Le présent article vise à mieux appréhender un type d'accident du travail qui touche le monde agricole. Il concerne un élément matériel utilisé communément par les salariés et les chefs d'exploitation agricole. En effet chaque année il est recensé un certain nombre d'accidents mortels ayant trait à l'emploi de matériels à moteur de type tracteur. Les renversements de tracteurs sont responsables aujourd'hui encore de 20 à 30 morts par an (contre 150 il y a trente ans). Le monde agricole de par sa polyvalence, la multitude de facteurs de danger comme l'emploi de produits phytosanitaires mais surtout l'implication de structures communautaires comme les syndicats, de mutuelles comme la MSA, est sensible aux risques professionnels.

Aussi face à cela il convient de voir dans un premier temps le droit applicable et dans un second temps les mesures pratiques mises en oeuvre afin de remédier aux dangers mortels résultant de l'emploi de tracteurs.

1- Le droit applicable en matière de prévention de risques professionnels:

le législateur impose d'équiper d'une structure antirenversement les tracteurs en service sur une exploitation selon les dispositions de l'article L.752.2-9-1 du code rural).
Cette disposition a pris effet le 31 décembre 2009.

Il ressort de l’analyse des circonstances de renversements que les accidents sont souvent liés au non respect de diverses dispositions.
Ainsi cela vise l'information et la formation pour une conduite en sécurité que l'on retrouve aux articles L.4141-1à -4 et R.4141-1à -20, R.4323-1à-5, R.4323-55 du Code du travail) notamment l'adaptation des manoeuvres à la nature du terrain, aux conditions atmosphériques ( si le travail est effectué sur un terrain en pente avec des discontinuités d'inclinaison, sur une zone enherbée humide …); la connaissance de l’environnement dans lequel le tracteur évolue (appréciationcde la pente et du dévers, présence d'un talus, d'un fossé); la circulation avec des équipements portés de façon à optimiser la stabilité de l'ensemble. En outre cela vise également l'aménagement sûr des voies de circulation d'après l'article R 4323-50 du code du travail, notamment à la sortie des parcelles ou en bout de rang.
Est à apprécier le choix d'un équipement approprié au travail à effectuer ou convenablement adapté vu les articles R.4321-1 et -2 du Code du travail, comme utiliser une débroussailleuse à conducteur marchant pour tondre les bords d’un parterre en surplomb ou pour débroussailler autour des arbres ;ne pas transporter de personne dans le poste de conduite si le tracteur n'est pas conçu à cette fin.
Il convient en outre d'agir en amont sur les défaillances techniques par le maintien en état de conformité ainsi que le souligne l'article-R.4322-1 du Code du travail et un entretien préventif du système de freinage du tracteur, de la remorque ou de la machine attelée, de la boite de vitesses, la vérification de l'usure des pneumatiques. Les articles R.4324-8 et R. 4324-9 du Code du travail visent l’identification correcte des commandes au poste de conduite du tracteur, notamment celles agissant sur les machines attelées. On remarquera qu'il est essentiel d'assurer l'équipement du tracteur par un dispositif de protection en cas de renversement.
Les dispositions réglementaires relatives aux tracteurs agricoles mis sur le marché à l'état neuf ont imposé progressivement depuis 1976 que tous les tracteurs neufs des catégories T1 ( tracteurs à roues, standards) et T2 (tracteurs à roue à voie étroite) soient munis d'un dispositif de protection en cas de renversement


