La baie de Somme, vaste étendue estuarienne située au Nord de la Picardie, classée Grand site de France, est aujourd’hui en danger. En effet, on constate depuis de nombreuses années l’ensablement progressif de cette zone menaçant l’ensemble de son écosystème, de sa faune et de sa flore.

La baie de Somme est particulièrement réputée pour ses paysages extraordinaires, elle est classée parmi les plus belles baies au monde, comparée avec celles de San Francisco (Etats-Unis) ou encore d’Halong (Vietnam). Parmi ses joyaux, il est possible de citer la cité médiévale de Saint-Valéry-sur-Somme, ou encore le Crotoy avec son charmant et pittoresque port de pêche.

Cette baie est labélisée Grand Site de France. Ce label est décerné par le ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie dans le but de promouvoir la bonne conservation et la mise en valeur des sites naturels classées français. Cette règlementation a été intégrée au Code de l’environnement depuis la loi Grenelle 2 en date du 12 juillet 2010, portant engagement national pour l’environnement. Ce label repose sur plusieurs grandes valeurs :
- Protéger la biodiversité
- Proposer des aménagements respectueux de l’identité des lieux
- Garantir aux visiteurs un accueil de qualité
- Maintenir les activités traditionnelles et respecter le cadre de vie des habitants
- Valoriser les activités éco-responsables

Au-delà de ses paysages, la baie de Somme est un véritable refuge pour de nombreuses espèces animales. Parmi ces espèces se trouvent la plus grande colonie de phoques en France. Ces derniers sont de deux types : 400 phoques veaux marins et 100 phoques gris. On y trouve également plus de 300 espèces d’oiseaux migrateurs dont des échassiers, limicoles oiseaux d’eau, passereaux ou encore rapaces.

Cette extraordinaire biodiversité est cependant en danger et cela depuis de nombreuses années. Selon Patrick Triplet, directeur de la réserve nationale de la baie de Somme, « le changement existe depuis très longtemps, ça fait à peu près 1.000 ans qu’il y a un ensablement », «c’est une dynamique naturelle mais qui a été accélérée par les constructions de l’homme: la poldérisation (conquête des terres sur la mer grâce aux digues, ndlr) a diminué la surface de l’estuaire et la canalisation de la Somme a fait qu’on n’a plus d’effet de chasse sur l’ensemble de l’estuaire».

Cet ensablement a pour conséquence l’empiètement de prairies salées (appelée « mollières ») sur la baie. Selon Patrick Triplet, au début du XXème siècle, il y avait 40 hectares de végétation contre plus de 2000 aujourd’hui.

Face à cet ensablement des solutions sont envisagées, cependant ce ne sont que des actions ponctuelles. Par exemple, il est envisagé de limiter la progression de la spartine et donc la rétention des sédiments : cette lutte favorise les espèces pionnières comme les salicornes (exploitées et commercialisées), ce qui a des répercussions environnementales mais aussi économiques. La résilience du milieu (capacité à retrouver son état initial après perturbation) semble se faire relativement bien. En effet, la dernière espèce disparaissant avec l’installation de la spartine, est la première à réapparaître après élimination de cette plante envahissante. Il est également envisagé une dépoldérisation en remettant en eau les renclôtures (terrains gagnés sur la mer). Ceci a une vocation environnementale et un gain de fonctionnalité, notamment sur le rôle de nurserie de la baie pour les poissons. Une solution drastique est également envisagée et consisterait à retirer autant de sédiments qu’il n’en rentre (700 000 m3/an) mais les impacts seraient non négligeables sur le milieu et le devenir de ces sédiments ne serait pas réglé.

Des solutions ponctuelles qui, à long terme, n’empêcherons pas une disparition progressive de ce joyau de la France…