Plan "algues vertes": l'Etat face encore à ses choix.
Par JIMMY HUSSON
Posté le: 14/05/2010 11:55
Plan de lutte contre les algues vertes
Le phénomène de prolifération d’algues vertes est devenu une nuisance préoccupante, notamment en Bretagne, depuis la fin des années 1970.
Sur le littoral breton, les volumes ramassés varient d’année en année, suivant que les conditions climatiques
sont plus ou moins favorables au développement des algues. Certaines années les volumes ramassés atteignent les 70 000 mètres cubes. Ce phénomène s’est manifesté de manière spécialement prononcée à l’été 2009, notamment dans les Côtes d’Armor, à la suite du décès d’un cheval et du malaise de son cavalier à proximité de la plage de Saint-Michel-en-Grève, près de Lannion.
Les proliférations d'algues vertes se développent dans 8 baies, à l'aval de 23 bassins versants (SDAGE Loire Bretagne).
Cela concerne 8 baies 3500 exploitations agricoles et 120 000 ha de SAU. 240 000 habitants. Les communes les plus touchées sont celles de Saint Michel en Grève (Grève de Saint Michel – Baie de Lannion) et d’Hillion (Baie de St Brieuc), qui cumulent un total de près de 35 000 m3 d’algues échouées en 2009. (carte des BV algues vertes issue du SDAGE Loire Bretagne).
Les bassins versants associés à ces deux baies comportent environ 1800 exploitations agricoles et couvrent
65 000 ha de SAU.
La prolifération et l’accumulation des algues vertes sont dues à la conjonction de trois facteurs. Tout d'abord la présence de macro-élements (azote et phosphore) en quantité suffisante, la température de l’eau et éclairement suffisants, les baies sableuses peu profondes étant des sites particulièrement favorables aux marées vertes, la géographie propice au confinement de la biomasse formée et des nutriments comme les baies fermées ou à confinement dynamique par la marée sont donc potentiellement touchées comme la Baie de Saint Brieuc ou celle de Saint-Michel en Grève.
Aujourd’hui, l'azote apparaît comme le facteur limitant à privilégier pour lutter contre ces proliférations.
Toutes les sources de nitrates, urbaines et rurales, doivent donc contribuer à la maîtrise des flux azotés. Les sources agricoles sont largement dominantes.
La réduction des proliférations algales suppose d'atteindre des taux de nitrates compris entre 10 et 25 mg/l
dans les cours d'eau, taux qui sont très inférieurs à la concentration maximale admise par la réglementation pour les eaux destinées à la consommation humaine (50 mg/l).
Le SDAGE Loire Bretagne fixe des objectifs de réduction de 30% au moins des flux de nitrates à l’horizon
2015 dans les 8 baies prioritaires et demande que chaque commission locale de l'eau des SAGE des bassins versants côtiers touchés par les algues vertes établissent un programme de réduction des flux de nitrates avec des objectifs chiffrés et datés. Le Grenelle de la mer fixe en son engagement 66c un objectif de réduction de 40% des flux de nutriments à l’horizon 2012-2014
Bien que la mise en équation du phénomène de proliférations algales reste difficile et que les connaissances
sont encore insuffisantes pour bien cerner l'ampleur des actions à mener, les pouvoirs publics souhaitent oeuvrer vers une réduction des flux de nitrates.
Une étude conduite à l’été 2009 par l’INERIS, à la demande de la Secrétaire d’Etat chargée de l’Ecologie,
sur la plage de Saint-Michel en Grève, a confirmé le fait que les amas d’algues en décomposition émettent des gaz toxiques à forte concentration, notamment de l’hydrogène sulfuré.
Dans certaines situations les émissions de certains amas peuvent amener à une concentration locale
pouvant présenter un risque sanitaire, en cas d’exposition pendant une durée suffisamment longue.
