Le principe de précaution a pour objet de prévenir la réalisation d’un dommage bien qu’incertain en état des connaissances scientifiques et techniques. Il est garanti depuis 1995 à l’article L. 110 du Code de l’environnement, sous le mandat de Jacques Chirac. En 2005, le principe prend même une valeur constitutionnelle avec l’entrée en vigueur de la Charte de l’environnement.
Si le principe de précaution promet une protection plus efficiente de l’environnement à travers sa consécration au niveau constitutionnel, il reste cependant vivement critiqué en France dans la mesure où il prévient un risque « incertain ».

Ainsi, quelles sont les évolutions envisageables du principe de précaution au regard du contexte politique actuel ?

1) L’éventuelle suppression du principe de précaution

François Fillon, candidat élu aux primaires du parti Les Républicains propose de remplacer le principe de précaution par un principe de responsabilité. Le candidat affirme qu’il faut « emprunter les voies de l’innovation et du progrès scientifique, ne pas renoncer aux projets d’avenir au nom du principe de précaution ».
Le principe de précaution empêche selon lui le développement de certaines activités présentant un risque « incertain ». C’est notamment le cas de la dissémination d’OGM (organismes génétiquement modifiés) dont l’utilisation est très réglementée. Ces restrictions sont pour beaucoup un frein à l’économie et l’innovation dans la mesure où le caractère constitutionnel du principe empêche l’adoption de lois qui permettraient certaines activités dont le risque n’est pas scientifiquement démontré.
Cependant, le principe de précaution n’a pas pour objet de prévenir les atteintes d’un risque aléatoire, c’est-à-dire un risque dont la réalisation n’est pas certaine, mais de prévenir un risque dont l’existence même n’est pas certaine.

Si la suppression du principe de précaution est envisageable au regard des discours des candidats à l’élection présidentielle, la question de sa déconstitutionnalisation concerne des enjeux plus techniques (2).

2) La déconstitutionnalisation du principe de précaution ?

En théorie, il est commun de penser qu’une déconstitutionnalisation du principe constituerait une régression de la protection de l’environnement.
Cependant, en pratique, bien que le principe de précaution soit appliqué directement par le Conseil d’Etat (arrêt du Conseil d’Etat rendu en 2010 « Les Hauts de Choiseul »), le juge pénal refuse de prononcer des condamnations sur la base de l’article 5 de la Charte de l’environnement.
Ainsi, en pratique, les juridictions judiciaires n’ont pas encore bien intégré le principe de précaution malgré la décision du Conseil Constitutionnel 2008 OGM qui consacre la valeur constitutionnelle de l’article 5 de la Charte.
Ainsi, une disposition directement insérée dans le Code civil, à l’instar de l’entrée en vigueur des dispositions sur le préjudice écologique aux articles 1246 et suivants, pourrait permettre une application du principe par l’ordre judiciaire dont l’application reste aujourd’hui en majeure partie circonscrite à la juridiction administrative.

Les possibilités envisagées n’excluent cependant pas la pérennité voire le renforcement du principe, qui reste, au regard des défenseurs de la protection de l’environnement, le moyen le plus efficace pour la protection de l’environnement.
Ce débat politique autour de la question laisse entrevoir la probable évolution du principe à moyen terme.