Depuis deux ans, en vue de lutter contre la fraude fiscale et la fraude fiscale internationale, l’administration fiscale a mis en place un dispositif de rémunération des personnes qui lui communiquent des informations pouvant conduire à la découverte de manquements caractérisés aux obligations fiscales.

C’est par la Loi de finances du 29 décembre 2016 numéro 2016-1917 - publié au Journal Officiel – que l’autorisation de rétribution, à titre expérimental, a été octroyé pour une durée n’excédant pas deux années, soit jusqu’au 24 avril 2019.

S’il est important de s’attarder sur les conditions de la rémunération d’un indicateur fiscal (I),
il n’est pas indifférent de s’interroger sur l’infraction de fraude fiscale (II).


I – Les conditions de la rémunération d’un indicateur fiscal

La qualité d’indicateur fiscal nécessite plusieurs conditions quant à la perception de sa rémunération (A), dépendant d’une procédure particulière (B)

A. La qualité d’indicateur fiscal nécessite plusieurs conditions quant à la perception de sa rémunération

1. Les conditions relatives à la personne

Toute personne physique peut être un indicateur fiscal. Toutefois, il faut que cette dernière soit indépendante des administrations publiques. Les informations fournies doivent être révélés spontanément et la personne physique indépendante des administrations publiques doit impérativement s’identifier auprès de l’administration devant laquelle elle a fourni les informations.

2. Les conditions relatives à la nature des informations fournies à l’Administration fiscale

Les informations transmises par l’indicateur fiscal doivent permettre à l’Administration fiscale de découvrir un ou plusieurs manquements aux obligations déclaratives imposés par la loi, notamment :

- Les sommes versées ou avantages octroyés, directement ou par des intermédiaires, au profit d’un agent public lors de transactions commerciales internationales ;
- Les bénéfices transférés indirectement aux entreprises situées hors de France, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d’achat ou de vente, soit par tout moyen ;
- Ou encore, les bénéfices ou les revenus positifs provenant d’une entité juridique personne morale organisme, fiducie ou institution comparable établie ou constituée hors de France et soumise à un régime fiscal privilégié.

B. La procédure de versement d’une rémunération aux indicateurs fiscaux

Les agents de la direction nationale des enquêtes fiscales sont chargés, lors de l’examen d’une décision d’attribution d’une indemnité, d’observer l’intérêt fiscal pour l’État de l’information communiquée, et ce, avant toute rémunération. En ce sens, un des critères de la rémunération d’un indicateur fiscal est le risque que l’indicateur estime prendre en adressant les informations, présumées non conformes, à l’Administration fiscale.

C’est le Directeur général des Finances publiques qui fixe le montant de la rémunération.

Par ailleurs, c’est à ce dernier que revient la décision d’indemnisation ou non, sur proposition de la direction nationale des enquêtes fiscales, en prenant en compte du montant des sommes éludées estimées ; si possible, recouvertes par l’Administration fiscale.

Le ministre Gérald Darmanin a indiqué que soixante et une demandes de rémunération ont déjà été reçues. Trente-neuf d’entre elles ont été classées sans suite, vingt dossiers sont en cours et un aviseur a déjà été indemnisé (pour une somme conséquente). 86 millions d’euros de droits et de pénalités ont été notifiés à la suite des contrôles permis par ces informations.

La direction nationale des enquêtes fiscales conserve les pièces permettant d’établir l’identité de l’indicateur fiscal, avec des informations relatives à la date et aux modalités de versement de la rémunération des informations de dénonciation. De manière confidentielle.


II – L’infraction de fraude fiscale

A. L’élément légal de l’infraction de fraude fiscale

L’infraction de fraude fiscale est régie par l’article 1741 du Code général des impôts qui dispose que :

« Quiconque s'est frauduleusement soustrait ou a tenté de se soustraire frauduleusement à l'établissement ou au paiement total ou partiel des impôts visés dans la présente codification, soit qu'il ait volontairement omis de faire sa déclaration dans les délais prescrits, soit qu'il ait volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l'impôt, soit qu'il ait organisé son insolvabilité ou mis obstacle par d'autres manœuvres au recouvrement de l'impôt, soit en agissant de toute autre manière frauduleuse, est passible, indépendamment des sanctions fiscales applicables, d'une amende de 500 000 € et d'un emprisonnement de cinq ans ».

B. Les éléments préalables aux poursuites pour l’infraction de fraude fiscale

La mise en œuvre des poursuites pour l’infraction de fraude fiscale, répondent à une procédure particulière qui déroge de la procédure pénale de droit commun sur plusieurs aspects substantiels.

L’infraction de fraude fiscale, ne peut pas être poursuivie d’office par l’autorité normalement compétente, le Procureur de la République. L’infraction de fraude fiscale nécessite au préalable la plainte de l’Administration fiscale. En effet, pour mettre en mouvement l’exercice de l’action publique, à la différence des autres délits, il est nécessaire d’obtenir de l’Administration fiscale cette plainte préalable qui constitue une formalité substantielle d’ordre public, sous risque que les juges déclarent une cause d’irrecevabilité d’office découlant de son inobservation.

Par ailleurs, il convient de constater également que les modalités de la mise en œuvre des poursuites pour l’infraction de fraude fiscale vont différer si, à l’issue l’Administration fiscale dépose plainte à la fin d’une procédure de contrôle, après avoir caractérisé le délit ou sur des présomptions caractérisées de fraude en vue d’initier une procédure judiciaire d’enquête fiscale.

C. L’élément matériel

En premier lieu, il faut, de la part du contribuable, personne morale ou personne physique, une tentative de soustraction ou soustraction à l’établissement ou au paiement partiel ou total des impôts visés au code général des impôts.

Il convient d’observer que l’infraction de fraude fiscale est réprimé, non seulement si le délit est consommé, mais également en cas de simple tentative.

Il convient de rappeler également que l’article 1741 du Code général des impôts est un texte à portée générale, susceptible de s’appliquer en matière d’assiette qu’en matière de recouvrement. Tant en ce qui concernes les impôts directs que les taxes sur le chiffre d’affaires, les impôts indirects, les droits d’enregistrement et taxes assimilées, ou encore l’impôt de solidarité sur la fortune.

D. L’élément moral

L’infraction de fraude fiscale nécessite un dol général qui consiste pour le contribuable, personne physique ou morale, d’avoir l’intention de se soustraire à l’impôt. Tant totalement que partiellement, en ayant connaissance d’être en violation des obligations fiscales imposées par la loi.