Nouvelles préoccupations de développement durable et compétitivité

La notion de développement durable ne se cantonne pas aux aspects environnementaux tel qu’on pourrait à première vue le penser. Ainsi, les aspects sociaux en sont une partie intégrante de la notion, souvent liés intimement à la dimension environnementale. Depuis peu, la notion de développement durable est de plus moteur du rapprochement du droit de l’environnement et du droit du travail en ce que l’entreprise doit de plus en plus en tenir compte dans un développement socialement responsable. Mais ce développement a un coût…

I- Aspects réglementaires en matière de produits chimiques et compétitivité

a) Caractéristiques d'une réglementation globale soucieuse d'améliorations durables

La tendance réglementaire se meut en faveur d’une meilleure prise en compte de la protection des travailleurs en parallèle avec un principe de prévention des impacts environnementaux. L’imbrication des enjeux environnementaux et sociaux se révèle dans de nombreux domaines, dont celui du risque chimique dont la prévention se situe aussi bien dans le code du travail que dans le code de l’environnement.
En effet, en matière de droit de l’environnement la réglementation a pour objet d’avertir l’utilisateur des risques de l’utilisation des produits chimiques sur l’écosystème. Mais en parallèle il est logique que ce qui s’avère néfaste pour l’environnement l’est aussi pour l’homme. Dès lors, la législation française et européenne opèrent de manière cohérente une gestion des produits chimiques tant d’un point de vu risques environnementaux que risques pour la santé des hommes et spécifiquement des travailleurs. D’ailleurs, les interactions entre travail et environnement ne feront que croître dans de nouvelles préoccupations sanitaires et environnementales européennes et françaises qui lient intrinsèquement les deux notions. Cette tendance apparaît clairement en matière d’installations classées pour la protection de l’environnement où l’administration et la jurisprudence de la chambre sociale de la Cours de cassation affirment une nécessaire gestion mixte du risque (Circulaire DRT n° 2006-10, 14 avril 2006, BO emploi, n°5/2006 ; Cass.soc., 5 mars 2008, n° 06-45.888).

b) L'impulsion réglementaire européenne vers une restriction du marché des produits chimiques dangereux

Récemment on a pu observer de manière plus précise que le droit communautaire impulse une gestion confondue des risques environnementaux et des risques pour la santé ou la sécurité du travailleur, notamment au travers du règlement REACH 1907/2006 CE relatifs aux produits chimiques et du règlement CLP relatif à leur étiquetage. En matière de produits chimiques cette réglementation européenne révèle une action tournée selon trois principes que sont la protection de la santé humaine, la préservation de l’environnement et une démarche d’harmonisation des règles de mise sur le marché des produits chimiques.
Plus précisément le règlement REACH concernant l'enregistrement, l'évaluation, l'autorisation et les restrictions des substances chimiques entré en vigueur le 1er juin 2007 vise la promotion de méthodes d'essai alternatives, la libre circulation des substances au sein du marché intérieur et de renforcer la compétitivité et l'innovation.
REACH fait porter à l'industrie la responsabilité d'évaluer et de gérer les risques posés par les produits chimiques et de fournir des informations de sécurité adéquates à leurs utilisateurs. Mais REACH ne sera pas sans impact sur la compétitivité mondiale de nos entreprises. La procédure d’autorisation du règlement 1907/2006 CE en est un parfait exemple. Ce système qui interdira à terme l’utilisation de substances définies pousse d’ors et déjà les industriels à rechercher des solutions alternatives, qui certes poussent à l’innovation mais ont un coût dont le résultat n’est pas assuré. Le coût de la procédure en elle-même sera probablement dissuasif car tel est l’objectif du texte, face à des substances dont aucun substitut n’est pourtant encore trouvé. Déjà, il s’agit inexorablement pour certaines entreprises d’anticiper la réglementation en matière de produits chimiques qui se meut vers des interdictions et des restrictions accrues des substances dangereuses, poussant vers la disparition de ces substances du marché européen.

II- Aspects normatifs et compétitivité

Ensuite, au-delà de toute règle contraignante, on peut voir de plus en plus d’entreprises s’engager volontairement dans des « process » de développement durable vers l’idée connue d’entreprise socialement responsable. Cette notion implique une prise en compte des notions classiques de rentabilité, et de croissantes mais de manière compatible avec des impacts environnementaux et sociaux. Ces démarches « éthiques » ont conduit à parler de nouveau « self-service normatif » ( A. Supoit, Du nouveau self-service normatif : la responsabilité sociale des entreprises, in Etudes offertes à J.Pélissier, Dalloz, 2004 ; F.-G. Trébulle, Rép. Sociétés, Dalloz, V, Responsabilité sociale des entreprises, 2003) .
De nouveaux standards internationaux sont devenus des références sans pour autant avoir un caractère obligatoire. Ces standards proviennent de diverses instances telles que l’ONU (Pour exemple, Global Reporting Initiative, Global Compat), l’Organisation International du Travail (Déclaration de principes tripartites sur les entreprises multinationales et la politiques sociales, l’OCDE ou l’Union européenne Livre vert, Promouvoir un cadre européen pour la RSE, Doc. comm. CE, n° 366).
Ainsi, les référentiels ISO ou encore OHSAS qui procurent des règles communes établies par consensus par une instance reconnue, sont dans certains secteurs le gage d’un respect de réglementation et apporte le crédit d’une gestion optimale. Ces référentiels constituent probablement la future base indispensable de toute entreprise. Mais cela a un coût, sûrement abordable pour des entreprises ou groupes de grande taille, mais difficilement atteignable pour d’autres petites et moyennes structures.
Pourtant, cette mouvance pourrait, si elle n’est l’est déjà pas dans certains secteurs, devenir un élément fondamental des relations contractuelles entre entreprises ce qui lui donnerait l’effectivité juridique dont elle manque.