Le plan du Gouvernement concerne les 8 baies « algues vertes » identifiées dans le SDAGE du bassin Loire- Bretagne. Il comprend 3 volets :
· Un volet portant sur l’amélioration des connaissances et la gestion des risques
· Un volet relatif aux actions curatives : amélioration du ramassage et développement des capacités de traitement des algues échouées
· Un volet préventif comprenant les actions à mettre en oeuvre pour limiter les flux d’azote vers les côtes. Ce volet comprend l’amélioration des techniques de traitement des effluents et eaux usées générées par les activités industrielles ou agricoles ainsi que les collectivités locales, l’aménagement du territoire et le changement des pratiques agricoles.
Ce plan sera mis en oeuvre grâce à un accompagnement financier important de la part de l’Etat, [des collectivités territoriales], de l’agence de l’eau Loire Bretagne et de l’ADEME. Il s’appuie sur un engagement
contractuel, encadré, de tous les acteurs concernés, notamment au travers de divers appels à projets et comprend également un renforcement des actions de contrôles.
Le plan poursuit des objectifs suivants deux périodes. Dès 2010 – 2011 il s 'agira d'assurer une gestion irréprochable des algues vertes en améliorant le ramassage des algues vertes et leur évacuation vers des plateformes de compostage , en renforçant la sécurité sanitaire des personnes et la salubrité du littoral
Engager des actions pour réduire les flux de nitrates, en s’assurant de la bonne conformité des installations d’assainissement collectives et individuelles, en mettant en place dans toutes les baies algues vertes un socle commun de mesures à destination des exploitants agricoles pour mieux appliquer la réglementation sur les nitrates existante, en engageant sur les deux baies pilotes de Saint Brieuc et de Lannion des actions préventives adaptées aux spécificités locales, actions vers les agriculteurs, les collectivités, les industriels et les particuliers, puis en les généralisant ensuite aux six autres baies.
A échéance de 2015, il s'agira d'obtenir une réduction des flux de nitrates de 30 à 40% au moins dans ces huit baies comme prévu au titre du SDAGE et dans les conclusions du Grenelle de la mer.
La réduction des flux de nitrates sera obtenue par la combinaison d'un meilleur contrôle de la réglementation, de l'extension des zones naturelles (objectif indicatif de 20% sur la baie pilote de Saint-Brieuc), du développement de la méthanisation et de l'évolution des systèmes de production vers des systèmes à très faibles fuites de nitrates.
Toute augmentation des apports au sol d'azote organique et minéral doit être évitée dans les bassins
versants concernés par les algues vertes. L'application de la réglementation actuelle (ZES, ZAC et ICPE ) permet d'y répondre dans la quasi totalité de ces bassins versants. Toutefois, il apparaît que quelques secteurs de ces bassins versants ne sont pas concernés par ces réglementations.
Le plafond d'apports d'azote appliqué dans les ZAC (210 kg N organique et minéral /ha SAU) sera étendu
aux parties de bassins versants algues vertes qui ne sont pas classées en ZAC. Cette mesure sera inscrite dans la révision du 4ème programme d'action nitrates appliquée aux bassins versants « algues vertes ».
Par circulaire, il sera demandé aux préfets de département de veiller au principe de non-dégradation
de la pression organique à l’hectare dans le cadre des demandes d’autorisation des dossiers ICPE dans
l’ensemble des baies à algues vertes.
A la lecture de ce plan il ressort deux points essentiels. Tout d'abord qu'il est mis en avant une politique de prévention basée sur la recherche scientifique et portant sur les acteurs majeurs à savoir les agriculteurs puis une action de nettoyage portant sur des débouchés comme la méthanisation.
1- Une politique de prévention basée sur le savoir scientifique et des actions de limitation des risques
Ainsi il sera mené des actions d'amélioration des connaissances et de prévention des risques grâce à une amélioration des connaissances par la création d'un groupement de recherche (GDR).
