Un décret du 29 juin 2021 vient préciser les dispositions applicables au système de conduite automatisé des véhicules à délégation de conduite. Il modifie pour cela, la partie réglementaire du code de la route et apporte quelques définitions s’agissant de termes propres à la réglementation de ces véhicules, en plus de précisions concernant les conditions d’utilisation du système de conduite automatisé.


Une première européenne !

« C’est officiel : la France devient le premier pays européen à adapter son droit aux véhicules autonomes. Dès septembre 2022, ils pourront rouler sur des parcours ou des zones prédéfinis », s’est enthousiasmé le ministre des transports début juillet. « Avec ce décret, nous faisons un pas de plus vers la mobilité du futur. Nous donnons dès aujourd’hui à nos industriels et à nos opérateurs de transports la visibilité nécessaire pour les développer – et demain, les faire rouler. »
Alors que les investissements en faveur des véhicules autonomes ne cessent de s’accroître et ce, essentiellement en Recherche & Développement (~80 milliards de dollars entre 2015 et 2017), l’État français semble vouloir se doter de règles pour répondre au déploiement futur de systèmes de transport routier automatisés, au plus tard en septembre 2022. Comme le souligne le communiqué de presse du ministère de la Transition écologique, « les systèmes de conduite automatisée devraient rapidement évoluer et se multiplier », comme le système automatisé de maintien dans la voie (dit « ALKS », pour Automated Lane Keeping System) fonctionnant en situation d’embouteillage sur autoroute.
Bien d’autres systèmes sont encore en chantier, et si la véritable autonomie des véhicules demeure un rêve encore lointain (niveau 5 : pas avant 2040), ce texte reste tout à fait pertinent. En effet, outre la nécessité de prévoir certaines situations litigieuses, « le cadre réglementaire national établi par ce décret » doit aussi permettre d’accompagner ces développements.


Quelques définitions

Des précisions quant au régime applicable aux véhicules à délégation de conduite nécessitaient l’apport de quelques définitions générales.
De ce fait, les véhicules à délégation de conduite sont désormais définis dans le code de la route, à l’article R.311-1. Cette définition et autres précisions introduites dans le code de la route, ne remplacent pas pour autant la définition de véhicule à délégation de conduite existante, laquelle avait été apportée par l’arrêté du 17 avril 2018 relatif à l’expérimentation de véhicules à délégation de conduite sur les voies publiques ; elle la complète simplement. En effet, l’arrêté du 17 avril 2018 définissait les véhicules à Délégation Partielle ou Totale de Conduite (DPTC) comme un « véhicule à délégation partielle ou totale de conduite se rattachant à la catégorie internationale M, N, L, T, C qui relève d’un genre national, ou engin roulant […], muni d’une ou plusieurs fonctionnalités permettant de déléguer au véhicule tout ou partie des tâches de conduite pendant tout ou partie du parcours du véhicule ». Une simple distinction était faite entre une délégation partielle et une délégation totale de conduite.
Le décret du 29 juin 2021 énonce, quant à lui, que : un véhicule à délégation de conduite est un « véhicule à moteur des catégories M [véhicules à moteur et conçus et construits pour le transport de personnes et ayant au moins quatre roues], N [véhicules à moteur et conçus et construits pour le transport de marchandises et ayant au moins quatre roues], L [véhicules à moteur à deux ou trois roues et quadricycles à moteur], T ou C [véhicules agricoles à moteur, à roues ou à chenilles, conçus pour une vitesse n’excédant pas 40 km/h ou excédant 40 km/h] […], ou navette urbaine telle que définie au 6.13 [véhicule à moteur conçu et construit pour le transport de personnes en agglomération et ayant la capacité de transporter, outre le conducteur, neuf passagers au moins et seize passagers au plus], équipé d’un système de conduite automatisé ».
A contrario de l’arrêté du 17 avril 2018, une distinction est faite entre les véhicules « partiellement automatisés », les véhicules « hautement automatisés » et les véhicules « totalement automatisés ». Un véhicule partiellement automatisé suppose qu’une demande de reprise en main du conducteur peut être exigée, pour répondre à certains aléas de circulation ou certaines défaillances pendant une manœuvre par exemple. En revanche, les véhicules hautement ou totalement automatisés sont en mesure de répondre à tout aléa de circulation ou défaillance. La distinction entre les véhicules hautement automatisés et les véhicules totalement automatisés réside dans le fait que le véhicule hautement automatisé ne nécessite pas de reprise en main du conducteur, uniquement « dans un domaine de conception fonctionnelle particulier » (conditions dans lesquelles un système de conduite automatisé est spécifiquement conçu pour exercer le contrôle dynamique du véhicule et en informer le conducteur ; conditions géographiques par exemple, mais également, météorologiques, horaires, de circulation, de trafic et d'infrastructure).

D’autres termes bénéficient également d’une définition à l’article R.311-1-1 ; « système de conduite automatisé », « contrôle dynamique », « reprise en main », « demande de reprise en main », « période de transition », « domaine de conception fonctionnelle », « manœuvre à risque minimal », « manœuvre d’urgence », « dispositif d’enregistrement des données d’état de délégation de conduite ».


Quelle responsabilité pour le conducteur d’un véhicule à délégation de conduite ?

Le changement le plus important sans doute, c’est l’aménagement de la responsabilité pénale du conducteur au regard des spécificités des véhicules à délégation de conduite. En effet, « jusqu’à présent le code de la route ne considérait que le cas de la conduite d’un véhicule par une personne. Désormais, il prévoit également la possibilité qu’un système de conduite automatisé contrôle le déplacement du véhicule, et par conséquent il était important d’adapter aussi le régime de responsabilité pénale à cette situation inédite pour permettre au conducteur de dégager sa responsabilité dès lors que le système de conduite automatisé fonctionne conformément à ses conditions d’utilisation ».
Cependant, l’article R.412-17-1 du code de la route précise que, « lorsque le véhicule est partiellement ou hautement automatisé, le conducteur doit se tenir constamment en état et en position de répondre à une demande de reprise en main ». De même, les possibilités de mouvement et le champ de vision du conducteur ne doivent pas être réduits par le nombre ou la position des passagers, par les objets transportés ou par l’apposition d’objets non transparents sur les vitres. Il doit également « se tenir en état et en position d’effectuer sans délai une reprise en main afin d’exécuter les manœuvres qui lui incombent ». En cas de non-respect de ces dispositions, le conducteur peut être puni de l’amende prévue pour les contraventions de 2e classe (150 euros), voire même risquer l’immobilisation de son véhicule.
S’agissant des personnes habilitées à intervenir à distance sur un véhicule à délégation de conduite (pilotage à distance), être sous l’empire d’un « état alcoolique caractérisé » (précisions à l’article R.3153-1 du code de la route) est également sanctionné par une contravention de 4e classe et la perte de six points du permis de conduire.

Le décret revient également sur la « démonstration de la sécurité », élément essentiel du processus d’autorisation du véhicule. Celle-ci fait suite à l’élaboration de plusieurs dossiers de sécurité, vérifiés par des organismes qualifiés agréés. Elle a pour objet de vérifier la fiabilité du système du véhicule.
Les organisateurs de service et les Autorités Organisatrices de la Mobilité (AOM) seront au cœur de ce dispositif car ce sont eux qui délivreront les autorisations de mise en service de ces systèmes.