Qu’il vous souvienne que plusieurs condamnations en référé avaient été prononcées à l’encontre de certaines entreprises comme La Poste ou Amazon France pour le non-respect des mesures de prévention liées à l’épidémie de covid-19 (TJ Nanterre, 14 avril 2020, n° 20/00503, puis Versailles, 24 avril 2020, n° 20/01993). C’est au tour de la Société Renault, constructeur automobile français d’être attraite devant le juge de l’urgence pour se prononcer par rapport aux mesures mises en place pour poursuivre son activité malgré la pandémie de covid-19.

L’usine de Sandouville (département de la Seine-Maritime en région Normandie), à l’arrêt depuis le début du confinement, avait élaboré un projet portant sur les modalités organisationnelles de l’activité en vue de la reprise de production pendant l’épidémie de covid-19.

Les modalités de fond et de forme de cette démarche a fait réagir l’un des syndicats du site qui n’a pas manqué de saisir le juge des référés. Ce dernier estime que les représentants du personnel n’avaient été qu’informés, et non consultés. De plus, la CSSCT du site de la société Renault Sandouville n’avait pas été convoquée. Le CSE n’a pas reçu l’ensemble des documents nécessaires à son avis éclairé, et, l’entreprise a convoqué la CSSCT à une réunion postérieurement à celle du CSE d’établissement ; ce qui est contraire à leur accord d’entreprise.

La carence de l’entreprise dans ces modalités d’information-consultation des représentants du personnel et sur certains autres points a été reconnue par le juge des référés.

Il a également relevé l’irrégularité de la convocation des membres du CSE.

Par ailleurs, aucun document s’agissant des modalités organisationnelles relatives à la santé et la sécurité des salariés de l’usine, n’a été remis.

On reproche encore à la société de n’avoir pas associé le CSE à la préparation des actions préventives et à l’évaluation des risques qu’elle a menée.

Le CSE n’a pas été consulté au préalable à la mise à disposition des équipements de protection individuelle (EPI). Il n’a pas non plus été préalablement consulté sur les programmes de formation à la sécurité à mettre en place à destination des salariés.

L’évaluation des risques quant à elle va être jugée insuffisante. Les risques psychosociaux n’ont pas été suffisamment pris en compte dans l’évaluation globale des risques induits par la crise sanitaire.

Pour finir, la juridiction va relever la nécessité de procéder à une modification de tous les plans de préventions et protocoles de sécurité applicables dans l’usine pour prendre en compte le risque lié au covid-19 après information du CSE.

Cette décision du juge des référés s’inscrit dans le droit fil des précédentes décisions rendues en référé sur l’application des mesures de sécurité liées à la propagation du covid-19 dans les entreprises. La solution vient certifier les enseignements issus de la décision rendue à propos de la société Amazon logistique France. Les entreprises devront veiller à respecter rigoureusement la réglementation en matière de consultation du CSE.

En conséquence, la réunion du CSE de même que tout acte ou décision pris lors de celle-ci ont été annulés par le juge, invitant l’entreprise à reprendre depuis le début la procédure d’information consultation du CSE ; suspendre le projet le temps de la régularisation de cette procédure et de la mise en place de mesures effectives et contraindre l’entreprise à procéder à une évaluation suffisante des risques ; en retranscrire les résultats sur le document unique ; mettre en œuvre les actions de prévention et méthode de travail adaptée tout en y associant les représentants du personnel. Une astreinte de 3 000 € par infraction constatée et par jour de retard accompagne la condamnation.