Même si des expérimentations et recherches ont déjà été menées à travers le monde sur des phénomènes similaires, il apparaît que la communauté scientifique est moins bien organisée et développée sur ce phénomène qui fait appel à de nombreuses disciplines. Afin de fédérer les différentes équipes de recherches concernées, il est proposé de constituer un groupement de recherche (GDR) ou équivalent, de dimension nationale, ayant vocation à approfondir les connaissances concernant les facteurs de croissance et de prolifération des algues vertes,
· les relations entre les bassins versants et les écosystèmes côtiers dépendant,· les nouvelles technologies de récolte,· les formes de valorisation envisageables de la biomasse algale
Ce GDR serait financé par l’Agence de l’eau Loire-Bretagne (50% à raison de 200 000 € ).
Il sera constitué notamment de l’IFREMER, l’INRA, le CEMAGREF, le CNRS et le BRGM. De dimension nationale, il sera, toutefois, géré sous une gouvernance déconcentrée et il sera construit en relation avec les organismes locaux (CEVA) et les initiatives locales (projet de Centre de ressources et d’expertise sur l’eau en Bretagne).
Autre point, assurer la sécurité sanitaire des personnes et la salubrité du littoral
Le rapport des inspections a souligné que les seuils des effets létaux ou irréversibles de l’hydrogène sulfuré élaborés par l’INERIS se situaient dans le cadre de scénarios d’accidents ou de situations extrêmes, mais qu’il existait un manque en matière de recommandations pour les riverains ou le public qui fréquente les plages concernées par l’échouage des algues vertes.
De même, si des seuils limites ont été définis pour les locaux professionnels et si des textes réglementaires existent pour la protection du risque lié à l’hydrogène sulfuré en milieu professionnel, les prescriptions existantes méritent d’être déclinées pour les travailleurs en fonction des conditions particulières de la collecte et du traitement des algues vertes.
De fait le Gouvernement a demandé à l’AFSSET, en lien avec l’INERIS d’établir des recommandations nationales de prévention à destination du public et des riverains, en fonction des seuils de toxicité éventuels et des nuisances notamment olfactives,de formuler des recommandations spécifiques pour les travailleurs exposés lors de la collecte et du traitement des algues vertes. Dans l'immédiat les préfets des départements concernés adresseront aux maires des points de situation, ainsi que des recommandations d’actions, notamment en matière d’accès aux plages et d’information du public. Des actions de communication seront mis en oeuvre afin de délivrer les informations au public (mairies, offices de tourisme, associations, médias locaux…). La Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de
l’emploi pilotera la réalisation d’un guide « bonnes pratiques pour la prévention et la protection des
personnels participant à la collecte et au traitement des algues vertes », sur la base des mesures
déjà pratiquées dans d’autres installations industrielles et des recommandations de l’AFSSET dès
qu’elles seront disponibles.
Avant l’été, les préfets de département mettront en place dans chaque département une cellule de crise, notamment chargée de définir la communication à mettre en place à l’amont d’une éventuelle crise.
En outre le plan d’action vise au maintien de l’activité agricole en Bretagne et dans les zones concernées par le phénomène des algues vertes. D'importants efforts ont déjà été entrepris comme les ICCE. L'agriculture ne peut ignorer sa part de responsabilité historique dans l’état de la ressource, ainsi que les nombreux contentieux et conflits d’usage liés à la qualité de l’eau en Bretagne ou aux nuisances induites par les activités d'élevage. La recrudescence de ces contentieux et la nécessité de mettre fin aux conflits d’usage rendent urgente la mise en oeuvre de mesures novatrices d’adaptation de l’agriculture, de contrôle d'objectifs de résultat et d'évaluation des effets sur le milieu. Ces mesures sont la condition de la pérennité de l’activité agricole dans les zones les plus sensibles du point de vue de l’environnement.
