Selon les données de l’ADEME, le secteur du bâtiment est responsable de plus de 40% de la consommation d’énergie finale en France, et de 20% des émissions carbone nationales. En toute logique, ce secteur est l’un des plus soumis à des contraintes réglementaires afin de contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et contraint de s’adapter au changement climatique.
En la matière, le bilan annuel de l’OID (Observatoire de l’immobilier durable) publié début 2021 faisait état d’un diagnostic mitigé sur les performances énergétiques des bâtiments en France. La consommation d’énergie baisse, mais pas au rythme attendu. Le secteur est loin des objectifs assignés par la feuille de route de la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC).
Celle-ci, en ce qui concerne le bâtiment, fixe l’objectif d’une réduction de 49% des émissions en 2030 par rapport à 2015, et la neutralité carbone pour 2050. Or entre 1990 et 2015, les émissions n’ont baissé que de 4%. Les contraintes liées au bâtiment par la SNBC visent à abandonner le chauffage au fioul et au charbon, accélérer fortement le rythme et la qualité des rénovations des logements et des bâtiments tertiaires, accroître les niveaux de performance énergétique et carbone des bâtiments neufs via une approche cycle de vie, et encourager une sobriété des usages, notamment par l’utilisation d’équipements et de technologies intelligents.
Ces politiques publiques se traduisent par deux réglementations d’importance : le décret tertiaire prévu dans la loi Elan, et dont le décret d’application date déjà de 2019, vise l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments existants. Son application a été retardée d’un an mais s’imposera désormais au 30 septembre 2022. Par ailleurs, la RE2020, dont le décret d’application très attendu est paru le 30 juillet dernier, fixe des contraintes de performance énergétique des logements dont le permis de construire sera déposé postérieurement à cette date.
La mesure phare du décret tertiaire consiste à imposer aux exploitants de bâtiments tertiaires de plus de 1000m2 de déclarer leur consommation d’énergie sur une plateforme publique dédiée, Operat, gérée par l’Ademe. Ces données constitueront la base de départ pour calculer les économies d’énergie nécessaires pour la réduire de 40% à l’horizon 2030, de 50% d’ici 2040 et de 60% d’ici 2050.
La subtilité de l’exercice consiste à choisir la date de référence, qui peut être comprise entre 2010 et 2019 (car le législateur souhaitait favoriser les acteurs ayant déjà travaillé à réduire leur empreinte énergétique).
Cette réglementation est contraignante, car elle joue en premier lieu sur le « name and shame », en rendant visible les performances énergétiques de chaque entreprise. Elle s’accompagne également de sanctions, car chaque année les acteurs devront publier leurs performances, et s’acquitter d’une amende de 7500€ s’ils n’ont pas atteint les objectifs assignés en 2030, 2040 et 2050. Les experts du secteur s’accordent à dire que diminuer la consommation énergétique de 40% d’ici 2030 sera techniquement difficile et nécessitera des investissements. Cette réglementation devrait donc directement avoir des répercutions sur le prix des actifs immobiliers.
D’autre part, pour les bâtiments neufs, la RE2020 pose trois objectifs pour l’habitat collectif et les maisons individuelles : le renforcement des exigences environnementales, une nouvelle méthode de prose en compte du confort d’été et une approche cycle de vie pour le calcul de l’empreinte carbone. Là encore, les experts estiment que cette réglementation induit un surcoût important à la construction, entre 6 et 16%. Aussi, celle-ci a été reportée au 1er janvier 2022, et certains seuils techniques assouplis afin de laisser la filière s’adapter.
On le constate, le secteur immobilier ouvre de grands chantiers qui auront des impacts économiques majeurs, et l’inflation réglementaire ne devrait pas faiblir.