
La sécheresse en France : Oui Oui elle est toujours d'actualité
Par Florence EGEA
Juriste Sécurité
SNCF
Posté le: 25/07/2011 16:45
La sécheresse en France : Oui Oui elle est toujours d'actualité
Même si le temps n'est pas au beau fixe ces temps ci (le soleil brille par son absence en pleine saison estivale), il ne faut pas s'égarer et se dire que la sécheresse est terminée... Loin de là !
Les pluies de début de saison n'ont pas apporté ce qu'il manquait aux agriculteurs pour avoir des productions convenables et n'ont pas non plus ressourcés les nappes phréatiques.
Faisons un état des lieux de la sécheresse en France.
Tout d'abord, qu'est-ce que la sècheresse ?
Une sécheresse se produit lorsque les précipitations sont anormalement faibles par rapport à la normale. En France et dans nos pays voisins, on parle d'une "sécheresse absolue" lorsqu'il y a une période d'au moins 15 jours consécutifs sans goutte d'eau (ou avec moins de 0,20 mm de pluie par jour).
Par contre, aux États-Unis, on dit qu'il y a sècheresse quand une zone étendue reçoit seulement 30 % ou moins de précipitation qu'en temps normal sur vingt et un jours minimum.
Et en Australie (pays désertique en son cœur), il faut qu'une région reçoive moins de 10 % de précipitations par rapport à la moyenne annuelle et en Inde, là il faut que les précipitations annuelles soient inférieures de 75 % aux normales saisonnières pour qu'on parle de sècheresse.
Donc par ces exemples, on voit que la sécheresse s'interprète différemment selon ou nous sommes situés et selon que nous sommes un pays propices ou non aux grandes chaleurs.
Mais, par contre une définition ne change pas d'un pays à l'autre, c'est les types de sécheresses ; on distingue 3 :
- la sécheresse atmosphérique qui est liée à un manque de précipitations. Elle est jugée en fonction des quantités d'eau relevées dans les pluviomètres;
- la sécheresse agricole qui est attachée au taux d'humidité du sol agricole à 1 mètre de profondeur. Lorsqu'elle a lieu, la réserve utile des sols des végétaux s'épuise et peut entrainer des effets dramatiques sur les plantes. Cela ralentit la montée de la sève;
- la sécheresse hydrologique qui est la diminution des ruisseaux et des rivières. Elle intervient après l'épuisement de la réserve en eau des sols. Quand cette situation s'aggrave encore, alors les nappes phréatiques, puis les nappes souterraines disparaissent au fur et à mesure.
Nous sommes actuellement touchés par une sécheresse hydrologique (les nappes phréatiques sont pratiquement à sec), mais auparavant nous étions dans une sécheresse agricole.
Passons maintenant aux régions touchées par des restrictions d'eau.
Les régions touchées et les arrêtés d'interdiction d'utilisation de l'eau
Selon les données de Météo France, le déficit pluviométrique depuis le 1er mars 2011 à Paris était de 84% et il est passé aujourd'hui (suite aux pluies « abondantes » de juin et juillet) à 57%. Même chose pour Strasbourg par exemple (70% à 51%).
Ce qui est bon signe mais cela reste inquiétant.
Il faut savoir, qu'actuellement, 72 départements (que je citerai à la fin de l'article) sont encore visés par des arrêtés de restriction d'eau.
En effet, les dernières précipitations n'ont pas permis aux nappes phréatiques de se recharger mais ont profité aux parties superficielles du sols destinées à l'agriculture (ce qui est un petit soulagement pour les agriculteurs même si le mal est fait).
Mais beaucoup s'interroge sur cette sécheresse: cet hiver, nous avons croulés sous des centimètres de neige partout en France; cette neige a eu le temps de fondre, de s'infiltrer dans les nappes et de les ressourcer ! Certes, mais il ne faut pas oublier que nous sommes en déficit depuis de nombreuses années et il faudrait au moins 3 autres hivers comme nous avons vécu et des printemps pluvieux pour que les niveaux des nappes phréatiques reviennent à la normale. Et malheureusement, nous avons eu un printemps très sec (voir trop sec, vous avons atteint des records de chaleur en avril et cela va se répéter chaque année dorénavant). Avril a été plus chaud de 4°C par rapport à la moyenne de la période 1971-2000, ce qui n'a pas aidé les nappes phréatiques à se ressourcer.
Donc pour les particuliers et aussi les agriculteurs, la situation reste toujours aussi critiques et les arrêtés de restriction d'eau pris par les préfets au début du printemps sont maintenus malgré l'été maussade que nous subissons.
