L’entreprise comme l’on peut le subodorer n’est pas épargnée par les affres des addictions aux substances psychoactives. C’est ce qui ressort en effet de diverses études de sondages.

A cet égard, l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies (OFDT) révèle que 91 % des dirigeants, encadrants et personnels RH et 95 % des représentants du personnel déclarent que les salariés de leurs structures consomment au moins un produit psychoactif (Revue littérature, OFDT, 2015).

D’autres données corroborent cette constatation :

- le Baromètre Santé 2010 de l’INPES (Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé) révèle que 16,4 % des actifs occupés déclarent consommer de l’alcool sur le lieu de travail en dehors des repas et des pots (les médicaments psychotropes et le cannabis sont les autres substances psychoactives les plus consommées en milieu de travail) ;
- l’enquête menée en 2009 par l’INPES et la SMTOIF (Société de Médecine du Travail de l’Ouest de l’Île de France) auprès de 750 médecins du travail rapporte que, sur les 12 mois précédant cette étude, 92 % des médecins du travail ont été sollicités par des DRH pour un problème d’alcool chez un salarié, 29 % pour un problème de cannabis.

Dès lors, la prévention des conduites addictives en milieu du travail devient une préoccupation des pouvoirs publics. Par ailleurs, le gouvernement a adopté un Plan national de mobilisation contre les addictions (2018-2022) qui s’articule autour de six (6) axes à savoir :

- protéger dès le plus jeune âge ;
- mieux répondre aux conséquences des addictions pour les citoyens et la société ;
- améliorer l’efficacité de la lutte contre le trafic ;
- renforcer les connaissances et favoriser leur diffusion ;
- renforcer la coopération internationale ;
- créer les conditions de l’efficacité de l’action publique sur l’ensemble du territoire.

Mais qu’entend-on par addiction et par substance psychoactive ? D’un point de vue scientifique, les addictions sont des pathologies cérébrales définies par une dépendance à une substance psychoactive (alcool, tabac, drogues, médicaments psychotropes,…) ou à une activité (jeux de hasard et/ou d’argent,…) avec des conséquences délétères. Quant à la substance psychoactive, elle s’entend d’une substance qui agit directement sur le cerveau humain en modifiant le comportement, les humeurs, les perceptions et l’activité mentale avec des effets somatiques sur le corps.

On déduit aisément que l’addiction est un facteur de risques professionnels en ce qu’elle peut diminuer la vigilance et les réflexes des salariés. Elle peut aussi modifier les capacités de raisonnement, le champ de vision et la perception du risque. Enfin, elle peut être à l’origine d’accidents de travail, de violence, de stress, et de décisions erronées.

Alors, comment prévenir les risques d’addiction dans le cadre du travail ?

La prévention des addictions en entreprise doit nécessairement s’inscrire dans une démarche individuelle et collective. En effet, l’addiction peut concerner tous les salariés et affecter tous les postes. De même, elle doit s’entendre globalement et englober tous les stades de l’addiction. De ce fait, la démarche préventive doit prendre en compte toutes les formes de consommation des substances psychoactives à la fois occasionnelle (sans conséquence immédiate) et abusive (responsable de dommages).

La démarche préventive doit également se pencher sur les causes (internes et externes) et sur les vecteurs (importation, acquisition, adaptation) des addictions aux substances psychoactives chez les salariés. Dans la même optique, la prévention doit s’appuyer sur une évaluation des risques d’addictions aux substances psychoactives. En effet, les risques d’addictions devront être évalués afin d’envisager les mesures préventives idoines et ce en concertation avec les salariés. La formation et la sensibilisation des salariés à ces risques sont également déterminants.

Depuis janvier 2019, la plateforme nationale d’actions globales pour la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) propose des recommandations visant à prévenir et à réduire les risques d’addictions aux substances psychoactives (alcool, tabac, stupéfiants,...). Ces recommandations promeuvent une approche globale de prévention des risques et portent sur les axes suivants : Prévenir, Réformer, Former, Être attentif, Définir ensemble, Informer, Appliquer, Outiller, Déclarer.

Afin d’obvier aux risques d’addictions aux substances psychoactives, la plateforme RSE suggère aux entreprises :

- de porter une attention particulière à la qualité de vie au travail de leurs salariés, afin de réduire le risque d’un recours de ceux-ci aux substances psychoactives, et de veiller à porter une attention particulière à la vulnérabilité des jeunes (stagiaires, apprentis, alternants) ;
- d’associer les parties prenantes internes (salariés, médecins du travail, DRH, managers) à la définition et à la mise en œuvre des actions d’information et de prévention, en particulier lors de l’élaboration d’un règlement intérieur, lorsque cela est nécessaire ;
- de veiller à la sensibilisation et à la formation du personnel médical des services de santé au travail, interentreprises et autonomes, aux différentes méthodes de prévention et d’information sur les conduites addictives, et d’associer des tiers aux actions menées dans l’entreprise ;
- de relayer dans l’entreprise les messages des campagnes nationales de prévention et de participer aux programmes d’actions proposés par les organismes de protection sociale ;
- de faire figurer la politique de prévention des consommations à risques des entreprises dans la valorisation de leur politique de responsabilité sociétale.