Tant attendu le décret n°2012-615 du 2 mai 2012 relatif à la sécurité, l’autorisation et la déclaration d’utilité publique des canalisations de transport de gaz, d’hydrocarbures et de produits chimiques, dit « décret multifluide » est paru. Pris en application de l’ordonnance n° 2010-418 du 27 avril 2010 harmonisant les dispositions relatives à la sécurité et à la déclaration d’utilité publique des canalisations de transport de gaz, d’hydrocarbures et de produits chimiques, codifiée aux articles L. 551-1 et suivants du Code de l’environnement, le décret simplifie les dispositions réglementaires applicables aux canalisations de transport pour le gaz naturel, les hydrocarbures et les produits chimiques. La publication de ce décret parachève le mouvement d’harmonisation et de simplification des dispositions législatives et réglementaires applicables aux canalisations de transport. En effet, la réglementation multifluide constitue désormais un régime unique abrogeant huit lois et treize décrets. En marge, seul le décret n°70-492 du 11 juin 1970 demeure en raison de son champs d’application large, puisqu’il s’applique également aux lignes électriques.


Entré en vigueur le 5 mai 2012, le décret a pour objet d’encadrer les procédures d’autorisation et de déclaration d’utilité publique relatives à la construction et à l’exploitation des canalisations de transport de gaz, d’hydrocarbures et de produits chimiques. Il définit également les règles relatives à la sécurité, à la protection de l’environnement et au contrôle applicables à ces ouvrages ainsi que les règles spécifiques applicables aux canalisations relevant du service public de l’énergie. En outre, il fixe le régime de redevances d’occupation du domaine public.


1- LA PROCEDURE D’AUTORISATION DES CANALISATIONS OU TRONÇONS DE CANALISATIONS NEUFS


Le chapitre V du titre V du livre V du Code de l’environnement intitulé « Canalisations de transport de gaz, d’hydrocarbures et de produits chimiques » définit tout d’abord la procédure d’autorisation des canalisations ou tronçons de canalisations neufs. L’article R.555-1 soumet à autorisation, toute construction ou exploitation de canalisation de transport vérifiant les deux conditions suivantes : le fluide transporté est du dioxyde de carbone ou un gaz, un hydrocarbure, un produit chimique, se présentant dans les conditions normales de température et de pression sous forme gazeuse inflammable, nocive ou toxique ou sous forme liquide inflammable ; et la longueur de la canalisation est supérieure ou égale à 2 kilomètres ou le produit de son diamètre extérieur par sa longueur est supérieur ou égal à 500 mètres carrés. Par exception, le remplacement d’une canalisation existante ou d’un tronçon de canalisation existante à l’intérieur de la bande de servitude forte (L. 555-27), ou à défaut de la servitude amiable (R. 555-8), n’est pas soumis à autorisation si la nature du fluide transporté n’est pas modifiée et si le diamètre et la pression maximale en service de la canalisation ne sont pas augmentés.

Les articles R.555-2 et suivants définissent la procédure d’autorisation et partant les modalités de la demande d’autorisation, d’examen de l’état complet et régulier du dossier, de consultations, de l’enquête publique, d’autorisation et de prescriptions.

L’article R. 555-23 prévoit la possibilité, pour les canalisations existantes à la date de publication du décret, de continuer de fonctionner sans l’autorisation prévue à l’article R. 555-1 à condition que le transporteur se fasse connaître du préfet avant le 5 mai 2012 et qu’il lui adresse dans les mêmes délais un dossier dont le contenu est fixé par ce même article.

Enfin les articles R.555-24 et suivants définissent les règles applicables en cas de modification, extension, de déviation ou de mode d’utilisation d’une canalisation, de renonciation et d’arrêt temporaire ou définitif de l’exploitation.

Cette procédure d’autorisation harmonisée et simplifiée ressemble à de nombreux égards à celle applicable aux installations classées pour la protection de l’environnement.


2- LA PROCEDURE DE DECLARATION D’UTILITE PUBLIQUE


Le décret définit la procédure de déclaration d’utilité publique lorsque celle-ci est demandée au titre de l’approvisionnement énergétique, de la défense, du développement économique ou de la protection de l’environnement. Le préfet de chaque département concerné institue par arrêté pris après avis de la commission départementale compétente en matière d’environnement et de risques sanitaires et technologiques les servitudes d’utilité publique prévues à l’article L. 555-27, dans les conditions prévues par les articles R. 555-32 et suivants (R555-30). Ainsi, lorsque le pétitionnaire de l’autorisation, prévue à l’article L. 555-1, demande la déclaration d’utilité publique des travaux de construction et d’exploitation de la canalisation concernée, il doit compléter le dossier prévu à l’article R. 555-8 par les pièces énumérées à l’article R. 555-32. L’article R. 555-33 définit les modalités de l’enquête publique.

A défaut d’accord amiable sur les servitudes entre le bénéficiaire de l’autorisation et au moins un propriétaire d’une parcelle traversée par le projet de canalisation, le préfet du département concerné conduit pour le compte du bénéficiaire de l’autorisation la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique afin d’imposer les servitudes prévues à l’article L. 555-27. Le versement de l’indemnité en raison de l’expropriation pour cause d’utilité publique est à la charge du bénéficiaire de l’autorisation (R555-35).

La déclaration d’utilité publique confère au bénéficiaire de l’autorisation le droit d’exécuter sur et sous l’ensemble des dépendances du domaine public, tous travaux nécessaires à l’établissement, à l’entretien et à la protection de la canalisation, en se conformant aux règlements de voirie et à toutes autres dispositions en vigueur. Toutefois, les occupations du domaine public sont strictement limitées à celles qui sont nécessaires et donnent lieu au paiement de redevances (R.555-36).




En outre, le décret fixe les règles générales applicables à la sécurité, à la protection de l’environnement et au contrôle des canalisations durant les phases de conception, construction, pose, mise en service, exploitation, surveillance, maintenance, arrêt temporaire ou définitif. Il définit également les règles applicables à la maîtrise de l’urbanisation, notamment en ce qui concerne la constructibilité des établissements recevant du public ou des immeubles de grande hauteur à proximité des canalisations de transport.



Enfin, le décret soumet au régime de responsabilité environnementale le transport par canalisation de gaz naturel, d’hydrocarbures liquides ou liquéfiés, ou de produits chimiques. En effet, rappelons que sont réparés ou prévenus, au titre du régime de responsabilité environnementale, certains dommages causés à l'environnement par les activités professionnelles listées à l’article R.162-1 du Code de l’environnement (L. 162-1). Or, l’article premier du décret est venu ajouter à cette liste « le transport par canalisation de gaz naturel, d’hydrocarbures liquides ou liquéfiés, ou de produits chimiques ».