L’apposition du marquage CE ne donne qu’une présomption simple de conformité au produit. La responsabilité du responsable de la mise sur le marché peut être engagée, même lorsque le produit est marqué CE (1), notamment en cas d’absence de documents justificatifs de conformité ou en l’absence de contrôle (2).

1) Les causes d’engagement de la responsabilité en présence d’un marquage CE

Le 5 octobre 2010, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé que le marquage CE n’entraîne qu’une présomption de conformité et que celle-ci peut être renversée dès lors que la preuve d’une non-conformité du marquage existe.
En l’espèce, une société française importe de Chine des bouliers pour enfants entre trois et six ans. Ces bouliers sont marqués CE et fournis avec des certificats de conformité. Mais des tests de succion n’avaient pas été effectués alors qu’il est connu que les enfants de cet âge là ont tendance à porter beaucoup d’objets à la bouche. Le laboratoire inter régional de Marseille a alors établi un rapport contradictoire par rapport aux documents fournis par l’importateur en estimant qu’il y avait un risque réel d’intoxication.
La Cour de cassation rejette le pourvoi au motif que le marquage CE ne peut entraîner qu’une présomption de conformité, et dès lors qu’il est prouvé que le produit n’est pas conforme, le responsable de la mise sur le marché peut voir sa responsabilité engagée.

Quelques années auparavant cette juridiction avait rendu un arrêt similaire. Le 7 avril 1999 , la chambre criminelle de la Cour de cassation avait jugé qu’un produit dangereux ne pouvait être conforme, même s’il était marqué CE.
En l’espèce, il s’agissait d’une poussette canne, un jouet pour enfant fabriquée en Chine, vendue en France par une société belge. Il était apposé sur l’étiquette le marquage CE et les mentions « ne pas s’asseoir » et « ne convient pas aux enfants de moins de trois ans ». A la suite de tests effectués par un laboratoire, il est apparu que le jouet ne respectait pas les normes de sécurité en raison des risques anormalement élevés de coincements ou d’écrasements des doigts lors du pliage du jouet et en raison de risques de suffocations dû à l’emballage.
Le responsable de la mise sur le marché français soutenait qu’il ne lui appartenait pas de s’assurer de la conformité du marquage CE. La Cour a rejeté le pourvoi au motif qu’ « il n’importe que le sigle « CE » ait été apposé sur le jouet dès lors qu’il incombait personnellement au prévenu, responsable de la première mise sur le marché national, de veiller à la conformité de la marchandise aux prescriptions en vigueur ».

La même chambre de la Cour de cassation a confirmé cette décision le 17 septembre 2002. En l’espèce il s’agissait de guirlandes 180 micro lumières achetées en Chine, jugées non conformes en matière de marquage alors même que le prévenu avait fournit deux certificats de conformité provenant du laboratoire accrédité TUV de Munich. Ici le problème était que les guirlandes étaient conformes à la Norme EN 55014 mais dangereuses du fait de l'équipement en simple isolation du câblage et d'absence de dispositif d'arrêt de traction et de torsion pour le variateur. La Cour a alors jugé qu’il y avait une obligation de contrôle interne de la part du fabricant et bien que le produit ait été jugé conforme à cette norme, il ne respectait pas tous les critères de sécurité.
L’apposition du marquage CE « n'établit qu'une présomption de conformité aux normes européennes, ne dispense pas l'importateur de l'obligation de vérification prévue par l'article L. 212-1 du Code de la consommation ».
Cette article dispose : « Le responsable de la première mise sur le marché d'un produit est donc tenu de vérifier que celui-ci est conforme aux prescriptions en vigueur.
A la demande des agents habilités pour appliquer le présent livre, il est tenu de justifier les vérifications et contrôles effectués. »
Là encore la Cour de cassation ne précise pas quelles doivent être ces vérifications. Elle explique simplement que le prévenu avait les moyens matériels et humains pour s’assurer par un contrôle interne de la conformité des certificats fournis par le laboratoire allemand.

Même en présence de marquage CE, la responsabilité de la personne qui met le produit sur le marché peut être engagée pour non-conformité. L’absence de contrôle ou de documents justificatifs peut également engager la responsabilité de la personne responsable de la première mise sur le marché.


2) L’absence de contrôle permettant d’engager la responsabilité de l’importateur

La chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé le 20 septembre 2011 que le responsable de la première mise sur le marché d’un produit pouvait voir sa responsabilité engagée même en présence de certificat de conformité.
En l’espèce, une société a importé de Chine des luminaires. Suite à un contrôle de la DGCCRF, les luminaires se sont révélés non conformes. Pour s’exonérer, l’importateur explique qu’il a en sa possession deux certificats de conformité qu’il avait demandés au fabricant.
La Cour de cassation a jugé que pèse sur le responsable de la mise sur le marché d’un produit, quelque soit sa place dans la chaîne de production dudit produit, « une obligation de vérification de la conformité du produit »

Le 10 avril 1997 , cette juridiction avait déjà statué que le contrôle préalable de simples échantillons ne saurait répondre aux exigences de sécurité de l’article L212-1 du Code de la consommation. Plus tard, le 13 juin 2006, la chambre criminelle de la Cour de cassation a accentué sa position en jugeant que les importateurs devaient nécessairement effectuer des contrôles à l’arrivée des produits sur le territoire national, et ce même si des contrôles avaient déjà été effectués sur des produits similaires.

Enfin, la Cour a jugé qu’il était nécessaire pour le responsable de la mise sur le marché d’être en mesure d’apporter des documents justifiant la conformité du produit. Le 2 mai 2012 , la chambre criminelle a en effet statué que l’apposition du marquage CE n’exonérait pas le responsable de la mise sur le marché de fournir des documents justifiant la conformité du produit. En l’espèce, il s’agissait de pistolets en jouets pour enfant. Le responsable de la mise sur le marché n’ayant pas été en mesure d’apporter les documents justifiants de la conformité du jouet, il a été condamné pour tromperie.