En 2010, plus d’un million de personnes avaient une activité régulière en agriculture, auxquelles doivent être ajoutées plusieurs centaines de milliers de travailleurs non permanents, ainsi que plusieurs dizaines de milliers de stagiaires. Au-delà, ces expositions peuvent aussi concerner les familles des professionnels concernés, ainsi que les riverains des zones d’utilisation des pesticides.

Par pesticides sont les produits phytopharmaceutiques, biocides et certains produits de médecine vétérinaire.

Outre l’impact sur l’environnement, la réduction du recours aux pesticides en agriculture revêt une importance particulière en raison des enjeux de santé, et notamment de santé au travail.

De nombreuses études épidémiologiques mettent en évidence une association entre les expositions aux pesticides et certaines pathologies chroniques. L’expertise collective de l’Inserm, publiée en 2013, a mis en évidence des excès de risque pour différentes pathologies, notamment certains cancers (hémopathies malignes, cancers de la prostate, tumeurs cérébrales, cancers cutanés...), certaines maladies neurologiques (maladie de Parkinson, maladie d’Alzheimer, troubles cognitifs...) et certains troubles de la reproduction et du développement, liés à des expositions à différents pesticides ou classes de pesticides, avec des niveaux de présomption pouvant aller de faible à fort selon les cas.

Dans ce contexte, l’Anses s’est autosaisie en 2011 pour mener une expertise afin d'identifier, évaluer et caractériser les expositions aux pesticides des personnes travaillant dans l’agriculture, afin de proposer des actions de réduction et de prévention.

Les conclusions de l’Agence confirment le manque de données relatives aux expositions aux pesticides des personnes travaillant dans l’agriculture. De plus, la centralisation, l’accessibilité et l’exploitation faite de l’ensemble des données apparaissent à ce jour insuffisantes.

En effet, les plans nationaux, les informations disponibles dans la littérature, comme l’expertise collective de l’Inserm sur les effets sur la santé des pesticides témoignent unanimement du déficit de données sur les expositions aux pesticides des personnes travaillant dans l’agriculture en France.

Les politiques de prévention des risques sont en grande partie centrées sur quelques déterminants matériels de l’exposition relevant du comportement individuel des personnes au travail : mesures d’hygiène, port d’équipements de protection individuelle. Selon les principes généraux de prévention en santé travail, ces mesures ne devraient être utilisées qu’en dernière intention après la substitution et la mise en œuvre de mesures de prévention collective, relatives par exemple à l’organisation du travail.

Les préoccupations de santé au travail relatives à l’exposition aux pesticides des personnes travaillant dans l'agriculture sont prises en compte de façon très hétérogène et parfois réduite lors de la formation initiale destinée à ces personnes.

L’Agence recommande alors de poursuivre les travaux au niveau européen pour l’harmonisation et l’évolution régulières des méthodes d’évaluation, de poursuivre les travaux relatifs à la connaissance de l’efficacité des équipements de protection, qui doivent être compatibles avec l’activité des personnes travaillant dans l’agriculture ainsi que de renforcer les actions de conseil et de formation des utilisateurs de pesticides, notamment sur les dangers, les risques et la sécurité d’utilisation (étant notamment donné que certaines situations d’exposition concernant les populations sensibles ou vulnérables).

L'Agence préconise également d’améliorer les connaissances sur les expositions aux pesticides des personnes travaillant dans l’agriculture en renforçant la description des expositions réelles afin de consolider les évaluations des risques ou les études épidémiologiques, mais aussi d’évaluer l’efficacité des mesures de prévention recommandées.