S’il est bien reconnu une certaine liberté procédurale aux États membres de l’Union Européenne, il n’en demeure pas moins que la Cour de Justice veuille s'assurer que les règles de droit national permettent une mise en œuvre satisfaisante de la répétition de l'indu, en dressant des garde-fous. Plus généralement, son but a été d'assurer au nom de l'effectivité et de l'uniformité des instruments garantissant l'application du droit communautaire, un encadrement minimal des modalités procédurales retenues par les droits nationaux. Il fallait éviter que les juridictions internes limitent abusivement le droit à répétition de l'indu fiscal du contribuable, ce qui aurait entraîné une atteinte à la sécurité juridique de ce dernier. Par conséquent, la Cour de Justice protège la répétition de l'indu au détriment d’une autonomie procédurale nationale absolue, dans le but de préserver cette sécurité juridique. Elle encadre tout d'abord l'autonomie procédurale des droits nationaux en faisant reposer son application au respect des principes d’équivalence de la protection juridictionnelle et d’effectivité des droits.
Il y a équivalence de la protection juridictionnelle lorsqu'une procédure « s'applique indifféremment aux recours fondés sur la violation du droit communautaire et à ceux fondés sur la méconnaissance du droit interne, s'agissant d'un même type de taxes ou redevances. » (CJCE 15 septembre 1998, Aff. C-231/96 Edis). Ce principe implique que les modalités procédurales ne doivent pas être moins favorables pour les recours fondant le droit de l’UE que pour les recours similaires de nature interne (CJCE,16 DECEMBRE 1976, AFF 33/76, REWE-ZENTRALFINANZ).

Le juge communautaire le précise d’ailleurs dans une affaire concernant la taxe de concessions pour l'inscription des sociétés au registre des entreprises incompatibles avec le droit de l’union européenne. Les juges italiens se posaient la question de savoir s'il n'était pas contraire au droit communautaire, et notamment à l'article cinq du TCE, de soumettre aux actions fiscales un délai différent (de 3ans) et moins favorable par rapport à celui applicable aux actions répétition de l'indu de droit commun (qui est de dix ans).


La Cour a d’abord rappelé l'idée selon laquelle, si l'obligation de remboursement découle normalement de la primauté du droit communautaire, ses modalités relèvent du principe d'autonomie procédurale des droits nationaux, sous réserve de « l'encadrement minimal » résultant de l'application des principes dits de « l'équivalence juridictionnelle » et de « l'effectivité minimale » ( CJCE, 15 septembre 1998,Edilizia Industriale Siderurgica Srl (EDIS), affaire C -231/96 ;Spac SpA, affaire C - 260/96 ;Ansaldo Energia SpA et autres, affaire C -279,280 et 281/96).

Ensuite, après avoir souligné que l'analyse comparative des dispositions des différents droits procéduraux nationaux faisait ressortir la diversité des solutions retenues en matière de délai de réclamation et/ou de recours, elle a considéré que cette situation était inévitable tant que les modalités de l'action en répétition de l'indu n'ont pas fait l'objet d'une harmonisation communautaire. Elle précise le principe équivalence, le présentant comme étant respecté dès lors que les actions fondées sur la méconnaissance du droit communautaire ne sont pas moins bien traitées que celles de même nature fondées sur la violation du droit national. Mais qu’en revanche, ce principe ne saurait « être interprété comme obligeant un État membre à étendre à l'ensemble des actions en restitution de taxes redevances perçues en violation du droit communautaire, son régime de répétition interne le plus favorable ».

Ainsi, pour vérifier s’il y a équivalence, le juge doit examiner la similitude de l’objet des procédures (dans leur ensemble, dans leur déroulement et dans la particularité de leurs règles) de leur cause et de leurs éléments essentiels.

