En matière de vente l’information du vendeur joue un rôle central quant à la décision prise par l’acquéreur. Le défaut ou l’inexactitude d’information sera donc constitutif d’un manquement contractuel comme a pu l’affirmer la jurisprudence dès 1980. Néanmoins en matière de terrain pollué l’obligation d’information prend une teneur particulière dans la mesure où la pollution pourra ne pas être à l’initiative du vendeur lui-même. L’article L514-20 du Code de l’environnement tranche en mettant à la charge du vendeur, propriétaire d’un terrain ayant accueilli une installation classée pour la protection de l’environnement, une obligation d’information quant à la présence de celle-ci mais également des dangers ou inconvénients connus.
Par ailleurs le droit commun sera également un fondement à l’obligation d’information, avec notamment le dol ou la garantie de vice caché.
D’une autre façon, l’arrêt de la Cour de cassation du 29 février 2012 Société La Plazza c/ X, s’appuie sur le droit commun de la vente avec l’article 1603 du Code civil pour sanctionner un manquement à l’obligation de délivrance. La livraison d’un bien dépollué conforme à l’acte de vente engendre une obligation plus étendue que les autres fondements de droit spécial et de droit commun.

La Cour de cassation a pu trancher sur la responsabilité du vendeur d’un terrain en cas de découverte d’une pollution dans l’arrêt rendu le 12 février 2012 Société La Plazza c/ X (n° 11-10318).
Les époux X ont vendu à la SCI Le Plazza un ensemble immobilier composé de terrains et d’entrepôts commerciaux destinés à la démolition. Le site ayant accueilli la Société Bolloré énergie, celui-ci avait fait l’objet d’une réhabilitation suite à la cessation d’activité de l’installation. Dans l’acte de vente, il était indiqué que l’immeuble avait fait l’objet d’une dépollution. Lors des travaux de construction d’un ensemble résidentiel par l’acquéreur, il a été découvert une poche de contamination résiduelle aux hydrocarbures nécessitant une opération complémentaire de dépollution. La SCI a donc assigné les époux en paiement du coût de dépollution.


I- L’obligation d’information du vendeur tiré de l’article L514-20 du Code de l’environnement

L’obligation spéciale d’information quant à l’existence d’une installation classée soumise à autorisation ou à enregistrement incombe au vendeur du terrain. Aussi le vendeur doit informer par écrit l’acquéreur. Au surplus, le vendeur doit également indiquer, dans la limite de ses connaissances, les dangers et inconvénients importants de l’exploitation de cette installation.
Or la Cour de cassation ne s’est pas appuyée sur ce fondement pour donner droit à la demande de l’acquéreur. En effet d’autres fondements peuvent servir à engager la responsabilité du vendeur en cas de découverte de pollution sur le terrain.


II- L’obligation d’information du vendeur tiré du droit commun :

Si l’article L514-20 du code de l’environnement reste un fondement fort de l’engagement de la responsabilité du vendeur en cas de manquement à l’obligation d’information, d’autres fondements de droit commun vont permettre d’étayer cette responsabilité. Le dol et la garantie de vice caché rendant impropre à destination sont reconnus comme des fondements de responsabilité par la jurisprudence.

Le dol, consacré à l’article 1116 du Code civil, permet la résolution du contrat lorsque le vendeur dissimule une information importante provoquant chez l’acquéreur une erreur qui le détermine à contracter. La Cour de cassation a reconnu, notamment dans sa décision du 7 novembre 2007, (n° 06-18.617) que l’absence d’information quant à l’existence d’une ICPE soumise à autorisation est constitutive d’un dol. De la sorte, ce manquement à l’obligation d’information engage la responsabilité du vendeur. Ici le vendeur a tenu l’acquéreur informé de la dépollution du terrain en communiquant l’ensemble du dossier de dépollution. Il a également informé la SCI que le site avait été exploité par la Société Bolloré énergie. Ainsi une dissimulation volontaire du vendeur n’a pu être retenue.

La garantie de vice caché prévue à l’article 1641 du Code civil, est également un fondement de responsabilité du vendeur en cas de découverte d’une pollution. La Cour de cassation a en effet reconnu dans sa décision du 08 juin 2006 (Société Total Solvants, n° 04-19.069) que la pollution peut être constitutive d’un vice caché rendant impropre à sa destination « dès lors que toute construction restait risquée pour la santé ou la sécurité tant des participants au chantier que des futurs utilisateurs ». Ici, la SCI a acquis l’ensemble immobilier dans le but d’y construire un ensemble résidentiel. Il apparait donc que la découverte de la poche d’hydrocarbure puisse rendre le bien impropre à sa destination. Néanmoins, la Cour ne s’appuie pas sur ce fondement.


III- L’obligation de délivrance du vendeur d’un bien conforme

La cour va ici mettre en œuvre l’article 1603 du Code civil pour donner droit à la demande de la SCI.

Cette décision entre dans la lignée d’un précédent arrêt rendu par la 3ème chambre civile le 25 mai 2005 (n°03-20.476) qui consacre l’obligation de délivrance du vendeur. La non-conformité d’un bien aux caractéristiques prévues entre les cocontractants est constitutive d’un manquement à l’obligation de délivrance du vendeur. Ici la délivrance d’un immeuble dont les fenêtres ne peuvent être réouvertes est constitutive d’un manquement dans la mesure où l’acte de vente mentionnait que les fenêtres murées pouvaient être réouvertes.

Dans le présent arrêt du 29 février 2012, la Cour applique ce principe à la pollution d’un terrain. De la sorte, si l’acte de vente indique que le bien est dépollué le terrain livré ne sera conforme qu’en l’absence de pollution. La découverte d’une poche d’hydrocarbure rend donc le bien non conforme à la caractéristique indiquée dans l’acte de vente. Le vendeur a donc manqué à son obligation de délivrance de la chose et devra indemniser la SCI à hauteur des opérations complémentaires de dépollution.

Ce fondement tend à étendre la responsabilité du vendeur qui dans le cas présent n’était pas exploitant de l’activité polluante. On notera également que le vendeur méconnaissait l’existence de cette pollution alors que l’article L514-20 impose au vendeur une obligation d’information dans la limite de ses connaissances.