
Agroécologie : PFAS - l'UE interdit finalement le désherbant flufénacet, l'un des polluants éternels
Par Yao Jean-Jacques KOUADIO
Stagiaire Ingénieur QHSE
VINCI Oil & Gas
Posté le: 20/03/2025 23:55
Le 12 mars, les États membres de l’Union européenne ont marqué une étape significative dans la protection de l’environnement et de la santé publique en adoptant définitivement l’interdiction du flufénacet, un herbicide largement utilisé dans les grandes cultures. Ce produit chimique, appartenant à la famille des substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), est souvent critiqué pour son potentiel à agir comme perturbateur endocrinien et sa forte contamination des ressources en eau. En effet, l’Autorité européenne de sécurité alimentaire (Efsa) avait déjà alerté, en septembre dernier, sur les dangers qu’il représente pour les écosystèmes aquatiques, soulignant sa toxicité et son impact sur la biodiversité.
Générations futures, une organisation non gouvernementale engagée dans la protection de l’environnement, a salué cette décision, tout en exprimant des préoccupations quant à la période de grâce de dix-huit mois qui a été accordée pour écouler les stocks existants de flufénacet. Cette ONG rappelle que le flufénacet a été sur le marché pendant plus de onze ans après l’expiration de son autorisation initiale, qui aurait dû prendre fin le 31 décembre 2013. Ce prolongement, accordé à maintes reprises, a suscité des inquiétudes quant à la lenteur des procédures d’évaluation des risques liés à ce pesticide. En effet, l’autorisation a été prolongée à neuf reprises, avec une nouvelle échéance fixée à juin 2025.
Dans le cadre de cette lutte contre les substances dangereuses, Générations futures appelle à des actions plus globales afin d’éviter que le flufénacet ne soit remplacé par d’autres produits chimiques tout aussi nocifs. L’ONG met en avant le flutolanil, un autre pesticide de la même famille de PFAS, qui émet également de l’acide trifluoroacétique (TFA). Le processus d’interdiction de ce produit est actuellement à l’arrêt, en raison d’un manque de soutien de la part des États membres. De plus, le fluopyram, un autre pesticide dont les effets néfastes ont déjà été documentés, devrait également être interdit. Selon Générations futures, il est impératif de bannir tous les pesticides PFAS, une demande qui a reçu le soutien d’une cinquantaine d’eurodéputés adressée à la Commission européenne.
Jean-Claude Raux, député écologiste de Loire-Atlantique, a également fait entendre sa voix sur cette question cruciale. Il souligne que, malgré l’interdiction récente, la décontamination des eaux des résidus de flufénacet pourrait prendre des décennies, voire plus longtemps, en raison de la persistance des PFAS dans l’environnement. Il met également en lumière le fait que de nombreuses autres substances chimiques, déjà reconnues comme toxiques, continuent d’être autorisées sur le marché. Raux appelle de ses vœux une interdiction généralisée des pesticides PFAS et des perturbateurs endocriniens, tout en plaidant pour l’application du principe pollueur-payeur. Il exige que des entreprises comme Bayer soient tenues responsables de la dépollution des sites contaminés, afin de protéger la santé publique et préserver nos ressources en eau pour les générations futures.