Rendu public le 6 juin 2024, l’arrêté du 15 mai relatif à la démarche de prévention du risque radon et à la mise en place d’une zone radon et des vérifications associées dans le cadre du dispositif renforcé pour la protection des travailleurs fixe les modalités de prévention et de réduction des risques d’exposition au radon dans les lieux de travail situés dans une zone à potentiel radon. Avant d’explorer les mesures clés de cet arrêté (II), une lumière sera au préalable faite sur le risque radon lui-même(I).

I-La présentation du risque radon

Après avoir présenté le radon (I), nous parlerons du risque radon encadré par l’arrêté du 15 mai (II).

A-La notion de radon

Le radon est un gaz radioactif incolore et inodore qui provient de la chaine de désintégration de l’uranium et du thorium, deux éléments naturellement présents dans les roches du sol. Son activité ionisante se mesure en becquerels (Bq) et sa concentration en Bq/m3. Il est le plus souvent présent à faibles taux. Cependant, sa concentration est plus élevée dans les régions aux sous-sols granitiques ou volcaniques tels que le Massif central, les Vosges, la Bretagne, la Guyane, la Nouvelle-Calédonie, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon etc.). En extérieur, ce gaz se dilue rapidement. En revanche, les personnes résidant dans ces régions doivent être vigilantes car il représente un risque dans les espaces clos mal ventilés. Il peut s’infiltrer dans les maisons à travers les fissures, les passages de canalisations et s’y accumuler. Le code de la santé publique fixe le niveau de référence en radon à 300 Bq/m3 en moyenne annuelle dans les immeubles bâtis.

Le radon est classé par le Centre international de recherche sur le cancer comme cancérigène certain pour le poumon depuis 1987. En effet, en se désintégrant naturellement, il produit des particules radioactives dans l’air qui, une fois inhalées, se fixent sur les voies respiratoires et en irradient les cellules. A long terme, l’inhalation du radon peut conduire à augmenter le risque de développer un cancer du poumon. D’après les évaluations conduites en France, le radon serait la seconde cause de cancer de poumon, après le tabac et devant l’amiante. Sur les 30 000 décès constatées chaque année, 3000 lui seraient attribuables, soit 10% des décès par cancer du poumon.

B- Le champ d’application de l’arrêté

L’arrêté relatif à la démarche de prévention du risque radon et à la mise en place d’une zone radon et des vérifications associées dans le cadre du dispositif renforcé pour la protection des travailleurs concerne d’une part les employeurs et travailleurs, y compris les travailleurs indépendant, régis par la quatrième partie du code du travail relative à la santé et la sécurité au travail, salariés compétents, intervenants, en prévention des risques professionnels, les conseillers en radioprotection.

D’autre part, cet arrêté s’applique aux seules situations d’exposition au radon provenant du sol, définies au 4° de l’article R.4451 du code du travail à savoir :

-Dans les lieux de travail situés en sous-sol et rez-de-chaussée de bâtiments en tenant compte des zones mentionnées à l’article L.1333-22 du code de la santé publique ;

-Dans certains lieux de travail spécifiques notamment ceux où sont réalisés des travaux souterrains, y compris des mines et des carrières.

Le radon provenant du sol est défini comme celui généré directement par les roches du sol ou secondairement par l’eau circulant dans ces roches ou les matériaux extraits de ces roches.
Le radon anthropique résultant d’une activité professionnelle (procédés industriels, résidus, déchets…) est exclu de son champ d’application.

II-Les règles édictées par l’arrêté sur la protection des travailleurs contre le risque radon

L’arrêté pose, d’une part, une obligation d’évaluation et de réduction du risque radon (A) et, d’autre part, une obligation de renforcement du dispositif de protection des travailleurs exposés au radon (B).

A-L’évaluation et la réduction du risque radon

L’arrêté du 15 mai impose une évaluation et une réduction du risque radon. L’évaluation doit être réalisée selon les principes généraux de prévention mentionnées à l’article L. 4121-2 du code du travail. En fonction de cette évaluation, le mesurage mentionné à l’article R. 4451-15 du même code pour déterminer la concentration d’activité du radon dans l’air dans un lieu de travail est réalisé en utilisant des appareils de mesure intégrée du radon, à lecture différée, fournis et exploités par un organisme accrédité mentionné à l’article R. 1333-30 du code de la santé publique. Les résultats de ce mesurage doivent être représentatifs de la moyenne annuelle du niveau de radon dans le lieu où les locaux de travail pour pouvoir être comparés au niveau de référence fixé à l’article R. 4451-10 du code du travail.