Depuis le 1er janvier 2002, les tracteurs mis sur le marché d'occasion doivent également être équipés d’une structure de protection contre le renversement.
Pour les tracteurs les plus anciens non soumis à ces obligations lors de leur mise sur le marché, le décret n°98-1084 du 2 décembre 1988 a inséré dans le code du travail un ensemble de prescriptions techniques applicables aux équipements de travail mobiles en service. L’article R.4324-31 requiert la présence d’une structure de protection dès lors qu’il existe un risque de renversement (ce qui est toujours le cas pour les tracteurs agricoles ou forestiers) et que l'équipement de travail dispose de points d’ancrage permettant de recevoir une structure de protection. A ce jour, aucune impossibilité technique de mise en place d’une telle structure n’a pu être mise en évidence pour les tracteurs à roues, standards ou à voie étroite. Cette disposition est d'application obligatoire depuis le 5 décembre 2002 quand le tracteur est utilisé par des travailleurs au sens du code du travail (salariés, stagiaires, membres de la famille)…
L’article L.752-29-1 du code rural indique qu'avant le 1er janvier 2010, une structure de sécurité anti-retournement doit équiper tous les tracteurs en service sur une exploitation, que celle-ci utilise ou non des salariés.
L’arrêté du 3 mars 2006 présente sous forme d’un cahier des charges techniques, les prescriptions applicables pour l’équipement des tracteurs du parc ancien, standards et à voie étroite, par un dispositif de protection en cas de renversement.
A ce titre, les dispositifs de protection appropriés sont ceux conçus, construits et installés selon les modalités qui se référent à une décision d’homologation d’un dispositif de protection contre le renversement, ou à une décision d’homologation d’un type de tracteur, délivrée au titre des réglementations antérieures au décret n°2005-1236 du 30 septembre 2005, ou dans une décision de réception CE ; ou à défaut, qui appliquent un des référentiels suivant : directives communautaires ou codes de l’OCDE ; ou à défaut, qui appliquent un des logiciels de dimensionnement des arceaux arrière de protection pour tracteurs du parc ancien élaboré par le CEMAGREF, voire un logiciel de dimensionnement des cadres de protection à 4 montants pour tracteurs du parc ancien élaboré par l’université publique de Navarre.

Une étude de faisabilité technique, juridique et économique de la mise en oeuvre de ces logiciels a été menée en 2006 et 2007 par la caisse de la mutualité sociale agricole de Tarn-Aveyron en collaboration avec le lycée agricole de Carmaux et le Cemagref. Les conclusions sont qu'il est toujours techniquement possible d’équiper les tracteurs anciens en service par une structure de protection sûre, que ce dispositif soit disponible sur le marché ou qu’il soit fabriqué et installé à partir d’un logiciel en suivant scrupuleusement les instructions associées.
Le plus souvent cet équipement peut être conçu et installé pour un coût raisonnable qui dépend du nombre d’intervenants : agriculteur seul s’il en a la capacité ou intervention d’un fabricant de structures de protection ou de tracteurs, d’un concessionnaire, d’un marchand réparateur, d’un artisan …

A présent il convient de voir le cas particulier des arceaux rabattables :
Un type particulier de dispositifs de protection en cas de renversement nécessite des précautions particulières de mise en oeuvre: il s’agit des arceaux à deux montants, avant ou arrière, qui ont la faculté d’être rabattables ou pliables.
La présence d’un tel arceau répond aux besoins de certains utilisateurs, notamment pour accéder à des bâtiments bas comme les tunnels utilisés par les maraichers ou bien pour travailler sous des branches
basses dans le cadre de l'arboriculture. Malgré tout l'utilisation d'un tracteur équipé d'une telle structure de protection pose quelques problèmes.
Ainsi le renversement du tracteur alors que l’arceau est rabattu et ne remplit pas sa fonction de protection. En outre on peut observer unedéfaillance ou mauvaise utilisation du système de verrouillage, voire de
blessures lors de la manipulation de l’arceau.
Une enquête menée en 2004 par les services de la mutualité sociale agricole a montré qu'une proportion importante d'utilisateurs a tendance à ne pas remettre en place l’arceau, en raison de la pénibilité de cette opération ou par négligence.
Deux réponses sont apportées à ce constat. Toute d'abord l'article 21 du décret n°2005-1236 du 30 septembre 2005 a rappelé que « dans le cas où la structure de protection en cas de renversement ou de cabrage est constituée d’un arceau rabattable, l’abaissement du dispositif de protection doit être utilisé uniquement pour les opérations le nécessitant et des mesures doivent alors être prises pour prévenir le risque de renversement ou de cabrage du tracteur, telles que la limitation de son utilisation, de sa vitesse ou l’aménagement des zones de circulation et de travail.»


