Dans cet Accord, en effet, les négociateurs ont introduit l’idée que le bon objectif, afin d’éviter un changement climatique dangereux pour les générations futures, serait de ne pas dépasser 2°C de plus que les températures non de la période 1951/1980 mais celle d’avant la Révolution industrielle – donc aux alentours de 1750 – et même de viser 1,5°C de plus seulement. Au point que le GIEC, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, doit remettre un rapport sur ce fameux 1,5°C d’ici 2018.

Lors de la Conférence de Paris, le groupe des pays les plus vulnérables aux changements climatiques, en particulier face à la menace de la montée du niveau marin, ont fait de cette formulation une condition sine qua non de leur signature en bas de l’accord.

Il est assez aisé d’en comprendre les raisons réelles. Il s’agit, pour les pays les plus démunis, les plus pauvres et les plus vulnérables, d’accélérer le moment où ils pourront dire « nous sommes affectés par le changement climatique dont les pays les premiers industrialisés sont les principaux responsables, donc vous nous devez réparation dès maintenant ». Dépasser une limite en température planétaire peut représenter une manière simple de graver ce moment dans le marbre. Or, si l’on se donne un objectif à ne pas dépasser trop « réaliste », cette frontière sera franchie plus tard. D’où l’insistance sur ce nouveau chiffre de 1,5°C.

Cependant même si l’Humanité s’éteignait, le résultat de son action passée réchauffera de 1,5°C l’indicateur choisi (la température à un mètre au dessus des sols et à la surface des océans) par rapport à la période pré-industrielle. Et cela en raison de deux phénomènes quantifiés par les spécialistes. D’une part le potentiel de réchauffement des gaz à effet de serre déjà émis est d’environ 0,3°C. D’autre part, si les hommes disparaissent, leurs émissions de particules réfléchissantes disparaissent aussi, or, elles refroidissent l’indicateur d’environ 0,3°C. Rien ne peut donc éviter à la planète d’atteindre ce niveau de changement climatique.

Il est donc curieux d’entendre régulièrement des responsables politiques ou des négociateurs de l’Accord de Paris persister à présenter cet objectif comme s’il était véritablement atteignable.
Les Etats ont apporté à la Conférence des « INDC » – Intended nationally determined contribution – qu’il est plus exact de traduire comme étant des « promesses ».
Ces promesses portent sur le principal – donc les émissions de gaz à effet de serre ou l’aide à apporter aux pays les plus pauvres. Quant aux contraintes, elles portent sur la déclaration des émissions (par exemple).

Si l’Accord de Paris est le meilleur qu’il était possible d’obtenir en 2015, en conclure que l’essentiel du chemin vers une atténuation du changement climatique en cours à un niveau « gérable » serait une erreur. Même si les « promesses » étaient tenues, la trajectoire des émissions qui en résulte sur la période considérée – jusqu’à 2030 – nous conduit au moins à 3°C de plus que les valeurs préindustrielles.
En outre les « promesses » de la plupart des pays pauvres sont faussement vertueuses puisqu’elles sont conditionnées par un niveau d’aide technologique et financier que les pays riches n’auront pas forcément l’intention d'accorder.