Lorsque la concentration d’activité du radon dans l’air d’un lieu ou de locaux de travail situés à l’intérieur d’un bâtiment ou d’un lieu de travail spécifique mentionné à l’article R. 4451-4 du code du travail dépasse le niveau de 300 becquerels par mètre cube en moyenne annuelle fixé à l’article R. 4451-15 du même code, l’employeur établit un plan d’actions et en assure la traçabilité. Il engage les mesures de réduction de l’exposition mentionnées au II de l’article R. 4451-18 du même code en commençant par celles qui peuvent être prises sans délai. Ces mesures de réduction comportent notamment l’amélioration de l’étanchéité du bâtiment vis-à-vis des points d’entrée du radon ou du renouvellement d’air des locaux. Pour un lieu de travail spécifique, les mesures de réduction de l’exposition sont à adapter au cas par cas selon les spécificités du type de lieu.

L’employeur dispose d’un délai maximum de trois ans pour s’assurer de l’efficacité des mesures de réduction pérennes mentionnées et pour garantir que la concentration d’activité du radon dans l’air reste en deçà du niveau de 300 becquerels par mètre cube en moyenne annuelle qui constitue le niveau de référence fixé à l’article R. 4451-10 du code du travail.

Si le niveau dépasse 1 000 becquerels par mètre cube en moyenne annuelle, l’employeur engage sans délai des mesures de réduction pour abaisser, au maximum dans les douze mois, la concentration d’activité du radon en dessous de ce niveau.

En cas d’impossibilité de mettre en œuvre les mesures de réduction mentionnées plus haut, ou d’abaisser, dans un délai maximal de trois ans, la concentration d’activité du radon en deçà du niveau de référence, l’employeur procède à la mise en place d’une « zone radon » mentionnée à l’article R. 4451-23 du code du travail et des dispositions renforcées conformément au titre II de l’arrêté. L’employeur notifie cette situation à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire en communiquant les résultats des mesurages du radon selon les modalités définies par cet Institut conformément au II de l’article R. 4451-17 du même code.

B-Le renforcement du dispositif de protection des travailleurs exposés au radon

L’employeur doit procéder avec le concours du conseiller en radioprotection à la détermination de la « zone radon » mentionnée à l’article R. 4451-23 du code du travail dans toute la partie du lieu de travail dépassant le niveau de référence fixé à l’article R. 4451-10 du même code. Après cette délimitation de la « zone radon », l’employeur fait réaliser une première vérification par son conseiller en radioprotection ou par un intervenant spécialisé supervisé par ce dernier pour s’assurer qu’aucun lieu de travail attenant à la zone délimitée pour le risque radon ne contienne une concentration d’activité du radon supérieure au niveau de référence.

Si cette première vérification valide la délimitation de la « zone radon », l’employeur, avec le concours de son conseiller en radioprotection, établit un programme de vérifications périodiques. Le délai entre deux vérifications ne peut excéder 5 ans. Dans les bâtiments, ce délai ne peut excéder un an lorsque le niveau de concentration d’activité du radon dans l’air est supérieur au niveau de 1 000 becquerels par mètre cube.

Lorsque la situation le permet, à la place du programme de vérifications périodiques, l’employeur, avec le concours de son conseiller en radioprotection, peut mettre en place un mesurage en continu du radon lorsque les travailleurs sont présents dans la zone.

L’employeur consigne ce programme des vérifications et le rend accessible aux agents compétents ainsi qu’au comité social et économique ou, à défaut, au salarié compétent mentionné à l’article L. 4644-1 du code du travail.
Dans les bâtiments, une fiche d’information sur le risque radon accompagnée d’un schéma précisant notamment les limites de la « zone radon » et les consignes de sécurité à respecter pour y accéder est affichée de manière visible aux accès de la « zone radon ».

La délimitation de la « zone radon » peut être intermittente dans le cadre de l’exercice d’une activité professionnelle régulière lorsque l’employeur est en mesure de justifier, avec le concours de son conseiller en radioprotection, par une surveillance à l’aide d’appareils de mesure en continu, que la concentration d’activité du radon est maintenue à un niveau inférieur au niveau de référence fixé à l’article R. 4451-10 du code du travail lorsque les travailleurs concernés sont présents. Dans ce cas, l’employeur affiche une information complémentaire à la signalisation prévue à l’article 6 de l’arrêté mentionnant, de manière visible à chaque accès de la « zone radon », la suspension de la zone pendant le temps de l’opération ou de l’activité professionnelle.

En cas d’impossibilité d’établir une « zone radon intermittente », l’employeur, avec le concours de son conseiller en radioprotection, réalise, préalablement à l’accès de tout travailleur en « zone radon », une évaluation individuelle telle que mentionnée à l’article R. 4451-53 du code du travail. Si les résultats de l’évaluation individuelle préalable concluent que le travailleur est susceptible d’être exposé à une dose efficace supérieure à 6 millisieverts sur 12 mois glissants due au radon provenant du sol, l’employeur considère le travailleur comme « exposé au radon » et met en œuvre la surveillance dosimétrique individuelle prévue à l’article R. 4451-65 du code du travail et le suivi individuel renforcé prévu à l’article R. 4451-82 du même code.

Notons que le ministre chargé du travail peut édicter des recommandations techniques et opérationnelles sous forme de guide pratique pour l’application de l’arrêté, ainsi que sur l’ensemble de la démarche de prévention du risque radon.