2- Les mesures pratiques mises en oeuvre afin de remédier aux dangers mortels résultant de l'emploi de tracteurs:


La Caisse centrale de Mutualité sociale agricole (CCMSA) lance régukièrement des campagnes de prévention, visant à alerter sur la nécessité de mettre en pratique une conduite sûre des tracteurs agricoles et forestiers et de disposer des équipements appropriés.
Cela suppose d’équiper tous les tracteurs d’une structure de protection qui peut sauver la vie du travailleur en cas d’accident. L'efficacité dépend du bouclage de la ceinture de sécurité afin d'éviter d’être éjecté en dehors de la zone de survie.
1.Les structures de protection ne remplissent leur rôle protecteur que si le conducteur reste à l'intérieur de la zone de survie définie autour de son siège.
2.Une protection optimale en cas de renversement du tracteur est donc assurée par la combinaison d'un dispositif de protection en cas de renversement et d'un dispositif de maintien au poste de conduite. C'est cette combinaison qui permettra de s'assurer que les tracteurs mis à disposition des travailleurs sont « convenablement adaptés au travail à réaliser en vue de préserver leur sécurité » en cas de renversement au regard de l'article R. 4321-1 du code du travail.
3.Le fait d’équiper le tracteur d’une ceinture ventrale sur les points d’ancrage prévus à cet effet permet de satisfaire à cette exigence.
Les structures de protection sont conçues pour résister aux chocs et crasements au cours d'un renversement ou d'un cabrage du tracteur et permettent de réserver autour du conducteur une zone de survie. Malgré tout les accidents mortels ont lieu, même en présence d'une structure de protection, si le conducteur est éjecté du poste de conduite (en cas d'absence de cabine fermée ou par le toit ouvrant …) et se retrouve coincé ou écrasé par le tracteur, ou s'il heurte violemment des éléments du poste de conduite au cours du renversement.

Certains tracteurs sont équipés d’un arceau de sécurité rabattable. L'agriculteur doit rabattre celui-ci- uniquement lorsque cela est nécessaire pour le travail.
En cas de renversement, il doit se cramponner et ne pas tenter de sauter.
En outre il convient de ne percez pas les structures de protection et de ne pas les souder.
Autres mesures préventives que l'agriculteur doit appliquer, celle de la charge des remorques lesquelles de doivent pas être excessivement chargées. Il convient pour ce faire de respecter les PTAC (Poids Total Autorisé en Charge).
Le tracteur doit être lesté de manière optimale.
L'agriculteur devra préférer un tracteur 4 roues motrices pour les travaux en pente, coupler les pédales de frein.
Il devra, en outre, écarter les roues arrières pour avoir la voie maximale et adapter son matériel, ralentir avant de tourner, eviter les virages courts et soudains.
En descente, il choisira un faible rapport de vitesse avant d' engager et utiliser le frein moteur et ne pas débrayer. Au champ, il travaillera avec le chargeur en position basse.
Lors de travaux avec des outils déportés (ex : faucheuse, rogneuse), il conservera toujours les équipements côté amont. Il pensera à débloquer le différentiel lorsqu'il sera sur la route et pour virer en fourrière. Il réservera un espace suffisant pour les manoeuvres en bout de champ, notamment lorsque le sol y est accidenté.
Il évitera de s'approcher à proximité des fossés ou des rivières et là où les talus peuvent s’effondrer sous le poids du tracteur mais aussi de s'aventurer sur des pentes trop raides ou trop glissantes (prairies humides).

source: note de service DGER du 2 février 2010