Les transferts transfrontaliers de déchets sont régis à différents niveaux : international, de l’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE) et communautaire. En France, on applique le Règlement 1013/2006 concernant les transferts de déchets. Les sanctions relatives à ces transferts doivent être fixées au niveau de chaque Etat membre et c’est l’ordonnance n°2009-894 du 24 juillet 2009 relative aux mesures de police et aux sanctions applicables aux transferts transfrontaliers de déchets, ratifiée récemment par le décret n°2010-577 du 31 mai 2010 qui prévoit les sanctions de transferts illicites de déchets.

I. Les réglementations sur les transferts transfrontaliers de déchets

- Niveau international : Convention de Bâle

Au niveau international, les transferts transfrontaliers de déchets sont régis par la Convention de Bâle, adoptée le 22 mars 1989 et entrée en vigueur le 5 mai 1992. La Communauté Economique Européenne a approuvé la Convention et elle est entrée en vigueur le 7 février 1994.
Cette Convention concerne les transferts de déchets dangereux destinés à être éliminés ou valorisés entre des Etats parties à la Convention et des Etats tiers. Elle s’appliquera si aucune autre règlementation n’est applicable. Ainsi, elle ne régira pas les transferts transfrontaliers de déchets entre Etats dont la décision de l’OCDE s’applique et ceux entre les Etats membres de l’Union européenne.

- Niveau de l’Organisation de Coopération et de Développement Economique : Décisions de l’OCDE

La décision C(2001)107/final du Conseil de l'OCDE concernant la révision de la décision C(92)39/final sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets destinés à des opérations de valorisation s’applique comme son nom l’indique aux transferts transfrontières de déchets destinés à des opérations de valorisation entre Etats de l’OCDE auxquels ne s’applique pas déjà le règlement communautaire sur les transferts de déchets.

- Niveau communautaire : Règlement 1013/2006 concernant les transferts de déchets

Le Règlement (CE) 1013/2006 du Parlement européen et du conseil du 14 juin 2006 concernant les transferts de déchets, applicable depuis le 12 juillet 2007, vise à intégrer dans la législation communautaire les dispositions de la Convention de Bâle ainsi que la révision de la décision sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets destinés à des opérations de valorisation adoptée par l’OCDE en 2001. Il est venu remplacer le Règlement 259/93/CEE du 1er février 1993.

Ce règlement a pour but de renforcer, simplifier et préciser les procédures de contrôle des transferts de déchets pour améliorer la protection de l’environnement. Il réduit ainsi le risque de transferts de déchets non contrôlés.
Il s’applique aux transferts de déchets:
• entre États membres à l’intérieur de la Communauté européenne ou transitant par des pays tiers;
• importés dans la Communauté européenne en provenance de pays tiers;
• exportés de la Communauté européenne vers des pays tiers;
• qui transitent par la Communauté européenne sur leur trajet depuis ou vers des pays tiers.

Pour chaque transfert, une procédure plus ou moins contraignante est à respecter. A défaut, le transfert pourra être qualifié d’illicite.

L’article 2 point 35) du Règlement 1013/2006 définit le transfert illicite de déchet. Cela concerne tout transfert de déchets :
« a. effectué sans notification à l'ensemble des autorités compétentes concernées en application du présent règlement ; ou
b. effectué sans le consentement des autorités compétentes concernées en application du présent règlement ; ou
c. effectué alors que le consentement des autorités compétentes concernées a été obtenu par le recours à la falsification, à une présentation erronée des faits ou à la fraude ; ou
d. effectué d'une manière qui n'est pas matériellement indiquée dans la notification ou les documents de mouvement ; ou
e. effectué d'une manière ayant pour résultat la valorisation ou l'élimination en violation de la réglementation communautaire ou internationale; ou
f. effectué en violation des articles 34, 36, 39, 40, 41 et 43 ; ou
g. au sujet duquel, pour ce qui est des transferts de déchets visés à l'article 3, paragraphes 2 et 4 :
i. il a été découvert que les déchets ne figurent pas aux annexes III, III A ou III B ; ou
ii. les dispositions de l'article 3, paragraphe 4, n'ont pas été respectées ;
iii. le transfert est effectué selon des modalités qui ne sont pas spécifiées concrètement dans le document figurant à l'annexe VII. »

D’après l’article 50, point 1 de ce même règlement, il appartient aux États membres de fixer les règles relatives aux sanctions applicables en cas d'infraction aux dispositions du règlement 1013/2006 et de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce qu'elles soient appliquées. Les sanctions prévues doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. Ensuite, les États membres doivent notifier à la Commission européenne la législation nationale en matière de prévention et de détection des transferts illicites et les sanctions applicables à de tels transferts.

La France a fixé sa réglementation sur les sanctions applicables aux transferts transfrontaliers de déchets.

