Le 11 mai 2017, est entré en vigueur le décret n° 2017-888 du 06 mai 2017 relatif à l'action de groupe et à l'action en reconnaissance de droits prévues aux titres V et VI de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle.

Ce décret qui a pour objet de définir les règles procédurales applicables aux actions de groupe portées indifféremment devant le juge judiciaire et devant le juge administratif, apporte la précision attendue des conditions de l’agrément des associations autres que les associations de protection de l’environnement pour ce qui est de l’exercice de l’action de groupe en matière environnementale.

L’action de groupe est l’action qui peut être exercée par un groupe de personnes qui, étant placées dans une situation similaire ont subi un dommage causé par une même personne et ayant une cause commune consistant en un manquement de même nature à ses obligations légales ou contractuelles. L’action de groupe peut avoir pour finalité soit la cessation du manquement à l’origine du dommage, soit l'engagement de la responsabilité de la personne ayant causé le dommage afin d'obtenir la réparation des préjudices subis, soit ces deux fins.

Consacré d’abord en droit de la consommation, l’action de groupe a ensuite été permise dans d’autres domaines, notamment en matière de santé, en matière sociale, en matière de protection des données et en matière environnementale. L’action de groupe en matière environnementale a été instituée par la loi de modernisation de la justice du 21ème siècle qui, modifiant le Code de l’environnement, a inséré sous l’article L. 142-3 du Code de l'environnement, un article L. 142-3-1. Cet article permet l’exercice de l’action de groupe aux fins d’obtenir la cessation d’un manquement et, ou la réparation des préjudices corporels et matériels résultant d’un dommage causé à l’environnement.

Aux termes de l’alinéa 2 de l’article L.142-3-1 du Code de l’environnement, lorsque plusieurs personnes placées dans une situation similaire subissent des préjudices résultant d'un dommage dans les domaines mentionnés à l'article L. 142-2 du Code de l’environnement, causé par une même personne, ayant pour cause commune un manquement de même nature à ses obligations légales ou contractuelles, une action de groupe peut être exercée devant une juridiction civile ou administrative. La finalité de cette action étant la cessation du manquement et, ou la réparation des préjudices corporels et matériels résultant du dommage causé à l'environnement.

Cet article réservait alors l’exercice de l’action de groupe à deux types d’associations, les associations agréées de protection de l’environnement et les associations dont l’objet statutaire comporte la défense des victimes de dommages corporels ou la défense des intérêts économiques de leurs membres.

Ce sont les contours de l’agrément des associations dont l’objet statutaire comporte la défense des victimes de dommages corporels ou la défense des intérêts économiques de leurs membres que le décret du 06 mai 2017 vient préciser en fixant pour ces dernières les conditions de bénéfice de l’agrément (I) et les modalités d’octroi de l’agrément (II).


I- Les conditions de bénéfice de l’agrément

Cinq conditions sont requises pour bébéficier de l'agrément.

Première condition : la condition d’ancienneté
Pour bénéficier de l’agrément, les associations doivent justifier d’au moins trois ans d’activité effective et publique dans la défense de victimes de dommages corporels ou des intérêts économiques de leurs membres. On peut y voir un parallèle avec la condition d’ancienneté de trois ans d’exercice d’une activité statutaire également requise pour les associations agrées de protection de l’environnement. Il est à préciser que lorsque l’association est formée de la réunion d’autres associations dont l’une au moins était déjà agréée, la durée d’exercice de l’activité effective est réduite à une année.

Deuxième condition : la condition de représentativité
L’association qui demande à être agrée doit avoir une représentativité suffisante déterminée par rapport au cadre territorial de son activité et attestée par le nombre de ses membres, personnes physiques cotisant, soit individuellement, soit par l'intermédiaire d'associations qui la composent. Le décret fixe ce nombre à 10 000 membres personnes physiques pour une association nationale. Aucune précision n’est donnée pour les associations régionales, ou départementales mais ce nombre pourra être déterminé en prenant le nombre fixé pour l’association nationale comme référence.

