Ce jugement accueille la requête d'un habitant de la commune dont il reconnaît la qualité à agir en raison de « sa qualité d'habitant de la commune sur le territoire de laquelle se trouvent les espèces protégées faisant l'objet de la dérogation accordée et eu égard aux conséquences d'une telle décision sur l'environnement ».

La décision est d'autant plus intéressante qu'en référé il avait jugé, à propos de « sa qualité d'habitant de la commune de Vingrau », que « cette seule qualité, en l'absence de toute autre précision, relative notamment au lieu d'implantation de la carrière de Nau Bouques et aux nuisances qu'elle serait susceptible de lui générer n'est pas suffisante pour lui donner qualité à agir ».
Il faut sans doute considérer que le juge, ainsi qu'il résulte des termes de l'ordonnance de référé, a, dans un premier temps, conclu, de l'absence de précision « relative notamment au lieu d'implantation de la carrière et aux nuisances qu'elle serait susceptible de lui générer », à l'absence d'intérêt personnel, conférant la qualité pour agir.

Par le jugement, et dans un second temps, la requête a été accueillie parce que le juge a pu considérer que les espèces protégées contribuaient à la qualité de l'environnement de la commune elle-même et identifier une forme d'intérêt moral collectif, dont chaque citoyen semblerait donc pouvoir se prévaloir.

Il est donc nécessaire, en l'absence de motivation particulière, de rechercher ce qui a pu justifier une telle décision finalement surprenante.

La décision du TA de Montpellier peut faire application du raisonnement qui a déjà vu le juge, en matière d'urbanisme, s'affranchir des règles de proximité et de distance, pour considérer que certaines opérations, par leur importance seule, justifiaient que l'intérêt à agir soit reconnu à tous les habitants de la commune.

Elle peut aussi, sauf à envisager l'erreur de droit résultant de la confusion entre les deux législations distinctes prévues au titre IV et V du Code de l'environnement, être considérée comme prenant place dans un processus plus général d'assouplissement, jusqu'alors mesuré, du principe posé en 1959, traduisant une articulation pragmatique des procédures. L'erreur de droit n'est pas un monopole de l'administration qui applique à une situation donnée un texte qui ne s'y applique pas, ou fonde une décision sur les conséquences erronées qu'il tire d'un texte existant.
Il arrive parfois, de la même manière, que le juge appuie sa décision sur un texte inapplicable à l'espèce.

Ce jugement, en paraissant s'affranchir du principe d'indépendance des législations, ouvrirait alors la voie à une reconnaissance aux espèces protégées d'une valeur d'importance suffisante pour que la qualité à agir soit très largement entendue.

Cette qualité à agir, ainsi reconnue à un habitant de la commune, peut en effet trouver un fondement dans les articles R. 514-3-1 et L. 511-1 du Code de l'environnement.
Il en résulterait alors que les dispositions relatives aux installations classées, selon lesquelles peuvent être déférées par « les tiers, personnes physiques ou morales, les communes intéressées ou leurs groupements, en raison des inconvénients ou des dangers que le fonctionnement de l'installation présente pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique », s'appliqueraient aux demandes de dérogation prévues à l'article L. 411-2, mais aussi pourquoi pas à l'article L. 414-4 VII.

La décision du TA de Montpellier, pour succincte et peu explicite qu'elle soit, serait alors une illustration supplémentaire de l'intime imbrication qui existe aujourd'hui entre la dérogation et la possibilité d'exploiter