Ce jeudi 4 juillet 2024, la fondation Surfrider a publié un nouveau rapport concernant la pollution causée par les biomédias, accompagné d'un guide de bonnes pratiques pour éviter les dangers associés à leur utilisation. L'état de l'art des usages des biomédias et les dysfonctionnements lors de leur utilisation étaient présentés dans le premier rapport sur ces petits supports plastiques utilisés dans certaines stations d'épuration (Step), publié en 2018.

On y avait recensé une dizaine de cas de pollution plastique du littoral. L'édition récente est une actualisation des connaissances, mettant en évidence six épisodes de pollution récents en Europe, mais s'attachant principalement à expliquer leur origine et les mesures prises par les Step, les associations et les pouvoirs publics concernés. Sur ces six épisodes, trois se sont déroulés en France : en Corse, dans les Hautes-Alpes et dans la Drôme. En général, les accidents observés découlent d'une série de problèmes, qu'ils soient matériels ou humains. Le rapport décrit plusieurs périodes particulièrement sensibles, comme les épisodes de fortes précipitations et les phases de mise en service des nouvelles stations. À Bastia, par exemple, des millions de biomédias ont fui la station d'épuration après de fortes précipitations, se jettant sur les plages corses, puis italiennes, françaises et espagnoles.

Suite à l'appel d'une association locale, l'intervention des autorités publiques et de la fondation Surfrider a permis de mettre en évidence divers problèmes techniques, notamment des erreurs dans la conception de la station. Des travaux tels que la mise en place de grilles ont été réalisés afin de prévenir de futurs débordements. De plus, plusieurs collectes ont été organisées par les autorités publiques. Le rapport met également l'accent sur le contexte réglementaire actuel. Surfrider participe à l'évolution des textes : les informations recueillies par l'ONG ont notamment été utilisées comme référence pour l'incorporation de mesures particulières dans la nouvelle version de la directive Eaux résiduaires urbaines (Deru). Toutes les situations de pollution enregistrées, grâce à des témoignages de citoyens et des réseaux d'associations partenaires, sont également disponibles sur un site dédié.

I - Des suggestions élaborées par et destinées aux experts

Le rapport précédent se concentrait sur les problèmes à l'échelle de la station. Selon Philippe Bencivengo, chef de projet déchets aquatiques à la fondation Surfrider et rédacteur des deux rapports, il est aujourd'hui connu que les risques sont présents tout au long de la chaîne d'utilisation des biomédias. C'est la raison pour laquelle le guide pratique, financé par l'Agence suédoise de l'environnement pour le compte du Conseil nordique des ministres (l'organisation intergouvernementale de coopération fondée par le Danemark, l'Islande, la Norvège, la Suède et la Finlande), a pour objectif de conseiller toutes les parties prenantes du cycle de vie des biomédias : les autorités chargées de donner les autorisations aux concepteurs et aux exploitants de systèmes d'assainissement. Selon M. Bencivengo, il n'y a aucune position opposée à cette technologie, qui a démontré son efficacité pour améliorer la qualité des eaux. Cependant, il existe des améliorations à tous les niveaux afin d'éviter les fuites.

Avec une expertise de quinze ans développée par l'ONG et des retours d'expérience d'une centaine de professionnels de l'assainissement, le guide offre près de 150 recommandations qui peuvent être appliquées sur toute la durée de vie de ces objets, de leur stockage (utiliser des contenants extrêmement résistants) à la gestion des pertes (avoir un plan de gestion de crise), en passant par le design de l'exploitation (installer des grilles, comme en Corse par exemple). Afin de ne pas se perdre dans les recommandations, elles sont organisées et classées. Les procédures administratives sont les plus urgentes, mais aussi les plus simples à mettre en place. À titre d'exemple, il est difficile de savoir si une station est utilisatrice. « Cependant, il est essentiel de déterminer l'origine des fuites », regrette l'auteur des rapports.


II- assister les étapes

En France, l'assistance aux experts en assainissement peut même aller au-delà. Depuis fin 2023, l'agence de l'eau Loire-Bretagne apporte son soutien à la fondation Surfrider pour collaborer avec des stations d'épuration pilotes et évaluer la faisabilité de leurs recommandations. Toutes les stations d'épuration des 40 départements couverts par l'agence, utilisatrices de biomédias, qu'elles soient collectives ou industrielles, de toutes tailles, qu'il y ait déjà eu des incidents liés aux biomédias ou non, sont ouvertes au recrutement. Selon Philippe Bencivengo, responsable du projet, le programme n'a pas pour objectif d'être un audit de contrôle ou de certification, ni de permettre de réaliser de grands travaux d'aménagement de la station. Au contraire, il vise à coconstruire une méthodologie.

Dans le rapport, la fondation Surfrider affirme que depuis les premiers signalements en France il y a environ vingt ans, elle est convaincue qu'il s'agit d'une problématique mondiale. Le guide est disponible en anglais et en français et a une portée nationale et européenne, voire mondiale, comme la pollution elle-même.