En 2007, l'entrée en vigueur du règlement européen REACH, concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques a d’emblée eu pour objectif de combler les carences de connaissances sur les substances chimiques. Ainsi, ce sont plusieurs milliers de substances qui devront être évaluées d'ici 2020. Aujourd’hui encore, certaines d’entre elles ne possèdent que les tests sur animaux en guise d’expérimentation. Pour empêcher la multiplication de ces tests, jugés comme particulièrement cruels par les nombreux opposant à l’expérimentation animale, le déclarant de la substance va devoir parvenir à démontrer que le test sur animal ce trouve être « nécessaire ».

L’Agence européenne des produits chimiques tient toutefois à préciser que la majorité des enregistrements se font par le biais de la méthode de la « soumission conjointe », constituant un premier rempart pour limiter les tests sur les animaux. En effet, puisque 98% des substances sont enregistrées conjointement entre déclarants, si des tests venaient à être réalisés, les résultats bénéficieront à tous les déclarants présents dans la soumission conjointe. Cela évitera donc que chacun d’entre eux effectuent de manière individuelle des tests identiques concernant la même substance.

L’Agence quant à elle, définit cette approche comme « l’utilisation des informations pertinentes sur des substances analogues («substances sources») afin de prévoir les propriétés de substances «cibles». Si elle est correctement mise en œuvre, les essais expérimentaux peuvent s'en trouver réduits puisqu'il n'est pas nécessaire de tester chaque substance cible ». Dès lors, la soumission conjointe de substance est l’une des méthodes les plus couramment adoptées pour compléter les données manquantes en vue des enregistrements présentés au titre de REACH.

Après un premier rapport publié en juin 2011, et un deuxième en date de juin 2014, un troisième rapport sur l’utilisation d’alternatives aux tests sur les animaux en application de l’article 117 du règlement n° 1907/2006 du 18 décembre 2006, vient d’être publié ce mois de juin 2017.

Il est ici question de l’analyse des données issues de l’enregistrement des substances soumises par des entreprises à l’Agence européennes des produits chimiques (ECHA). Dans ce nouveau rapport, sont plus précisément visés les dossiers d’enregistrements conjoints et individuels soumis à l’Agence entre les années 2008 et 2016, représentant près de 6 290 substances.

Ce qui ressort de ce rapport est l’utilisation croissante de méthodes alternatives aux essais sur les animaux. En effet, 89% des dossiers ferraient référence à, au minimum, une méthode alternative aux tests sur les animaux.

S’agissant de ces alternatives, la plus courante d’entre elle, en ce qu’elle est utilisée pour 63% des substances analysées, est celle consistant en l’utilisation d’information sur des substances similaires via le regroupement de substances et la méthode des références croisées.

Par ailleurs, on trouve sur la deuxième marche du podium la technique de la combinaison d’information provenant de différentes sources (à hauteur de 43%). Enfin, la méthode de la modélisation informatique vient fermer la marche avec son taux de 34% d’utilisation.

Tous les outils vus précédemment jouent effectivement un rôle concernant la diminution du nombre de tests effectués sur les animaux. Cependant, ces dispositifs ne semblent en aucun cas traiter le problème profondément éthique que pose l’expérimentation animale en elle-même. Il semble ici utile de rappeler que cette dernière consiste en l’utilisation d’animaux comme substitue ou « modèle », pour tenter de comprendre la physiologie d'un organisme et ses réponses.

Avec le règlement REACH, la ligne politique choisie est claire : oui à l’expérimentation animale sauf en cas de méthodes alternatives existantes. Le test est donc le principe et l’alternative l’exception.

Bien que la perception de l’animal ait évolué au fil des siècles, des théories philosophiques, religieuses et scientifiques, ce dernier, que l’on sait désormais doué de conscience et de sensibilité comme n’importe quel être vivant (dont l’humain fait partie), possède toujours une place instable dans notre société. Tantôt boule de poile adulé par petits et grands, tantôt objet d’expérimentation scientifique pas toujours justifié, on comprend d’emblée la difficulté qu’à la notion d’ « éthique animale » à s’imposer.

Malgré les progrès effectués grâce à une diligence de plus en plus croissante du législateur fortement poussé par la société civile, la question se pose aujourd’hui encore : a-t-on le droit d’expérimenter sur l’animal ?