Source de pollutions, de gaspillage et de dangers, la question des déchets et de leur gestion a été reprise par le législateur français et européen, dès 1975, afin de venir l’encadrer pour en limiter les impacts. La notion de déchet a longtemps été débattu au sein des institutions, car conférant dès lors un régime stricte à ce qu’elle venait englober. Ainsi, la directive n°2007/98/CE, reprise fidèlement à l’article L. 541-1-1 du code de l’environnement considère le déchet comme étant « toute substance ou tout objet, et plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l’intention ou l’obligation de se défaire ».


Le développement du principe d’économie circulaire au sein de nos modes de consommation tend à ce que le déchet soit transformé afin de redevenir un produit, et non plus seulement un bien dont on ne sait pas comment se défaire, créant ainsi de réels îlots de déchets à travers le monde. C’est dans cette démarche que s’inscrit la possibilité de sortir du statut de déchet, par le biais d’une valorisation de ces derniers. Introduite par la directive n°2008/98/CE, la mise en place de critères permettant la sortie du statut de déchet vise à assurer un niveau élevé de protection de l’environnement et offre un réel atout économique. Récemment, deux arrêtés sont venus élargir le champ d’application de la sortie du statut de déchet afin d’englober certains objets et produits chimiques.


Quels sont les critères de sortie du statut de déchets ?:

La procédure de sortie du statut de déchet (SSD) nécessite au préalable, que le déchet ait fait l’objet d’une opération de valorisation ou de recyclage: un déchet cesse d’en être un après avoir été traité dans une installation de traitement de type IOTA soumise à autorisation ou déclaration, ou de type ICPE soumise à autorisation, enregistrement ou déclaration. Ce traitement consiste en une opération de recyclage ou de préparation en vue de sa réutilisation.
Une fois cette opération de traitement préalable effectuée, afin de définitivement sortir du statut de déchet, les substances ou objets ainsi obtenus doivent remplir un certain nombre de critères répondant aux conditions suivantes :
• La substance ou l'objet est couramment utilisé à des fins spécifiques ;
• Il existe une demande pour une telle substance ou objet ou elle répond à un marché ;
• La substance ou l'objet remplit les exigences techniques aux fins spécifiques et respecte la législation et les normes applicables aux produits ;
• Son utilisation n'aura pas d'effets globaux nocifs pour l'environnement ou la santé humaine.
Les critères permettent de vérifier que ces conditions sont respectées. Ils sont fixés au cas par cas en fonction du type de déchet, soit par l’autorité européenne via la publication d’un règlement (c’est le cas des débris de fer, d’acier et d’aluminium, calcin de verre et débris de cuivre), soit par l’autorité nationale qui les établi par arrêté, comme il a pu le faire en matière de broyats d’emballages en bois, huiles usagées et récemment en matière d’objets ou de produits chimiques.
Pour rappel, la demande de SSD est à l’initiative de l’exploitant de l’ICPE ou du IOTA par le biais d’un dossier comportant en outre, une attestation de conformité ainsi que le formulaire CERFA n°14831 qu’il adresse au préfet s’il s’agit d’une SSD locale, ou au ministère de la transition écologique s’il s’agit d’une SSD Nationale, entrainant la publication d’un arrêté établissant les critères de SSD.


L’élargissement de la procédure de sortie du statut de déchet aux objets et produits chimiques
Dans une volonté d’accélérer le mouvement de l’économie circulaire, le législateur a publié deux arrêtés relatifs aux produits et objets chimiques pouvant quitter le statut de déchet : L’arrêté du 11 décembre 2018 fixe ainsi les critères de sortie du statut de déchet des objets et produits chimiques ayant fait l’objet d’une préparation en vue de leur réutilisation au sens de l’article L.541-1 du code de l’environnement. Il vise les cartouches d’impression, les pneumatiques, tous les emballages sous statut de déchet, ou encore les déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE), les textiles, les éléments d’ameublement ayant le statut de déchets encombrants, les conteneurs à pression vides, les gaz en récipient à pression et les produits chimiques mis au rebut. Ces derniers ne doivent pas contenir d’amiante ou de polluants organiques persistants à des concentrations supérieures aux limites règlementaires européennes.

