Après plusieurs tentatives, la France avait introduit en 2014 une fiscalité carbone. Mais en décembre dernier, en réponse au mouvement des "gilets jaunes", le Gouvernement a amorcé plusieurs reculs. Parmi ces reculs, la suppression de la trajectoire de la fiscalité carbone, votée l'année dernière pour l'ensemble du quinquennat. Celle-ci devait notamment contribuer à l'atteinte de l'objectif de neutralité carbone à l'horizon 2050. Les deux principaux secteurs émetteurs sont en effet les transports et le bâtiment.

De nombreuses critiques ont pointé la manière dont le Gouvernement a instauré cette fiscalité énergétique notamment concernant les carburants : il lui est notamment reproché le manque d'accompagnement social de la mesure et un dispositif qui pèse surtout sur les ménages les plus modestes ou habitant dans des communes rurales. Ainsi, alors que les entreprises sont responsables de 61 % des émissions nationales de gaz à effet de serre, elles n'acquitteraient que 36 % du produit de la fiscalité carbone. Enfin, le mécanisme profiterait surtout aux caisses de l'Etat.

L'ensemble des contributions, y compris celle du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), se rejoignent sur la nécessité de garantir la transparence dans l'utilisation des recettes de la fiscalité carbone. Autre constat partagé : l'acceptation de la fiscalité carbone et l'adaptation des comportements ne pourra s'opérer sans des mécanismes de compensation pour les ménages les plus modestes.

Une fiscalité environnementale axée sur l'énergie
La fiscalité énergétique représente 83 % du rendement de la fiscalité environnementale, soit 46 Md€ en 2018. Elle est composée des taxes sur la consommation, dont la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (comprennent une composante carbone depuis 2014) et les taxes sur l'électricité.

Outre les mesures d'accompagnement et transparence, pour reprendre dans de bonnes conditions la trajectoire de hausse de la fiscalité carbone, le CPO pose également différentes conditions. Tout d'abord, il conseille de distinguer la fiscalité carbone de la fiscalité énergétique.

"Cette distinction pourrait être d'abord pratique, indique-t-il. En effet, il pourrait être envisagé de fournir aux consommateurs l'information sur le contenu de fiscalité carbone dans leur facture TTC, isolément des accises et de la TVA". Le CPO vise également une distinction juridique.

Il préconise aussi d'élargir l'assiette de la taxe. Pour cela, il propose de supprimer les tarifs de remboursement de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) en faveur du transport routier de marchandises (1,1 Md€). Il considère nécessaire de revenir sur l'exonération des secteurs du transport aérien international, du transport maritime international et national, du transport fluvial et de la pêche. Enfin, il souhaiterait faire converger certains taux réduits sur le gazole non routier sur les tarifs de droit commun.

Pour mieux articuler la fiscalité environnementale avec les autres instruments, le CPO remet ainsi sur la table plusieurs pistes dont l'introduction d'une taxe kilométrique nationale sur les poids lourds ou l'alignement de la fiscalité du diesel sur celle de l'essence, ou la mise en place de péages urbains. Autre réflexion à reprendre selon lui : l'instauration d'un prix plancher du carbone.

Il préconise également la révision des modalités de calcul de la taxe additionnelle sur les certificats d'immatriculation ou la révision du barème kilométrique de l'impôt sur le revenu et de l'avantage fiscal lié aux voitures de fonction.