Le second obstacle à l’application de l’autonomie procédurale est le principe d’effectivité. Il réside dans le fait que la règle de droit national ne doit pas être « moins favorable pour les recours fondés sur le droit communautaire que pour les recours fondés sur le droit interne et ne doit pas rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l'ordre juridique communautaire » (CJCE 2 décembre 1997, Aff. C-188/95, Fantask). Par exemple, il n’y a pas effectivité lorsque les législations nationales font reposer systématiquement la charge de la preuve sur l’administré ( CJCE, 9 NOVEMBRE 1983, AFF 199/82, SAN GEORGIO ) ou lorsqu’en retour le juge fait reposer la charge de la preuve de la non répercussion de la taxe sur l’administration lorsque la taxe indûment perçue l’a conduite à être en situation d’enrichissement sans cause (CJCE, 4 MARS 1988, AFF 104/86, COMMISSION C/ Italie). La Cour de Justice a ainsi sanctionné l’Espagne et l’Italie.
Ce principe doit être respecté, et il revient à l’Etat membre de l’Union Européenne de prendre des dispositions internes pour assurer son application :
« Dans le cas où le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée deviendrait impossible ou excessivement difficile, les États membres doivent prévoir les instruments nécessaires pour permettre audit preneur de récupérer la taxe indûment facturée afin de respecter le principe d’effectivité » ( CJCE, 15 mars 2007, Reemtsma Cigarettenfabriken, aff C-35/05).
Ainsi, dans une affaire Irimie aff C-565/11 :

La Cour de justice s’oppose pour la première fois au droit interne d’un pays et ce au nom du principe d’effectivité. La Cour estime que le droit interne est contraire lorsqu’il limite gravement le droit à la restitution d’un indu.
En l’espèce le régime roumain ne permettait le remboursement d’intérêt qu’au lendemain du jour suivant la demande de restitution. La Cour de justice y a vu un régime juridique contraire au droit de l’union en se basant sur ledit principe (CJUE, 18 Avril 2013, Irimie aff C-565/11) car :
S’agissant du principe d’effectivité, << celui-ci exige, dans une situation de restitution d’une taxe perçue par un État membre en violation du droit de l’Union, que les règles nationales relatives notamment au calcul des intérêts éventuellement dus n’aboutissent pas à priver l’assujetti d’une indemnisation adéquate de la perte occasionnée par le paiement indu de la taxe (considérant 26). En l’occurrence, force est de constater qu’un régime tel que celui en cause au principal, limitant les intérêts à ceux courant à partir du jour suivant la date de la demande de restitution de la taxe indûment perçue, ne répond pas à cette exigence (considérant 27)>>.
Il faut souligner que ces deux conditions sont cumulatives et s’appliquent strictement en l’absence de dispositions communautaires. La cour le rappel à cet effet dans un arrêt Roquette de 2000 en précisant que : « En l'absence de réglementation communautaire en matière de restitution des impositions nationales indûment perçues, il appartient à l'ordre juridique interne de chaque État membre de désigner les juridictions compétentes et de régler les modalités procédurales des recours en justice destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent de l'effet direct du droit communautaire, étant entendu que ces modalités ne peuvent ni être moins favorables que celles régissant des recours similaires de nature interne ni être aménagées de manière à rendre impossible en pratique l'exercice des droits que les juridictions nationales ont l'obligation de sauvegarder » (CJCE 28 Novembre 2000, Aff. C-88/99, Roquette Frères SA).

Par ailleurs, selon la formule de M. l'avocat général Cosmas , le contrôle « concret » de la conformité à ces deux conditions d'une règle procédurale nationale est du ressort des juridictions nationales auxquelles « il incombe, par application du principe de coopération loyale énoncé à l'article cinq du Traité sur le communautés européennes, d'assurer la protection juridique découlant pour les justiciables de l'effet direct des dispositions du droit communautaire » (CJCE, 19 juin 1990, affaire C -213/89,Factortame). Cependant, lorsque le contrôle des deux conditions relève de la Cour de justice en tant qu’elle est chargée d'assurer l'application uniforme du droit communautaire, dans le cadre du renvoi préjudiciel de l'article 177 du TCE, il est abstrait et objectif (CJCE, 16 MAI 2000, AFF C-78/98 PRESTON ET FLETCHER).
Ainsi, Dans son arrêt du 10 juillet 1997, dans l’affaire C-261/95, Palmisani/INPS, la Cour de justice relève que c'est dans le cadre du droit national de la responsabilité qu'il incombe à l'État de réparer les conséquences du préjudice causé, étant entendu que les conditions, notamment de délai, fixées par les législations nationales en matière de réparation des dommages ne sauraient être moins favorables que celles qui concernent des réclamations semblables de nature interne (principe de l'équivalence) et ne sauraient être aménagées de manière à rendre en pratique impossible ou excessivement difficile l'obtention de la réparation (principe d'effectivité).
Il faut donc comprendre qu’en plus de voir son autonomie procédurale limitée, l’État membre de l’Union Européenne engage sa responsabilité en cas de non-respect des principes énoncés. Il en ressort donc que le respect des principes d’équivalence et d’effectivité sont impératifs et contraignants.