Troisième condition : L'exercice d'une activité non lucrative et d'une gestion désintéressée
L’association est définie par la loi du 1er juillet 1901 comme étant la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d'une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices. Il est donc admis que des associations puissent exercer des activités lucratives à la seule condition de ne pas partager les bénéfices entres les membres qui les composent. D’où se crée une distinction entre associations à but lucratif et associations à but non lucratif. Cette condition exclut donc les premières du bénéfice de l’agrément.

Quatrième condition : Le fonctionnement conforme aux statuts. La quatrième condition est celle d’un fonctionnement conforme de l’association à ses statuts, présentant des garanties permettant l'information de ses membres et leur participation effective à sa gestion, au total une transparence dans le fonctionnement de l’association.

Dernière condition : Les garanties de régularité en matière financière et comptable.
Pour pouvoir prétendre à l’agrément, l’association doit tenir une comptabilité régulière. L’association de défense de victimes de dommages corporels ou des intérêts économiques de ses membres qui remplit ainsi toutes ces conditions peut bénéficier de l’agrément pour exercer l’action de groupe en matière environnementale.

II- Les modalités d’octroi de l’agrément

L'agrément pour pouvoir exercer une action de groupe en matière environnementale est délivré pour une durée de cinq ans, renouvelable. Lorsque l’association agit dans un cadre départemental ou régional, la décision d’agrément relève de la compétence du préfet. Lorsque l’association agit dans un cadre national, celle-ci relève de la compétence du ministre de l’environnement. Mais dans l’un comme dans l’autre cas, la demande d’agrément est adressée au préfet du département dans lequel l’association a son siège social. Le préfet instruit la demande et recueille l’avis du procureur général près la Cour d’appel dans le ressort duquel l’association a son siège social.

Pour une association nationale, le préfet instruit la demande et transmet le dossier, avec son avis, au ministre chargé de l'environnement qui a compétence pour délivrer l’agrément dans ce cas. La décision est notifiée à l'association dans un délai de six mois à compter de la date à laquelle la demande est déclarée complète. Passé ce délai, l'agrément est réputé accordé.

La décision d’agrément fait l’objet de mesures de publicité à la charge des autorités compétentes pour les délivrer. Pour les associations agissant dans un cadre national, c’est le ministre de l’environnement qui doit assurer cette publicité en mettant à la disposition du public, la liste des associations bénéficiant d’un agrément national. Pour les associations agissant dans un cadre régional ou départemental, c’est le préfet qui met disposition du public, cette liste.

Cet agrément est renouvelable. La présentation et l'instruction de la demande de renouvellement de l'agrément ainsi que la décision de renouvellement est soumise aux mêmes conditions et formalités que la demande initiale d’agrément. Pour être recevable, la demande de renouvellement doit être adressée au préfet du département dans lequel l'association a son siège social six mois au moins avant la date d'expiration de l'agrément en cours de validité. Cette exigence a pour finalité d’éviter qu’une association se retrouve momentanément privée d’agrément.

Il convient de préciser que l'agrément d'une association n'entraîne pas de droit l'agrément des associations qui la composent. Cette mesure est identique à celle qui est déjà prévue à l’article L.141-1 du Code de l’environnement concernant les associations membres d’associations agrées de protection de l’environnement.

Un suivi de l’activité de ces associations est effectué. En effet, les associations agréées adressent chaque année, à l'autorité qui a accordé l'agrément, par voie postale ou électronique, des documents dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de l'environnement. Ces documents comprennent notamment le rapport d'activité, les comptes de résultat, le bilan de l'association et leurs annexes.

Le non-respect de cette obligation est sanctionné par le retrait de l’agrément. L’agrément peut également être retiré si l’association de défense de victimes de dommages corporels ou des intérêts économiques de leurs membres qui après avoir été agréée, ne remplit plus les conditions de bénéfice de l’agrément.