En l’espèce, la « European Federation for Cosmetic Ingredients (EFfCI), association professionnelle représentant les fabricants d’ingrédients utilisés dans les produits cosmétiques dans l’Union européenne, a saisi la justice britannique pour connaître les sanctions pénales encourues par trois de ses sociétés membres au cas où celles-ci mettraient sur le marché britannique des produits cosmétiques dont les ingrédients ont fait l’objet d’expérimentations animales.
En effet, ces sociétés ont procédé à de telles expériences hors de l’Union européenne et afin que les produits cosmétiques ainsi testés et contenant certains ingrédients puissent être vendus en Chine et au Japon.

Pour rappel, le Règlement (CE) n°1223/2009 du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques interdit expressément la commercialisation de produits dont les ingrédients ont fait l’objet d’une expérimentation animale dans le but de satisfaire aux exigences de ce règlement.
Lesdites exigences comprennent notamment une obligation que le produit cosmétique soit sûr pour la santé humaine, cette sécurité́ devant être évaluée sur la base des informations appropriées et faire l’objet d’un rapport inclus dans le dossier d’information du produit.

Pour l’association EFfCI, les dispositions du règlement ne sont pas violées si les expérimentations animales n’ont été menées que dans le but de se conformer aux législations de pays tiers.
La question à laquelle devait répondre la Cour de Justice dans cette affaire était celle de savoir si les dispositions du règlement relatif aux produits cosmétiques concernant les produits dont les ingrédients ont fait l’objet d’une expérimentation animale « afin de satisfaire aux exigences de ce règlement » peuvent viser des expérimentations animales telles que celles menées en l’espèce dans des pays tiers.

La Cour répond à cette interrogation en prenant en compte le contexte et les objectifs poursuivis par le règlement et considère que celui-ci a pour objectif d’établir les conditions d’accès au marché de l’Union européenne pour les produits cosmétiques et d’assurer un niveau de protection élevé de la santé humaine tout en veillant au bien-être des animaux au travers de l’interdiction des expérimentations sur ceux-ci. Ainsi, l’accès au marché est conditionné au respect de cette interdiction de recourir à l’expérimentation animale.

Elle précise en premier lieu que seuls les résultats des expérimentations animales invoqués dans le rapport de sécurité du produit cosmétique peuvent être considérés comme se rapportant à des expérimentations réalisées afin de satisfaire aux exigences du règlement. Or, il est sans incidence que les expérimentations animales aient été́ requises afin de permettre la commercialisation du produit dans des pays tiers.

La Cour précise en second lieu que bien que le droit de l’Union européenne n’établisse pas de distinction selon le pays où l’expérimentation animale a été réalisée, l’objectif du règlement est de promouvoir une utilisation des méthodes alternatives ne recourant pas aux tests sur les animaux pour assurer la sécurité des produits cosmétiques et qu’il serait donc contraire à cet objectif d’effectuer les expérimentations animales dans des pays tiers.

Ainsi, la Cour décide dans cette affaire que « la mise sur le marché de l’Union de produits cosmétiques dont certains ingrédients ont fait l’objet d’expérimentations animales hors de l’Union afin de permettre la commercialisation de ces produits dans des pays tiers peut être interdite si les données qui résultent de ces expérimentations sont utilisées pour prouver la sécurité des produits concernés aux fins de leur mise sur le marché de l’Union ».
La Cour précise que la mise sur le marché est uniquement interdite si les expérimentations animales ont été réalisées après les dates limites pour l’élimination progressive des différentes expérimentations.