La reforme de l’agence française en charge du contrôle des médicaments répond à la perte de confiance du public dans l’ancienne Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé engendrée par la crise Mediator. Les médias ayant révélé des manques flagrants de contrôle sur certains médicaments. Le Législateur, par la loi du 29 décembre 2011, a donc opté pour une refonte de la principale institution de contrôle des médicaments (I). Il a souhaité dotée la nouvelle agence d’un pouvoir de sanctions étendu (II).

I/Renforcement du contrôle des médicaments : création de l’ANSM

La création de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a été prévue par la loi du 29 décembre 2011. L’article L. 5311-1 du code de la santé publique a été modifié. La sécurité est devenue le principal objectif de la nouvelle agence. Cette modification n’est pas seulement terminologique. L’alinéa 2 de l’article précise que sa principale mission est de procéder à l’évaluation des bénéfices et des risques liés à l’utilisation des produits à finalité sanitaire destinés à l’homme et des produits à finalité cosmétique. Elle surveille le risque lié à ces produits et effectue des réévaluations des bénéfices et des risques.
L’analyse des termes laisse à penser que le contrôle du médicament doit principalement s’effectuer à travers le prisme de la permanence d’un rapport bénéfice/risque favorable.
Dans ce même sens, « L’agence peut demander que les essais cliniques portant sur des médicaments soient effectués sous forme d’essais contre comparateurs actifs et contre placebo. Si la personne produisant ou exploitant un médicament s’oppose aux essais contre comparateurs actifs, elle doit le justifier. » L’agence est donc en charge de vérifier que tous les nouveaux médicaments produits démontrent un apport bien réel mais aussi supérieur à celui-ci des produits déjà sur le marché.
La création de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a été rendue effective par un décret du 27 avril 2012. Elle est dotée de moyens substantiels avec un budget de plus de 150 millions d’euros lui assurant une autonomie et par la même son indépendance vis-à-vis des laboratoires pharmaceutiques. Le décret vient préciser l’organisation de l’Agence, sa composition ainsi que son mode de fonctionnement. Dans un note du 3 mai 2012, l’agence communiquait sur son engagement « porté par des valeurs fondatrices d’indépendance (déclarations publiques d’intérêts, service de déontologie de l’expertise), de transparence (traçabilité des travaux précédant toute décision, enregistrement et mise à disposition des séances, publications des comptes rendus intégrant les opinions minoritaires) et de partage de l’information. »
Si son organisation ainsi que le système de pharmacovigilance qu’elle met en œuvre, renvoient pour la majeure partie à ceux de son ancêtre l’Afssaps, la loi a opéré une considérable extension de ces prérogatives en matière de sanction.

II/ Extension de son pouvoir de sanction administrative

La nécessité d’encadrer les laboratoires pharmaceutiques dans la mise en œuvre de leur système de pharmacovigilance a poussé le Législateur à doter l’ANSM d’un large pouvoir de sanction. L’agence dispose désormais de moyens de coercition à l’encontre des entreprises ainsi que des personnes physiques qui méconnaissent leurs obligations en matière de sécurité des médicaments puisqu’elle peut prononcer des amendes administratives. Ce nouveau pouvoir est prévu à l’article L. 5421-9 du CSP.
Les manquements qui peuvent donner lieu à ces amendes sont énoncés à l’article L. 5421-8 dudit code :
- méconnaissance de l’obligation de mise en œuvre d’un système de pharmacovigilance
- abstention du signalement immédiat d’un effet indésirable suspecté à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé
- méconnaissance de l’obligation de transmission du rapport périodique actualisé ou de maintien en continu de la présence d’une personne responsable
- non transmission dans les délais requis des résultats des études mentionnées au premier alinéa de l’article L. 5121-8 et de celles mentionnées à l’article
L. 5121-8-1
- absence de signalement d’un arrêt de commercialisation, d’une interdiction ou restriction imposée par les autorités d’un pays où le produit est mis sur le marché, ainsi que de toute information nouvelle de nature à influencer l’évaluation des bénéfices et des risques du médicament
- défaut de report des données demandées par l’agence en application de l’article L. 5121-9-3 dans les délais requis
- défaut ou non respect de visa de publicité pour les médicaments
- non transmission à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé dans les délais impartis les informations mentionnées à l’article L. 5121-12 ;
- non respect de l’obligation prévue d’information des professionnels de santé et de l’Agence lorsqu'elle constate des prescriptions non conformes au bon usage du médicament.
- non respect de l’obligation d’information de tout risque de rupture de stock
Les autres manquements passibles de sanctions prévus à cet article sont relatifs aux dispositifs médicaux.
La mis en œuvre de ces pénalités pourrait avoir un impact majeur sur les entreprises exploitant ou fabricant un médicament. Cependant la rédaction du texte législatif est légèrement trompeuse. En effet, l’article L. 5312-4-1 du CSP prévoit les modalités concernant ces amendes.
La mise en demeure préalable des personnes physiques ou morales qui encourent les sanctions susmentionnées leur offre la possibilité de régulariser la situation pour échapper aux amendes.
Les astreintes journalières ne peuvent excéder 2 500€ par jour.
Le troisième paragraphe de l’article L. 5421-9 limite le montant des amendes à 10 % du chiffre d’affaires réalisé, dans la limite d’un million d’euros. Le montant est largement dissuasif pour les personnes physiques, légèrement moins pour les grandes entreprises pharmaceutiques si l’on intègre les bénéfices que permettent d’engendrer certains médicaments.
Ces pouvoirs de sanctions sont néanmoins assez extraordinaires comparés à ceux dont bénéficiait l’ancienne Afssaps.

Pour conclure, le contrôle de la sécurité des médicaments semble avoir été privilégié par le Législateur dans la rédaction du texte, l’élargissement du pouvoir de sanction de l’ANSM lui permettant d’assurer le respect par les titulaires de l’autorisation de mise sur le marché des obligations leur incombant.