Le navire Grande America d’origine Italienne a sombré non loin des côtes françaises, le mardi 12 mars dans l’après-midi à 333 km des côtes. La nappe d’hydrocarbure touchera le littoral français et plus particulièrement de la Charente-Maritime à la Gironde dans la nuit du dimanche au lundi. L’armateur recense 365 conteneurs, dont 45 répertoriés comme contenant des matières dangereuses. De plus 2 200 tonnes de fioul lourd était embarqué pour servir de combustible au navire.

Jean-Louis Lozier, préfet maritime de l’Atlantique, a renouvelé sa mise en demeure à l’armateur demandant de mettre fin au danger pour la navigation et l’environnement marin représenté par les conteneurs, et de traiter les éventuelles pollutions maritimes. Ainsi l’exploitant du navire doit aussi présenter un plan d’actions visant à traiter les pollutions, et à assurer l’investigation de l’épave pour comprendre les circonstances du naufrage.


De manière générale, l’armateur se place sous la juridiction internationale, par la convention de Montego Bay de 1982, et de manière spécifique, par la convention de Marpol de 1973 pour le domaine de la prévention et de la répression de la pollution. A côté de ces normes internationales, qui s’imposent à tous les Etats les ayant ratifiées, existe, en France, la loi du 5 juillet 1983 qui prévoit les modalités de l’infraction de pollution maritime. Elle prévoit notamment quelles personnes peuvent être incriminées comme le commandant, l’armateur et toute personne ayant un pouvoir de conduite ou de direction sur le navire. Toutes les lois nationales sont censées être conformes au droit international.

Dans l’affaire similaire de l’Erika la Cour de Cassation avait d’abord déterminé la compétence du juge pénal français par la méthode du conflit de juridiction puis s’était penché sur le droit applicable, et là aussi le droit français a été retenu. Le fait que le droit français soit plus sévère que les conventions internationales n’a aucune incidence sur son application, en effet le droit français permet de rechercher la responsabilité pénale d’un plus grand nombre de personnes.

La convention de Montego Bay prévoit que la souveraineté de l’Etat s’exerce en matière de pollution. De plus toujours dans l’affaire de l’Erika la cour a confirmé que la loi française plus sévère que la convention internationale de Marpol pouvait s’appliquer dans la mesure où le texte international incite les Etats ratificateurs à mettre en place un système répressif conforme aux objectifs de la convention, qui est la lutte contre les pollutions.

Sur le principe de la réparation civile c’est la loi dite CLC (Civil Liability Convention) qui s’applique. Selon les termes de cette convention la responsabilité de l’affréteur peut aussi être recherchée. La convention a une limite ratione loci ; en effet elle ne s’applique qu’aux pollutions intervenues dans la ZEE (Zone économique exclusive) d’un Etat. Cette zone s’étend sur 200 milles marins soit 370,4 km. Comme le naufrage du Grande America est intervenu à environ 333 km des côtes françaises, la convention CLC sera applicable et ainsi la loi française pourra se voir être appliquée en matière civile aux conséquences du naufrage.


La convention CLC permet une indemnisation par les fonds internationaux d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures dits FIPOL.

En matière pénale, l’article L218-12 du code de l’environnement prévoit que « Les peines relatives à l'infraction prévue au premier alinéa de l'article L. 218-11 sont portées à dix ans d'emprisonnement et 15 millions d'euros d'amende pour tout capitaine d'un navire-citerne d'une jauge brute inférieure à 150 tonneaux, ou de tout autre navire d'une jauge brute inférieure à 400 tonneaux dont la machine propulsive a une puissance installée supérieure à 150 kilowatts ». Cette rédaction compliquée est due à la compilation des sources internationales, européennes et nationales.


Pour rappel, dans l’affaire du naufrage de l’Erika, le Tribunal de Grande Instance de Paris reconnaissait le « préjudice environnemental » et plaçait ainsi l'écologie comme un principe de droit, et dont l’atteinte constitue un délit civil, voire un délit pénal, on peut donc espérer qu’avec l’évolution de la prise de conscience environnementale un jugement au moins aussi sévère sera appliqué.