Rappelons brièvement le principe de la Loi Littoral : c'est la loi relative à l'aménagement, à la protection et à la mise en valeur du littoral. Elle vise à encadrer l'aménagement de la côte pour la protéger des excès de la spéculation immobilière et à permettre le libre accès au public sur les sentiers littoraux.

En l'espèce , dans cette affaire le maire de Talloires en Haute-Savoie avait refusé, par deux arrêtés, de délivrer à une société un permis de construire un bâtiment de cinq logements.
Les recours du maire contre ces décisions ont été rejetés en première instance et en appel, la société s’est donc pourvue en cassation. Elle soutenait que le maire ne "pouvait refuser sa demande de permis en se fondant sur les dispositions de l'article L.146-4 du code de l’urbanisme relatives à l’extension de l’urbanisation en zone littorale , dès lors que la commune est couverte par un Plan local d’urbanisme situant le terrain concerné en zone ouverte à l’urbanisation."

La section du contentieux a rappelé que c'est au maire qu’il appartient "de s’assurer, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, de la conformité du projet avec les dispositions du code de l’urbanisme particulières au littoral ".
De plus dans un arrêt "Commune de Porto-Vecchio de 2015", le Conseil d’État avait au contraire indiqué que ce contrôle ne s’opérait " qu’en l’absence de document local d’urbanisme légalement applicable ".
La section a également rappelé que "dans le cas où le territoire de la commune est couvert par une directive territoriale d’aménagement, ou par un document en tenant lieu, cette conformité doit s’apprécier au regard des éventuelles prescriptions édictées par ce document d’urbanisme, sous réserve que les dispositions qu’il comporte sur les modalités d’application des dispositions des articles L. 146-1 et suivants du code de l’urbanisme soient, d’une part, suffisamment précises et, d’autre part, compatibles avec ces mêmes dispositions".

Mais la haute juridiction précise "qu’eu égard, d’une part, au seul rapport de compatibilité prévu par l’article L. 111-1-1 du code de l’urbanisme entre les documents d’urbanisme qu’il mentionne et entre ces documents et les règles spécifiques à l’aménagement et à la protection du littoral et, d’autre part, au rapport de conformité qui prévaut entre les décisions individuelles relatives à l’occupation ou à l’utilisation du sol et ces mêmes règles, la circonstance qu’une telle décision respecte les prescriptions du Plan local d'urbanisme ne suffit pas à assurer sa légalité au regard des dispositions directement applicables des articles L. 146-1 et suivants de ce code ".

Le Conseil d’Etat a de plus indiqué qu’un Plan local d'urbanisme " peut prévoir l’extension de l’urbanisation soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, c’est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, soit en délimitant une zone destinée à l’accueil d’un hameau nouveau intégré à l’environnement ". Toutefois, "l’exigence de continuité étant directement applicable aux autorisations d’occupation ou d’utilisation du sol, l’autorité administrative doit vérifier, à moins que le terrain d’assiette du projet soit situé dans une zone destinée à l’accueil d’un hameau nouveau intégré à l’environnement, si, à la date à laquelle elle statue, l’opération envisagée est réalisée “en continuité avec les agglomérations et villages existants”, et ce alors même que le Plan local d'urbanisme, en compatibilité avec les orientations des schémas de cohérence territoriale et des schémas de secteur ou, en l’absence de ces schémas, avec les dispositions particulières au littoral du code de l’urbanisme, le cas échéant précisées, sous les réserves précédemment indiquées, par une directive territoriale d’aménagement ou par un document en tenant lieu, aurait ouvert à l’urbanisation la zone dans laquelle se situe le terrain d’assiette ".

Donc en l’espèce, en l’absence de directive territoriale d’aménagement, le maire s’était fondé, pour refuser le permis, sur la méconnaissance des dispositions de l’article L. 146-4 alors même que le terrain d’assiette était situé dans une zone ouverte à l’urbanisation du PLU.
Le juge d’appel avait quant à lui relevé que le terrain concerné constituait une extension de l’urbanisation ne s’inscrivant ni en continuité avec une agglomération ou un village existant ni dans un hameau nouveau intégré à l’environnement. Le pourvoi du pétitionnaire est rejeté. La loi Littoral s'applique désormais directement pour les autorisations d'urbanisme comme le Plan local d'urbanisme.

Source : Conseil d'Etat 31 mars 2017, requête n° 392186