Parallèlement l'Etat veillera au bon fonctionnement des stations d'épuration tant des eaux usées domestiques qu’industrielles. Il s'assurera aussi de la mise en conformité des installations d'assainissement non collectif présentant un dysfonctionnement générant un risque sanitaire ou environnemental.
De fait il s'agit de donner à l’agriculture les moyens d’un développement durable à travers un engagement de la reconquête des zones naturelles (zones humides, prairies extensives, ripisylves, zones boisées humides, haies et bandes végétalisées le long des cours d'eau), avec le maintien et la réhabilitation d’une part significative des surfaces des baies et bassins versants concernés . Dans la baie de Saint-Brieuc cette part est fixée à 20%.
La réduction des flux de nitrates vers la mer suppose de disposer de surfaces suffisantes sur le bassin versant ayant un rôle de dénitrification et contribuant aussi à diluer les flux provenant des parcelles agricoles.
L'objectif de 20% des surfaces s'applique pour la baie pilote de Saint-Brieuc conformément aux orientations fixées par la Commission locale de l’eau dans le cadre des travaux préparatoires au SAGE. Ce pourcentage de zones potentielles est à préciser pour les autres baies en fonction des diagnostics territoriaux et des inventaires des zones naturelles qui seront réalisés en 2010. L’agence de l’eau Loire Bretagne sera chargée de définir le cahier des charges relatif au diagnostic territorial et à l’inventaire des zones naturelles. Elle mettra également à disposition des porteurs de projets tous les éléments en sa possession.
Début 2011, l’objectif de maintien et de réhabilitation de zones naturelles sera fixé pour chaque baie et ses bassins versants.
Cet objectif doit être atteint pour permettre un retour au bon état des eaux littorales à échéance de 2027. La moitié de l'effort doit être réalisée à échéance de 2015.
Ces surfaces seront prioritairement des zones humides qu'il convient de préserver, de réhabiliter ou de créer ; mais elles pourront aussi être constituées de prairies extensives, de surfaces boisées, de haies, de bandes végétalisées le long des cours d'eau. Cette action se concrétisera par une politique de gestion du parcellaire, d'acquisition foncière et de gestion extensive des parcelles concernées définies au sein des projets territoriaux sur la base d'objectifs quantitatifs fixés dans le cahier des charges des appels à projets. Cette mesure nécessitera un délai de mise en oeuvre de plusieurs années mais elle a l'avantage d'être pérenne. Elle doit toutefois pouvoir être engagée dès 2010 notamment sur les deux baies pilotes.
L'agriculture doit évoluer vers des systèmes de production à très basses fuites d'azote, en fonction des enjeux locaux de réduction des flux d'azote, dans le cadre de projets territoriaux.
Le comité de pilotage du plan algues vertes auquel seront associées les collectivités locales représentatives des bassins versants et des SAGE et de leur CLE ainsi que les Conseils Généraux concernés, lancera dès 2010 un appel à projets territoriaux pour définir les évolutions des systèmes de production vers des systèmes adaptés aux enjeux locaux de réduction des flux de nitrates. Les acteurs socio-économiques seront sollicités pour proposer un plan d'action dont les mesures seront fonction des particularités de chaque territoire. La maîtrise d'ouvrage de ces plans d'action sera confiée à des porteurs de projets pouvant être notamment des collectivités locales.
Le plan d'action territorial devra répondre à un cahier des charges fixant les objectifs de résultats à atteindre notamment en termes de réductions chiffrées et datées des flux de nitrates et de maintien, de réhabilitation et de création de zones naturelles. Il s'appuiera sur un diagnostic approfondi de chaque territoire partagé par l'ensemble des acteurs. Il proposera les moyens à mettre en oeuvre envisagés pour atteindre ces objectifs et les indicateurs de suivi du plan d'action. Le cahier des charges sera défini par le comité de pilotage régional, les objectifs territoriaux seront fixés par le comité, ils viendront compléter l’objectif de reconquête des zones naturelles.