Contrairement à la procédure de SSD classique qui nécessite une opération de traitement préalable dans une ICPE ou une IOTA, la procédure fixée par l’arrêté du 11 décembre 2018 ne l’impose pas. Ainsi afin de redevenir des produits, ces déchets vont subir une préparation en vue de leur réutilisation comportant un contrôle technique (visuel tactile etc.) et administratif permettant de garantir que le déchet pourra être réutilisé directement pour le même usage que celui qui était prévu à l’origine, avec la possibilité d’instaurer des étapes de nettoyage ou de réparation afin de parvenir à ce résultat. Ils devront par conséquent respecter les conditions de conditionnement et d’entreposage garantissant leur intégrité et leur qualité, et être conforme aux obligations réglementaires et de mise sur le marché encadrant le produit d’origine. De plus, l’exploitant devra impérativement avoir conclu un contrat de cession pour ces objets ou produits chimiques, ou les proposer à la vente aux particuliers dans un espace de distribution dont il est lui-même l’opérateur, et respecter certaines obligations complémentaires fixées par l’annexe II de l’arrêté.

L’arrêté du 22 février 219 fixe les critères des objets et produits chimiques ayant fait l’objet d’une régénération c’est-à-dire d’une opération de recyclage consistant à lui rendre les performances équivalentes du produit chimique ou de l’objet dont il est issu, compte tenu de l’utilisation prévue et comprend l’extraction, la destruction ou la transformation des impuretés. Il vise les articles, substances ou mélanges tel que défini par l’article 3 du règlement REACH, qu’ils aient ou non le statut de déchet. L’annexe I de l’arrêté fixe les critères que doivent respecter ces déchets afin de pouvoir être éligible au dispositif de SSD. L’exploitant doit avoir conclu un contrat de cession pour les produits chimiques ou objets concernés ou ces derniers doivent être régénérés dans le cadre d’un contrat de prestation de service, établir une attestation de conformité sur le modèle figurant en annexe II de l’arrêté, appliquer un système de gestion de la qualité conforme à l’arrêté ministériel du 19 juin 2015 et identifier chaque lot commercialisé par un numéro unique ainsi que par la référence de l’installation où a été réalisée l’opération de valorisation.

Contrairement à l’arrêté de décembre 2018, le traitement préalable du déchet dans une ICPE ou une IOTA reste impératif. Ainsi, sont concernés par ce nouvel arrêté, les exploitants des installations classées sous les rubriques 2770 (traitement thermique de déchets dangereux), 2771 (installation de traitement thermique de déchets non dangereux), 2790 (installation de traitement de déchets dangereux) et 2791 (installation de traitement de déchets non dangereux) de la nomenclature des ICPE, soumises à autorisation ou à déclaration. A noter que la Cour de justice de l’Union européenne admettait déjà qu’un déchet dangereux puisse faire l’objet d’une sortie du statut de déchet « dès lors que l’opération de valorisation permet de le rendre utilisable sans avoir d’effets nocifs sur l’environnement ou la santé humaine ».



L’extension de la procédure de sortie du statut de déchet aux chiffons usagés:

L’arrêté du 25 février 2019 vient encore plus étendre la possibilité de faire sortir certains déchets de ce statut, en prenant en compte les chiffons usagés issus de textiles coupés. Sont concernés les exploitants d’installations relevant des rubriques 2714 (installations de transit, regroupement, tri ou préparation en vue de la réutilisation de déchets non dangereux de textiles) et 2791 (installations de traitement de déchets non dangereux). Ces derniers ont la possibilité de faire sortir du statut de déchet des chiffons d'essuyage coupés élaborés à partir de textiles sous statut de déchet, sous réserve de respecter l’ensemble des critères fixés à l’annexe I de l’arrêté.