
Directive-cadre sur les déchets : une Union Européenne en retard sur les objectifs de 2020
Par Romain PLATEL-PARIS
Juriste en charge de l'environnement, securite, qualite et Marketing
PSA
Posté le: 10/08/2012 17:08
« Afin de se conformer aux objectifs de » la Directive 2008/98/CE du Parlement Européen et du Conseil du 19 Novembre 2008, « et de tendre vers une société européenne du recyclage, avec un niveau élevé de rendement des ressources, les Etats membres prennent les mesures nécessaire pour parvenir aux objectifs suivants :
a) d’ici 2020, la préparation en vue du réemploi et le recyclage des déchets tels que, au moins, le papier, le métal, le plastique et le verre contenus dans les déchets ménagers et, éventuellement, dans les déchets d’autres origines pour autant que ces flux de déchets soient assimilés aux déchets ménagers, passent à un minimum de 50% en poids global ».
Cette Directive-cadre sur les déchets fixe, hormis les orientations majeures de la politique de gestion des déchets que sont le principe du pollueur-payeur, le principe de proximité et la responsabilité élargie du producteur, la hiérarchie des déchets. Cette hiérarchie implique que les Etats membres devront mettre en œuvre dans leur politique et leur législation les points suivants par ordre de priorité : prévenir la production de déchets, la préparation des déchets en vue de leur réemploi, le recyclage de ces déchets, leur valorisation et notamment énergétique, leur élimination dans le respect de la protection de la santé humaine et de l’environnement.
Le 07 Août 2012, la Commission européenne par le biais du commissaire européen en charge de l’environnement, Janez POTOCNIK, a dévoilé les résultats d’une enquête baptisée Screening of Waste Management Performance of EU Member States. Cette enquête, basée sur les derniers chiffres publiés par Eurostat, l’office statistique de l’Union, et datant de 2010, révèle de fortes disparités de situations entre les divers pays composant l’Union mais également, plus spécifiquement, un retard important dans l’UE27 en matière notamment de recyclage des déchets.
Ainsi, sur un ensemble de critères basés notamment sur la hiérarchie des déchets, parmi lesquels se retrouvent, en anglais dans le texte, the amount of municipal waste recycled, the amount of municipal waste recovered, the amount of municipal waste, the collection coverage for municipal waste ou encore the number of infringement procedures, critères notés de 0 à 2 avec note doublée concernant les trois premiers critères cités, il convient de noter des écarts marqués entre les pays. Ainsi, si l’Autriche, première du classement avec 39 points ou l’Allemagne, quatrième avec 36 points, ont d’ors et déjà mis en place de nombreuses mesures et sont globalement conformes aux prescriptions européennes, la Grèce ou l’Italie, respectivement 27e avec trois points et 20e avec 15 points, ou bien encore la plupart des pays dernièrement intégrés comme la Bulgarie, la Lituanie, ou la Roumanie (respectivement 26e, 24e et 23e), accusent un retard marqué par rapport au reste de l’Union.
Le point le plus marquant illustrant les raisons de ce retard est la propension des pays « mal classés » à recourir massivement au dépôt en décharge des déchets municipaux, déchets composés très majoritairement des déchets ménagers, allant ainsi à l’encontre des exigences de la Directive-cadre. De fait, si l’Allemagne met exactement 0% de ses déchets municipaux en décharge, la Bulgarie y place, au contraire, 100% de ses déchets, la Lituanie 94% et la Grèce 82% pour une moyenne de 38% dans l’UE27, ce qui freine directement le recours au recyclage.
Or, la Directive prévoyant qu’en 2020 « la préparation en vue du réemploi et le recyclage des déchets » ménagers, devront être passés « à un minimum de 50% en poids global », l’objectif initialement fixé risque d’être difficile à atteindre et ce sans compter la crise financière qui touche notamment la Grèce.
En résumé, le commissaire européen en charge de l’environnement constate que « de précieuses ressources sont ensevelies, des avantages économiques potentiels sont perdus, des emplois ne sont pas créés dans le secteur […] et la santé humaine et l’environnement sont menacés », la mise en application de la législation européenne en matière de déchets étant susceptible, selon la Commission, de permettre l’économie de 72 milliards d’euros par an, d’augmenter le chiffre d’affaires annuel du secteur de 42 milliards d’euros et de créer plus de 400 000 emplois dans l’Union.
Afin de remédier à une potentielle défaillance de certains Etats membres quant à l’atteinte de l’objectif précité, la Commission mettra en place des plans d’actions en collaboration avec les autorités des 10 pays les plus mal classés afin de les aider à améliorer leur gestion des déchets par le biais d’outils aussi bien administratifs, juridiques et économiques.