Le comité de pilotage du plan algues vertes sera donc chargé de la définition du cahier des charges, de la validation des plans d'action territoriaux et de leur coordination. Les comités de pilotage locaux seront consultés pour la définition et la validation des projets, ils seront chargés de leur suivi. Après évaluation et concertation, les plans d'action territoriaux devront être validés au plus tard début 2011 dans les deux baies pilotes et en 2012 pour les autres baies.
Les projets territoriaux et les opérations de reconquête des zones naturelles mentionnées au 4. 1. feront l’objet de soutiens financiers par voie de contractualisations. Seront mobilisées les mesures du PDRH et des mesures de rachat de foncier.
Le basculement vers des mesures obligatoires en cas d’absence de plan territorial ou en cas de non atteinte des objectifs sera rendu possible par le dispositif des Zones Soumises à Contrainte Environnementale (ZSCE). Une évolution législative permettant le recours à ce dispositif est en cours dans le cadre du projet de loi portant engagement national pour l’environnement. Le Préfet fixera par arrêté les contenus des programmes d’action issus des projets territoriaux ainsi que les moyens à mettre en oeuvre par le biais du dispositif des Zones Soumises à Contrainte Environnementale (ZSCE).
En cas d'adhésion trop faible des agriculteurs aux mesures du plan d’action et si les objectifs ne sont pas atteints au bout de 3 ans, l'Etat pourra imposer des mesures obligatoires.
Les objectifs territoriaux seront communiqués à toutes les commissions administratives décisionnaires (CODERST, CDOA…) pour prise en compte.
Il convient de noter que le Gouvernement envisage une amélioration du respect des réglementations par des contrôles renforcés et plus efficaces et la mise en place d'une déclaration annuelle des quantités d'azote utilisées et échangées (azote organique et azote minéral) pour calculer la pression d'azote et connaître les quantités échangées.
Cette déclaration doit permettre d'identifier tous les flux d'azote utilisé ou échangé sur le bassin versant algues vertes. Elle tous tous les agriculteurs ayant des parcelles dans le bassin mais aussi des agriculteurs extérieurs au bassin recevant des effluents produits dans le bassin ou épandant chez des agriculteurs dont les terres sont dans le bassin. Elle concerne également tous les producteurs et épandeurs non agricoles de matière azotée. Cette déclaration est annuelle. Elle comporte des informations relatives aux surfaces (SAU et surface épandable), aux effectifs animaux (pour calculer la production d'azote organique), les quantités d'azote échangées avec l'identification du donneur et du receveur, les quantités d'azote minéral utilisées.
Cette déclaration s'appuiera dans un premier temps sur les normes réglementaires actuelles qui cependant, font l’objet d’une expertise, à la demande de la Commission européenne. Cette demande concerne l'ensemble des zones vulnérables et sera traitée dans un cadre national.
Mise en place dès 2010 sur les 2 baies pilotes, la déclaration sera étendue à l'ensemble des bassins
versants algues vertes en 2011. Un système de télédéclaration sera mis en place,
En outre il sera rendu obligatoire la réalisation de reliquats dans toutes les exploitations et la transmission des données aux services de police. Des mesures de reliquats après récolte sont réalisées dans toutes les exploitations (3 à 4 parcelles par exploitation) et les données individuelles relatives aux reliquats les plus élevés seront transmises aux services de police. Les résultats des mesures de reliquats peuvent être utilisés par les services de police de l’eau et au coordinateur régional des installations classées pour orienter les contrôles.
La maîtrise d'ouvrage sera assurée par la structure de bassin versant (syndicat mixte, communauté de communes, etc.) ou à défaut par l'Etat.
Ces mesures de reliquats s’accompagnent de la mise en place d'un réseau de parcelles de référence qui permettront d'établir annuellement l'échelle des valeurs de reliquat (bon, à surveiller, excessif) selon les cultures et les situations pédo-climatiques.
