
« Traçabilité des minerais en RDC : entre améliorations et réalités géopolitiques »
Par Youssouf Djonouma Tordibaye
Specialisé en Droit des industries extractives-Compliance bancaire-RSE
UNIVERSITE PARIS SACLAY
Posté le: 20/04/2025 3:59
1.Introduction et Contexte
La RDC détient une position stratégique sur le marché mondial des minerais, fournissant une part significative du cobalt et du coltan utilisés dans les smartphones et autres appareils électroniques. Cependant, des rapports ont mis en évidence l'échec des systèmes de traçabilité existants, tels que l'Initiative de la chaîne d'approvisionnement de l'étain (ITSCI), à empêcher la contrebande et l'exploitation illégale. Par exemple, le coltan extrait dans des zones contrôlées par des groupes armés est souvent introduit en contrebande au Rwanda, échappant ainsi aux mécanismes de traçabilité.
2. Méthodologie et Approches Technologiques
Pour améliorer la traçabilité des minerais en RDC, plusieurs approches peuvent être envisagées :
• Technologies Innovantes : L'adoption de la blockchain et des systèmes d'identification par radiofréquence (RFID) peut permettre un suivi inaltérable des minerais depuis leur extraction jusqu'à leur utilisation finale. Ces technologies offrent une transparence accrue et réduisent les risques de fraude.
• Coordination Intersectorielle : Une collaboration étroite entre le gouvernement congolais, les entreprises minières, les organisations non gouvernementales et les communautés locales est essentielle pour garantir l'efficacité des systèmes de traçabilité.
• Intégration des Systèmes Existants : Il est crucial d'évaluer et d'améliorer les infrastructures actuelles de collecte et de gestion des données pour assurer une traçabilité efficace, en particulier dans les régions aux ressources limitées.
3. Enjeux et Défis Identifiés
Malgré les efforts déployés, plusieurs défis subsistent :
• Défis Technologiques et Infrastructurels : De nombreuses zones minières en RDC manquent d'infrastructures de communication adéquates, rendant difficile la mise en oeuvre de technologies de traçabilité avancées.
• Gouvernance et Corruption : La corruption endémique et la faiblesse des institutions compromettent la transparence et l'efficacité des systèmes de traçabilité. Des rapports ont souligné que des minerais sont souvent exportés illégalement vers des pays voisins, comme le Rwanda, où ils sont mélangés à des minerais locaux, rendant la traçabilité encore plus complexe.
• Impacts Socio-Économiques : Les initiatives de traçabilité doivent tenir compte des moyens de subsistance des communautés locales, qui dépendent souvent de l'exploitation minière artisanale. Il est essentiel de trouver un équilibre entre la formalisation du secteur minier et le soutien aux économies locales.
• Réglementation et Harmonisation des
4. Discussion
L'adoption de technologies telles que la blockchain offre une opportunité prometteuse pour améliorer la traçabilité des minerais en RDC. Cependant, le succès de ces initiatives dépend d'une volonté politique forte, d'investissements dans les infrastructures locales et d'une coopération étroite entre tous les acteurs concernés. Des efforts doivent également être déployés pour renforcer la gouvernance et lutter contre la corruption, qui entrave les systèmes de traçabilité actuels.
5. Conclusion
La traçabilité des minerais en RDC est essentielle pour garantir une exploitation minière responsable et éthique. Bien que des défis significatifs subsistent, notamment en matière de gouvernance, d'infrastructures et d'impacts socio-économiques, l'intégration de technologies modernes et le renforcement de la collaboration entre les parties prenantes offrent des perspectives encourageantes pour l'avenir.
Références
Banque Mondiale, Gouvernance dans les industries extractives en Afrique : état des lieux et perspectives, 2020.
Blood and Earth : Modern Slavery, Ecocide, and the Secret to Saving the World, 2016
Geenen, Sara : « La traçabilité dans les chaînes d’approvisionnement de minerais en Afrique centrale : enjeux, pratiques et limites » Afrique contemporaine, 2019/3 (n° 271), pp. 89-104