gestion énergétique de l’immeuble (détection de présence et d’extinction automatique de l’éclairage), et d’autre part, les équipements de production, de distribution ou de consommateurs d’énergie (chaudière, pompe d’énergie et équilibrage des réseaux). La première catégorie nécessite un investissement mesuré d’une durée comprise entre trois à cinq ans. La seconde catégorie nécessite une intervention plus franche sur les équipements de production et de distribution d’énergie, voire leur remplacement, avec des temps de retour sur investissement de dix à douze ans. Le CPE « fournitures et services » le plus simple, conduit généralement à une économie d’énergie comprise entre 10 et 20%.
-Le second type de CPE « travaux et services » génèrent des investissements plus importants et plus longs généralement supérieure à quinze années mais le retour sur investissement permet d’atteindre l’objectif de réduction de 40% seuls ou à la suite d’un contrat de « fournitures ou services ». Cette catégorie implique les travaux sur le bâti tel que l’étanchéité ou l’isolation du bâtiment.
-Le troisième type de contrat de performance énergétique correspond aux contrats dits « globaux », ils comportent à la fois les services, les fournitures et les travaux. Ces contrats se traduisent pas une approche globale, prenant en compte les changements d’équipements et de systèmes, une reprise de l’étanchéité de l’eau et à l’air des bâtiments. Leur mise en œuvre s’avère donc plus lourde et suppose une approche patrimoniale et énergétique assez fine du maitre d’ouvrage. Ils sont conclus sur des durées longues de plus de quinze années. A titre d’exemple les 110 000 m2 de l’université de Versailles-Saint Quentin en Yvelines ont été réalisé par le biais de ce type de contrat. Ces contrats on été les premiers à être conclus dans le secteur public, au moyen de partenariats public privé de longue durée.
Enfin, ce contrat prévoit une méthode rigoureuse de contrôle et de vérification de la stratégie de performance définie. La préparation d’un CPE nécessite, une véritable organisation et une précaution quant à la rédaction de ses multiples clauses. Le maitre d’ouvrage doit avant tout, organiser ses équipes, définir les objectifs après un diagnostic complet et arrêter les différentes clauses du contrat. Les clauses doivent être adaptées à chaque projet de CPE.
Afin que le contrat de performance énergétique soit efficace, sept étapes accompagnent sa mise en œuvre.
-En premier lieu, le maitre d’ouvrage qui souhaite recourir à un CPE devra définir le périmètre des actions de performance énergétique par le biais d’un audit patrimonial. Pour cela, il devra s’intéresser aux équipements, à l’énergie utilisée, au bâti, et à la sensibilisation et le comportement des utilisateurs.
-En deuxième lieu, il sera nécessaire d’utiliser une méthode de mesure et de vérification pour pouvoir mesurer sans contestation les gains énergétiques obtenus.
-En troisième lieu, le maitre d’ouvrage doit caractériser la situation historique et définir la situation de référence en précisant les paramètres d’ajustement. La situation historique désigne l’ensemble des consommations énergétiques et le niveau de service associé constatés sur une période significative donnée antérieure à la conclusion du contrat. La situation de référence est déduite de la situation historique à partir de la valeur des références de paramètres d’ajustement et prend en compte le cas échéant, les nouvelles conditions d’usage. Elle sert de base au calcul de l’amélioration de la performance énergétique.
-La quatrième étape consiste à déterminer et exécuter les actions de performance énergétique. L’opérateur précise alors les économies d’énergie attendues grâce à ces actions de performance énergétique, par rapport à la situation de référence.
-La cinquième étape consiste à garantir cette économie d’énergie dans la durée. L’obligation qui pèse sur le titulaire est une obligation de résultat, quant à l’amélioration de la performance énergétique pendant toute la durée du contrat. Le titulaire peut alors demander réparation pour l’entier préjudice, si l’objectif d’amélioration de la performance n’est pas atteint. Le titulaire doit ainsi payer une indemnité correspondant à l’équivalent économique de tout ou partie de l’écart entre la quantité d’énergie contractuellement garantie et la quantité d’énergie effectivement consommée et mesurée. Dans certains cas, cette réparation peut prendre la forme de travaux complémentaires.
En cas d’amélioration de la performance énergétique au delà de l’objectif contractuel, l’opérateur reçoit un intéressement aux économies d’énergie supplémentaires réalisées.
-Il est important, que l’opérateur d’efficacité énergétique ainsi que le titulaire communiquent sur l’amélioration de l’efficacité énergétique et environnementale ce qui sera considéré comme la sixième étape. Qu’il s’agisse du milieu scolaire, dans le tertiaire ou le logement, l’opérateur doit établir au moins une fois par an, une réunion de bilan pour discuter des résultats obtenus et suivre toute l’exécution du contrat sous peine de ne pas atteindre l’objectif contractuel de réduction des consommations.
-Pour finir, l’opérateur doit garantir l’état du patrimoine technique en fin de contrat. Il s’engage alors à maintenir en l’état le fonctionnement des installations.
En définitive le CPE s’inscrit dans un processus international de réduction de consommation d’énergie. L’Union européenne a renforcé son dispositif juridique en la matière, à travers la directive 2010/31. D’autres pays de l’union européenne ont mit en place des formes de contrats de performance énergétique afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre sur la terre. Il s’agit notamment de l’Allemagne considéré comme la pionnière sur le marché des contrats de performance énergétique, au travers de quatre formes de contrats qui sont signés sur des durées moyennes de huit à vingt années. Les économies générées seraient de l’ordre de 10 à 25%. Le monde anglo-saxon a mis en place un système institutionnel ESCO chargé de lever les financements nécessaires aux projets d’économie énergétique. Ce système s’est notamment appliqué au Japon, ou encore en Suède.