Les mesures de reliquats dans les exploitations durant l'année sur les deux baies pilote puis étendu à l’ensemble des baies « algues vertes » dans un délai maximal de 3 ans. Le réseau des parcelles de référence devra être mis en place sur l’ensemble des baies « algues vertes » dès 2010.
De fait il s'agit de renforcer le contrôle de l'équilibre de la fertilisation à la parcelle et du respect des calendriers d'épandage (contrôle terrain en période d'interdiction) après modification des programmes d'action nitrates. Le calcul de la dose prévisionnelle d'azote à apporter aux cultures dans le respect de l'équilibre de la fertilisation doit s'effectuer pour chaque parcelle par la méthode du bilan de masse. Chaque terme de l'équation du bilan de masse doit être renseigné par des références techniques adaptées au territoire prenant en compte les différentes sources d’azote. Ces éléments méthodologiques notamment les modalités de prise en compte des rendements objectifs et des fournitures du sol seront inscrits dans les programmes d'action au titre de la directive nitrates.
Certaines pratiques agricoles seront amenées à évoluer comme les dates d'interdiction d'épandage des effluents d'élevage et de l'azote minéral prolongées en fin d'hiver et en début de printemps, retournement des prairies et les dates d'implantation de la culture suivante, couverture des sols sous maïs grain. Les préfets de chaque département concerné par les baies algues vertes engageront un processus d’évolution des 4ème programmes d’action nitrates sur ces bassins versants qui devra aboutir au plus tard mi 2011. Cette modification des programmes d'action ne préjuge pas des évolutions ultérieures du programme d'action appliqué à toutes les zones vulnérables suite à la mise en demeure de la Commission Européenne pour défaut d’application de la directive « Nitrates ». Un travail sera engagé sur ce point au niveau national, et devra aboutir pour la mi-2011.
Des contrôles renforcés de ces deux points (calcul et cohérence du plan prévisionnel de fumure et respect des périodes d'interdiction d'épandage sur la base des contrôles terrains) seront mis en place dès 2010 sur les 2 baies pilotes et à partir de 2011 pour l'ensemble des bassins versants concernés par les algues vertes.
1101 exploitations relèvent du régime des installations classées (que ce soit au titre de l’autorisation ou de la déclaration) dans les bassins algues vertes des Côtes d’Armor et 657 dans les bassins algues vertes du Finistère. Ces exploitations feront toutes l’objet d’un contrôle d’ici deux ans. Les effectifs des équipes de contrôles seront renforcés dans ce but.
Le préfet de région veillera à la coordination des contrôles ICPE et à leur application homogène sur le territoire breton. Il confiera cette mission à la DREAL, qui définira l’organisation nécessaire pour créer une cellule dédiée aux contrôles. Le préfet de région adressera au procureur général près la cour d’appel de Rennes une note sur la politique pénale à conduire.
L'Etat modifiera les textes de la conditionnalité à partir de 2011 en ajoutant la déclaration des quantités d'azote comme item supplémentaire au titre de la conditionnalité avec une sanction de 1% (pour absence de déclaration).
Les exploitations qui ne sont pas aux normes ou ne pourront faire face au renforcement des exigences environnementales seront dans un premier temps identifiées.
Des solutions d’accompagnement leur seront proposées, au cas par cas, afin soit de réaliser les adaptations nécessaires au respect de la réglementation environnementale, soit de réorienter leur activité, soit d'envisager une reconversion. Un dispositif d'accompagnement financier sera défini sur la base des dispositifs d'ores et déjà existants et des expériences acquises dans les bassins versants en contentieux (aides à la réduction des cheptels, aides à la reconversion, ...).