II. La réglementation nationale sur les sanctions des transferts transfrontaliers de déchets

Sur le fondement de la loi n°2008-757 du 1er août 2008 relative à la responsabilité environnementale et à diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de l’environnement, l’ordonnance n°2009-894 du 24 juillet 2009 relative aux mesures de police et aux sanctions applicables aux transferts transfrontaliers de déchets a été adoptée. Pour la ratifier, un projet de loi a été examiné le 13 janvier 2010 par le Conseil des ministres.

L’ordonnance n°2009-894 a été prise afin que les déchets soient bien repris ou traités conformément aux exigences du règlement sur les transferts de déchets. Elle fixe le cadre législatif nécessaire à l'intervention des autorités françaises en cas de transfert illicite de déchets, notamment depuis la France.
Cela implique la définition des conditions de stockage temporaire des déchets immobilisés en cas de transfert illicite, la prescription de la reprise ou du traitement de ces déchets et l’exécution d’office par l’Etat en cas de carence des responsables du transfert. Plus précisément, le texte prévoit diverses sanctions : consignation en cas de non-exécution de mesures prescrites par l’autorité compétente, ou peine maximale de 2 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende assortis, le cas échéant, d’une interdiction d’intervenir dans tout nouveau transfert de déchets, pour délit de transfert illicite de déchets. Ces sanctions seront prises en cas de transfert vers un Etat ne permettant pas un traitement adéquat des déchets, de transfert sans les documents administratifs permettant la traçabilité des déchets, ou encore de transfert dont ne sont pas averties les autorités compétentes.

Le 13 janvier 2010, un projet de loi a été examiné par le Conseil des ministres afin de ratifier cette ordonnance et il est devenu le décret n° 2010-577 du 31 mai 2010 relatif aux sanctions pénales en matière de transferts transfrontaliers de déchets, publié au Journal Officiel le 2 juin.

Après la définition des délits par l'ordonnance du 24 juillet 2009, ce sont maintenant les contraventions à la réglementation des transferts transfrontaliers de déchets qui sont définies. Le décret du 31 mai 2010 vient en effet préciser dans la partie réglementaire du Code de l'environnement les dispositions pénales applicables en la matière en créant les articles R. 541-83 à R. 541-85 du Code de l’environnement.
Plus précisément, le fait de procéder ou faire procéder à un transfert transfrontalier de déchets sans l'accompagner de certaines informations (ou lorsque ces informations sont incomplètes ou inexactes) est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 4e classe (750 euros ou 3 750 euros pour les personnes morales). Ces informations couvrent notamment les détails sur la personne qui organise le transfert, le destinataire, la quantité effective de déchets transférés, ou encore la date effective du transfert. A noter que les déchets radioactifs et quelques autres types de déchets, qui font l’objet de régimes de contrôles distincts, ne sont pas concernés.

Le décret punit d’une amende prévue pour les contraventions de la 5e classe (1 500 euros ou 7 500 euros pour les personnes morales) le fait :
- de procéder ou faire procéder à un transfert sans l'accompagner d'une copie du contrat conclu entre la personne organisant le transfert et le destinataire,
- de procéder à des modifications essentielles du transfert tenant à l'itinéraire, à l'acheminement ou au transporteur, sans en avoir informé les autorités compétentes,
- de ne pas indiquer dans la notification écrite préalable au transfert les opérations ultérieures non intermédiaires et la destination des déchets dans un autre Etat que le premier pays de destination.
En cas de récidive dans ces trois cas, le montant de l'amende peut atteindre 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale.


Les transferts de déchets sont de plus en plus contrôlés et récemment, la Cour de cassation (Cass. Crim. 18 mai 2010, pourvoi n°09-85538) a rejeté le pourvoi formé par le gérant d’une société à l’encontre de l’arrêt de la Cour d’appel de Nîmes du 26 juin 2009 qui l’avait condamné à trois mois d’emprisonnement avec sursis et 30 000 euros d’amende pour des faits d’exportation de déchets dangereux sans autorisation, en Roumanie.

Découverts en 2004 par l’inspection sanitaire roumaine, les déchets dangereux étaient stockés dans plusieurs centaines de fûts de 200 litres « en état de dégradation avancée ». Après enquête, les autorités françaises ont retrouvé le propriétaire de ces déchets et ont lancé une procédure à l'encontre de la société qui avait procédé au transfert transfrontalier illicite. Le gérant a été reconnu coupable par le tribunal correctionnel de Carpentras en décembre 2007. Cette décision a été confirmée en 2009 par la Cour d’Appel de Nîmes puis en 2010 par la Cour de cassation.

Les faits s’étant déroulés en 2004, cette affaire a été jugée au nom de la réglementation antérieure à la Directive 2008/98 sur les déchets et au Règlement 1013/2006 concernant les transferts de déchets. Depuis, les transferts transfrontaliers de déchets ainsi que les sanctions en cas de transfert illicite sont encore plus encadrés.