L'un des articles clés du Grenelle II de l'environnement concernant l'énergie éolienne a été adopté le 7 mai 2010 par l'Assemblée Nationale et cela au cours d'un long débat et malgré l'opposition des associations écologistes et des industriels du secteur au risque de voir un recul de la filière.

En effet alors que la France s'est engagée à développer les énergies renouvelables pour atteindre 23 % du mix énergétique global à l'horizon 2020 dans la Loi Grenelle 1 du 3 août 2009 la loi Grenelle 2 a fait marche arrière.
Les discussions ayant eu lieu à l'Assemblée nationale sur le projet de loi Grenelle 2 s'inscrivent dans un climat de scepticisme généralisé à l'encontre des enjeux environnementaux depuis l'échec du Sommet de Copenhague.

La Commission des Affaires économiques de l'Assemblée Nationale a ainsi examiné les 30 et 31 mars derniers les articles 34 et 34 bis du projet de loi Grenelle 2, à savoir mise en place d'un développement maîtrisé de l'énergie éolienne, programmation pluriannuelle des objectifs de développement de l'énergie éolienne.

1- La remise en cause du programme éolien

Plusieurs amendements ont été adoptés à savoir:

L'obligation de respecter une distance minimale de 500 mètres par rapport aux habitations pour l'implantation des aérogénérateurs ;
La fixation d'un double seuil minimal de 15 MW et de 5 mâts pour déposer des demandes de permis de construire et d'autorisation d'exploiter ;
La création de schémas régionaux de l'éolien, ayant une force juridique importante, puisqu'à défaut de schéma d'ici le 31 décembre 2011, aucune zone de développement de l'éolien (ZDE) ne pourra plus être créée ;
La soumission des éoliennes dont la hauteur de mât dépasse 50 mètres à la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), sous le régime de l'autorisation, avec deux dispositions corollaires, tendant à obliger les exploitants à constituer des garanties financières, et à envisager la remise en état par eux-mêmes, ou, à défaut, par leur société mère.
Certains amendements tendant à interdire l'implantation d'éoliennes dans des zones sanctuarisées extrêmement étendues (institution d'un périmètre de 10 kms autour de nombreuses zones (Natura 2000, trames vertes / trames bleues, sites inscrits et classés, monuments historiques, PNR et parcs nationaux, rivage de la mer, etc.) ont été supprimés.
Le premier amendement tend à codifier la jurisprudence établie des juridictions administratives sur le fondement des dispositions de l'article R. 111-2 du Code de l'Urbanisme, tant en terme de sécurité publique (risque de chute et de projection de pâles : CAA Lyon, 5 avril 2005, Association pour la préservation des paysages exceptionnels du Mezenc et autres, n° 04LY00431, confirmé par le CE, 6 novembre 2006, Association pour la préservation des paysages exceptionnels du Mezenc et autres, n°281072, Rec. T. p. 1104 ; le CAA Nantes, 28 mars 2007, Commune d'Amaye-sur-Seulles et Association « pré-bocage environnement », n° 06NT00674 et n° 06NT00677 ; le CE, 27 juillet 2009, Société Boralex avignonet SAS, n°317060) que de salubrité publique (Bruit : CE, 15 avril 2005, Association des citoyens et contribuables de la communauté de communes Saane-et-Vienne (acsv) et autres, n° 273398 ; CAA Nantes, 23 juin 2009, Association cadre de vie et environnement Melgven-Rosporden et autres, n° 08NT02986, n° 08NT03078).

Cela n'empêchera pas le conseiller du tribunal administratif d'aller au-delà de ce périmètre en cas de circonstances locales particulières, notamment du point de vue topographique, de la localisation ou en raison des caractéristiques des éoliennes, comme il l'applique présentement comme en atteste l'arrêt du CE, 27 juillet 2009, Société Boralex avignonet SAS, n°317060.
Cependant les trois amendements suivants remettent en cause le programme éolien.
En effet, le deuxième amendement n'a pour objet de condamner le petit éolien et le développement d'un réseau de TPE-PME dans le domaine des énergies renouvelables.
Le troisième amendement répond à une demande compréhensible d'une certaine planification d'ensemble, permettant une meilleure organisation spatiale.
A compter du 1er janvier 2012, aucune zone de développement de l'éolien (ZDE) ne pourra plus être créée après cette date en l'absence de tels schémas .
Mais il s'agit également d'un schéma de plus qui s'insérera tant bien que mal.
Cela pose la question de la portée juridique de ce schéma et du rapport existant entre les autorisations de construire et l'exploitation de ce schéma. Ainsi on peut se demander du rapport de conformité, de compatibilité.
Selon le SER l'obligation de créer créer des parcs éoliens avec un seuil minimal de 15 MW entrainerait l'abandon de la moitié du parc éolien



2- Un raccordement à la législation des ICPE

La constitution d'un dossier de demande d'autorisation d'exploiter est assorti d'obligations contraignantes de constitution de garanties financières, et parallèlement la constitution d'un dossier de demande de permis de construire.
Ce dernier devra toujours être déposé en même temps que les autorisations et déclarations nécessaires au titre du droit de l'électricité.
En outre, les éoliennes de grande hauteur sont déjà soumises à l'obligation d'établir une étude d'impact (analysant les atteintes au paysage et à l'environnement, les risques pour la sécurité, les nuisances sonores), laquelle doit être insérée dans le dossier de demande de permis de construire or c'est une disposition que l'on retrouve dans le cadre des ICPE codifiée articles L. 122-1 à L. 122-3 du code de l’Environnement,
De fait le contrôle du conseiller de tribunal administratif sera plus étendu dans le cadre d'un litige portant sur l'autorisation d'exploiter, puisque qu'il s'agit d'un litige de plein contentieux, en application de l'article L. 514-6 du Code de l'environnement,
La plasticité du règlement national d'urbanisme (article R. 111-1 et suivants du Code de l'Urbanisme), associée au caractère non souple de l'erreur manifeste d'appréciation, rend la protection des intérêts visés à l'article L. 511-1 du Code de l'environnement déjà effective.
La jurisprudence actuelle rendue dans le cadre des litiges portant sur les permis de construire rend cette garantie globalement opérationnelle.
On peut s'interroger sur l'insécurité des projets éoliens, à travers la difficulté à les financer, du fait de l'allongement des délais de recours contentieux pour les tiers, puisque ce délai est de 4 ans dans le cas général, réduit à 6 mois dans certains cas particuliers, contre les autorisations d'exploiter (art. L. 514-6 du Code de l'environnement), alors qu'il n'est que de deux mois à compter de l'affichage sur le terrain pour les permis de construire.

Les Préfets ont tendance à manifester de la souplesse à l'égard des dispositions des articles R. 111-2 (sécurité) et R. 111-21 (atteinte aux paysages et à l'intérêt des lieux) du Code de l'Urbanisme, et plus rarement des articles R. 111-5 (accès) et R. 111-15 (environnement).
Ce dernier article ne permet pas de refuser un permis de construire, mais permet de l'assortir de prescriptions spéciales (CE, 7 février 2003, Société civile d'exploitation agricole Le Haras d'Achères, n° 220215 ; CAA Lyon, 6 juin 2000, Commune de Hyères-les-Palmiers, n° 95LY00062), contrairement à la position adoptée par certains Préfets.

De fait, cela va l'encontre de la tendance européenne et mondiale, qui tend vers une hausse de la production d'électricité d'origine éolienne dans le monde de 25 % pour cette année.




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