2- Une politique de traitement en aval par une amélioration du ramassage et développement des capacités de traitement des algues échouées
De manière à éviter les risques de fermentation et d’émissions de gaz toxiques, le ramassage des algues vertes sera intensifié et l’épandage des algues fraîches (non stabilisées) sera limité et strictement encadré. Des installations sécurisées de compostage seront créées le plus rapidement possible.
En 2010, l'État prendra en charge, selon les mêmes modalités qu'en 2009, le coût de ramassage sur terre des algues dans la limite d'un montant de 700 000 €.
L’agence de l’eau Loire Bretagne participera à hauteur de 30% aux projets pilotes de ramassage des algues en mer conduits par la Communauté d'agglomération de Lannion (coût estimé à 400.000 €) et par le Parc Naturel Marin d’Iroise à Douarnenez (coût estimé à 10 000 €).
L’Etat soutiendra dès 2010 la création de plateformes supplémentaires de compostage d’algues vertes qui permettront à l'horizon 2011 de traiter par compostage l'ensemble des algues ramassées.
Trois projets portés par des collectivités locales sont d’ores et déjà identifiés comme pouvant bénéficier de cette intervention exceptionnelle de l'État, celui du SMICTOM de Launay Lantic dont la réalisation doit permettre le traitement de 20.000 tonnes d’algues supplémentaires dès 2010 ;
· celui de la communauté d’agglomération de Lannion Trégor, qui devrait permettre le traitement de
20.000 tonnes en 2011, celui de la communauté de communes Lamballe (ou projet du SMICTOM des Châtelets), qui devrait assurer le traitement de 10.000 tonnes en 2011.
De manière à assurer une couverture équilibrée des territoires concernés, l'État apportera son soutien à un projet supplémentaire dans le département du Finistère (a priori le projet Pays Fouesnantais), dès lors qu'il s'inscrira dans le calendrier de ce plan, à savoir qu'il pourra être mis en oeuvre d'ici l'été 2011.
L'État interviendra au travers d’une subvention de l’ADEME représentant 80% du montant de
l’investissement, sur la base des trois projets ci-dessus identifiés, ce sont ainsi 8 M€ qui devraient être mobilisés. A l’issue de ces investissements, les capacités de la Région Bretagne, en particulier dans les Côtes d'Armor, seront suffisantes pour assurer dans des conditions sécurisées, le traitement de la totalité des algues vertes produites. En cas de diminution des quantités d’algues vertes produites, ces installations pourront être utilisées pour le compostage d’autres types de déchets.
En 2010, en l’attente de la constitution de telles unités de compostage permettant le traitement de
l’intégralité des algues vertes ramassées, notamment sur la baie de Lannion, l'État prendra en charge 50% des coûts liés au traitement transitoire des algues, sur une ou des installation(s) existante(s) non dédiée(s ), dans la limite de 500.000 €.
Ces aides exceptionnelles dans leur nature et leur intensité, témoignent de la solidarité de l'État envers les collectivités locales concernées et de la volonté gouvernementale de garantir la sécurité en évitant la reproduction d’accidents tels que celui constaté en 2009.
A partir de 2012, les filières de gestion intégrée ( dit de « méthanisation ») seront progressivement mises en place. Ces filières porteront sur le ramassage des algues vertes, leur traitement par méthanisation, la collecte de lisiers et leur traitement, la production d’énergie et la réduction des engrais minéraux achetés par substitution par les digestats.
Par ailleurs le plan algues vertes vise à réduire les flux de nutriments en provenance des installations de traitement des eaux usées domestiques et industrielles,
Comme il a été indiqué l’Etat renforcera le suivi du fonctionnement des stations d’épuration tant des eaux domestiques qu’industrielles. En tant que producteurs et/ou épandeurs de matières azotées, les stations d’épuration et les industriels seront soumis à l’obligation de mettre en place une déclaration annuelle des quantités d'azote utilisées et échangées (azote organique et azote minéral) pour calculer la pression d'azote et connaître les quantités échangées.
