Le 22 décembre 2016, le premier tronçon de route solaire construit en Normandie à Tourouvre-au-Perche a été inauguré par la ministre de l’environnement Ségolène Royal. Il est ici question d’une surface totale de 2.800 m2 entièrement recouverte de dalles photovoltaïques, et emprunté chaque jour par près de 2.000 automobilistes. Cette route made in France et baptisé Wattway du nom de la société de construction, sera capable d’alimenter l’éclairage public de cette commune de 3.400 habitants. En effet, le système étant raccordé au réseau électrique, les dalles sont capables d’alimenter en électricité les panneaux routiers, les feux de circulation et l’éclairage.

Ce chantier commencé fin octobre 2016, et ayant impliqué un investissement de l’Etat de 5 millions d’euros, semble être le précurseur d’une nouvelle volonté étatique. En effet, la ministre a annoncé que « l’État allait conduire en 2017 un plan d’expérimentation de route solaire sur le réseau routier national, première étape d’un programme de déploiement sur les quatre années à venir ».

Cette technologie innovante repose sur un procédé simple, en ce qu’il suffit de coller sur des routes préexistantes des panneaux solaires qui seront par la suite recouverts d’une résine contenant des particules de verre. Ce revêtement a pour but de protéger les dalles photovoltaïques du temps et de l’usure dû aux passages répétés de véhicules et des intempéries.
Ce concept simple possède l’avantage de la production d’électricité sans qu’aucune gêne ne soit occasionnée, puisque les panneaux solaires sont collés sur des surfaces occupés uniquement par des véhicules. Si l’on rapporte ce concept aux millions de kilomètres de routes présentes en France, le développement et la démocratisation des énergies renouvelables semble être à portée de main.

Ainsi, si cette route paraît constituer une innovation majeure dans le secteur des énergies renouvelables, elle n’est toutefois pas la première dans son genre. En effet, en juin 2016 était installé en Vendée un parking solaire basé sur une technologie identique.
Des projets similaires ont aussi vu le jour à l’étranger, comme par exemple une piste cyclable solaire SolarRoad, longue de 70m au nord d’Amsterdam.

Alors que cette route solaire normande est la plus longue jamais construite, elle semble toutefois laisser certains experts sceptiques. C’est en ce sens que, l’ingénieur Dave Jones, spécialiste en électronique, considère que ces types de projet sont « trois fois plus cher et deux fois moins efficaces que les panneaux solaires classiques montés sur les toits ». Selon lui, installer des panneaux solaires à même le sol et rouler dessus reviendrait même à "utiliser cette technologie de la manière la plus grossière et la plus inefficace possible ».

De plus, le président du Syndicat des énergies renouvelables (SER) Jean-Louis Bal, se dit lui aussi dubitatif. Il a ainsi expliqué que l’ « on a un prototype à environ 17 euros par watt alors qu'on arrive à 1 euro par watt pour des centrales (photovoltaïques, NDLR) au sol. La question est donc de savoir quel est le potentiel de réduction de ce coût ». Cette nouvelle production énergétique, en plus d’avoir un cout très élevé, semble de plus être irrégulière en ce qu’elle est dépendante de l’ensoleillement et sera donc variable d’une saison à l’autre, voir même d’un jour à l’autre. Il semble donc impératif que cette production soit accompagnée d’autres sources d’énergies.
Dans le même sens, le représentant de la principale organisation professionnelle du secteur semble lui aussi être sceptique sur la quantité d'énergie produite, rappelant que "les panneaux photovoltaïques sont en position horizontale, ce qui n'est pas l'inclinaison optimale ». Il rajoute de plus que le passage de véhicule sur les dalles photovoltaïques diminue la production d'énergie.

Enfin, l’Etat ayant investi une somme importante dans cette infrastructure, Marc Jedliczka, le directeur général de l’association Hespul et spécialiste du photovoltaïque, considère quant à lui que bien que cette route soit « une prouesse technologique incontestable » elle reste « un joli gadget hors de prix ». Pour lui, le développement du photovoltaïque en France doit avant tout passer par une simplification des procédures de pose des cellules photovoltaïques sur le toit de bâtiments et non pas par ce type de projet plus onéreux que réellement rentable.

La construction de cette route a cependant fait bonne presse aux sociétés impliquées dans le projet tel que la société SNA, fabricantes des dalles Wattway, et la société Colas (filiale de Bouygues) à l’origine de cette invention. Le directeur de cette dernière a en effet déclaré que l’entreprise allait mener deux opérations similaires aux États-Unis et au Canada.