Si les préfets instaurent des restrictions d'utilisations de l'eau, c'est que les nappes phréatiques sont en grave danger, et les géologues estiment qu'il faudra plusieurs saisons hydrologiques pour que la situation repasse à la normale. A noter, qu'une saison hydrologique est la saison qui s'étend du 1er septembre au 1er mars (avec les neiges hivernales et les pluies du printemps); c'est ce que l'on appelle les précipitations efficaces car elles peuvent s'infiltrer dans le sol et accéder aux nappes phréatiques, contrairement aux précipitations estivales qui n'ont pas le temps de s'infiltrer à cause de la chaleur et de l'évaporation. Si l'eau n'est pas au rendez vous dans cette période efficace, même un été arrosé (comme le notre actuellement) ne comblera jamais les déficits accumulés.
Le rôle de ces arrêtés d'interdiction
Pour faire face à une insuffisance éventuelle de la ressource en eau en période d’étiage, les préfets peuvent prendre des mesures exceptionnelles de limitation ou de suspension des usages de l’eau en complément des règles générales et ce en application de l’article L.211-3 II-1° du code de l’environnement.
72 préfets de départements l'ont fait depuis début mars (le département le plus touché est celui des Deux Sèvres). Aujourd'hui, les 3 quarts de la France sont touchés (surtout sur la côte Ouest).
Les articles R. 211-66 à R. 211-70 du code de l’environnement précisent les modalités de mise en œuvre de ces arrêtés.
L’objectif général de ceux ci est de gérer les situations de pénurie en assurant l’exercice des usages prioritaires (la santé, la sécurité civile, l’approvisionnement en eau potable et la préservation des écosystèmes aquatiques) mais surtout la priorité essentielle est de limiter les usages de l’eau pour tout un chacun.
Les mesures prises par le préfet en période de sécheresse doivent être progressives, appropriées au but recherché, suffisantes eu égard à la gravité de la situation, et ne peuvent être prescrites que pour une période limitée. De même, le caractère départemental de l’exercice réglementaire en cas de crise doit parfois être dépassé afin de respecter le principe d’égalité entre usagers des différents départements et la nécessaire solidarité amont - aval des bassins versants en cohérence avec la logique hydrographique.
C’est l’essence de l’article R. 213-14 du code de l’environnement relatif aux missions du préfet coordonnateur de bassin, chargé pour chaque bassin hydrographique de piloter, en concertation avec ses collègues concernés, l’élaboration et la mise en œuvre des plans de crise qui doivent servir ces principes.
Si le préfet ne prend pas ce type d'arrêtés, des arrêtés cadres interdépartementaux ou interrégionaux peuvent être établis à l’échelle des bassins ou sous-bassins hydrographiques. Ils permettent de définir à l’avance et de façon cohérente pour les différents départements concernés par un même bassin, les règles et les seuils de déclenchement des mesures de limitation. Ces arrêtés facilitent l’exercice réglementaire "à chaud", c’est-à -dire en période de crise. Ils permettent également d’assurer une plus grande transparence et une meilleure concertation entre les usagers d’un même bassin.
La gravité des phénomènes de sécheresse est d’une appréciation très variable d’un bassin à l’autre, car d’une part, la ressource en eau est très variable dans sa composition et son abondance, en fonction de la géologie des bassins et de leur climatologie ; et d’autre part, la pression sur la ressource varie considérablement d’un bassin à l’autre en fonction de la densité de la population et de la diversité des activités économiques.
Pour votre information, je vous liste les départements soumis à des arrêtés de restrictions d'eau, mais ATTENTION, si votre département n'y apparait pas, cela ne veux pas dire que la ressource en eau est fort abondante, elle est juste moins critique que ceux cités, donc ne l'a gaspillez pas : Ain (01),Aisne (02),Allier (03),Hautes-Alpes (05),Ardèche (07),Aube (10),Aveyron (12),Cantal (15),Charente (16),Charente-Maritime (17),Cher (18),Corrèze (19),Côte-d’Or (21),Dordogne (24),Doubs (25),Drôme (26),Eure (27),Eure-et-Loir (28),Finistère (29),Gard (30),Haute-Garonne (31),Gers (32),Gironde (33),Hérault (34),Ille-et-Vilaine (35),Indre (36),Indre-et-Loire (37),Isère (38),Jura (39),Landes (40),Loir-et-Cher (41),Loire (42),Haute-Loire (43),Loire-Atlantique (44),Loiret (45),Lot (46),Lot-et-Garonne (47),Lozère (48),Maine-et-Loire (49),Manche (50),Marne (51),Haute-Marne (52),Mayenne (53),Meuse (55),Morbihan (56),Nièvre (58),Oise (60),Orne (61),Bas-Rhin (67),Haut-Rhin (68),Rhône (69),Haute-Saône (70),Saône-et-Loire (71),Sarthe (72),Savoie (73),Haute-Savoie (74),Seine-Maritime (76),Seine-et-Marne (77),Deux-Sèvres (79),Somme (80),Tarn (81),Tarn-et-Garonne (82),Vaucluse (84),Vendée (85),Vienne (86),Haute-Vienne (87),Yonne (89),Territoire de Belfort (90),Essonne (91),Val de Marne (94),Val d’Oise (95).