L’agence de l’eau Loire Bretagne mettra en place un programme pluriannuel d'opérations groupées sur les assainissements non collectifs des 8 baies « algues vertes ». Ces projets bénéficieront d'une majoration d'aide de l'agence de l’eau de + 10%.
En outre la méthanisation offre des perspectives intéressantes en matière de réduction des nuisances et de valorisation des effluents d'élevage. De plus, les digestats de méthanisation pourraient représenter un substitut intéressant aux engrais azotés minéraux actuellement utilisés dans les baies algues vertes et d'une manière générale en Bretagne.
Un appel à projets sera lancé sur les bassins versants concernés. Les porteurs de projets devront présenter des solutions intégrées : ramassage et traitement des algues vertes par méthanisation, collecte et traitement des lisiers par méthanisation. Le porteur de projets doit prévoir un plan d’approvisionnement ainsi que les conventions avec les exploitants agricoles cultivant les terres qui recevront les digestats et le taux de substitution des engrais minéraux achetés par ces digestats.
L'Etat envisage d'apporter son soutien supplémentaire au développement d'unités de méthanisation des lisiers sur les bassins versants concernés. Ce soutien prendra la forme d'un tarif de rachat de l'électricité et du biogaz (établis au niveau national) et d'une aide spécifique à l'investissement accordée par voie d’appel à projets dont les modalités seront établies en lien avec les acteurs locaux.
En complément du rachat de l’électricité issue des unités de méthanisation, la loi portant engagement national pour l’environnement (Grenelle 2) prévoira que le biogaz puisse être injecté dans les réseaux de gaz naturel dans des conditions fixées après avis de la commission de régulation de l’énergie (CRE).
Outre cette mesure applicable au niveau national, une aide spécifique à l’investissement sera accordée par voie d’appel à projets.
L'élaboration de l'appel à projets sera coordonnée par l'ADEME. Le cahier des charges de l’appel à projets sera rédigé par l’ADEME et le ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer en concertation avec les acteurs locaux et le comité de pilotage.
L'appel à projets intègrera deux objectifs prioritaires la nécessité de garantir une collecte optimisée des quantités de lisiers excédentaires et la substitution de 50% des engrais minéraux utilisés dans la zone, par les digestats issus de la méthanisation. Il sera lancé en 2010 afin de voir les premières unités opérationnelles en 2012.
La gouvernance du plan Algues vertes sera assurée par un comité de pilotage présidé par le préfet de région Bretagne réunissant notamment le conseil régional, l'agence de l'eau Loire Bretagne, l'ADEME. Il s'appuiera · sur un comité consultatif associant tous les acteurs concernés dont les représentants de la profession agricole, des collectivités locales, et des industries agro-alimentaires.
· sur un comité scientifique chargé d’expertiser et d’évaluer la mise en oeuvre des différents axes du plan. Ce comité scientifique sera défini par le comité de pilotage et comportera également des experts des instituts techniques agricoles.
Dans chaque baie, en s’appuyant sur les commissions locales de l’eau et leur SAGE, des comités locaux sont créés afin de participer à la définition des appels à projets et au choix des projets ainsi que d’assurer le suivi des projets territoriaux.
En terme de financements et de calendrier de mise en oeuvre la répartition est la suivante: connaissances : 200 000 € (50%), ramassage : maximum 700 000 € (50%) + Expérimentation 140 000 € (30%), traitement : plateformes (3) 8M€ (80%) + fonctionnement 2010, 500 000 € (50%), méthanisation : conditions permettant de soutenir une vingtaine de projets, ANC : majoration aide +10% pour un taux actuel à 30%, mesures agricoles : 16M€/an pendant 5 ans.
De fait, l'Etat met en oeuvre une action laquelle concernera le pollueur payé. Toutefois il met en oeuvre des moyens afin de réduire ce problème en mettant en exergue l'approche scientifique du problème alors que celle-ci est aussi économique et sociétale.