L’article L512-26 du code de l’environnement dispose que : "le projet d'arrêté statuant sur la demande est porté par le préfet à la connaissance du demandeur, auquel un délai de quinze jours est accordé pour présenter éventuellement ses observations par écrit au préfet, directement ou par mandataire. Le préfet statue dans les trois mois à compter du jour de réception par la préfecture du dossier de l'enquête transmis par le commissaire enquêteur. En cas d'impossibilité de statuer dans ce délai, le préfet, par arrêté motivé, fixe un nouveau délai". C’est donc sur cette base légale que le Préfet est en droit d’établir des arrêtés préfectoraux portant sursis à statuer sur une demande d’autorisation d’exploiter une installation classée présentée par le futur exploitant d’une ICPE.

La jurisprudence a pu décider que cette prorogation du délai d'instruction peut faire l'objet de décisions successives la renouvelant (CE, 26 avr. 1985, n° 39321, Comité défense de l'environnement de Freneuse), sans toutefois limiter ces décisions. Cette faculté de prorogation s'exerce sous le contrôle du juge, le préfet n'étant juridiquement fondé à prolonger le délai d'instruction que lorsque des motifs réels et sérieux l'imposent.

Ainsi, le préfet ayant prolongé, par des arrêtés successifs, le délai qui lui est imparti pour statuer, au seul motif qu'une décision ne peut être rendue dans les délais prescrits par la loi, n'a pas motivé suffisamment ses arrêtés en se bornant à énoncer cette considération d'ordre général, sans préciser les raisons de droit ou de fait qui s'opposaient à ce qu'il fût statué sur la demande dans le délai initialement prévu (CE 26 juill. 1982, n° 13009, Sté Jean Spada et CE 1er juill. 1988, n° 18020, Sté monégasque de location).
Ainsi, le pétitionnaire peut demander l’annulation des arrêtés préfectoraux de prorogation du délai d’instruction en invoquant l’insuffisance de motivation de ces décisions.

Cependant, il faut noter que le Conseil d'État a déjà jugé que “l'absence de motivation de l'arrêté préfectoral prolongeant le délai d'instruction de la demande d'autorisation est sans influence sur la légalité de la décision prise à l'issue du délai ainsi irrégulièrement prolongé” (CE, 2 mai 2007, MEDD, Coopérative agricole Le Dunois.)

Pour rappel, en droit des installations classées, le juge est doté de pouvoirs d'administrateur et a le pouvoir d’accorder lui-même l’autorisation refusée par l’administration, s’il estime que l’installation peut fonctionner sans atteinte excessive aux intérêts protégés par l’article L511-1 du Code de l’environnement (CE, 16 oct. 1958 "Ministre de l’Industrie et du Commerce c/ la Société Les Tanneries de la Seine").
Ainsi, dans une décision "Société Protiru", le tribunal administratif de Melun juge recevable le recours d'un exploitant contre un arrêté de prorogation préfectoral et la demande d'autorisation au juge-administrateur (TA Melun, 23 nov. 2000 Sté Protiru). Toutefois, la Cour Administrative d'Appel de Nancy retient la solution inverse, en jugeant que l'absence d'un refus implicite d'autorisation ne permet plus au juge administratif de recourir à ses pouvoirs de substitution (CAA Nancy, 5 févr. 1998, Sté ATEP). L’opportunité d’une telle action pour le futur exploitant reste donc encore incertaine.

Enfin, il est possible pour le pétitionnaire de demander la réparation de l'illégalité des arrêtés de prorogation à la durée abusive, à condition toutefois de démontrer qu’il a subi un préjudice direct et certain du fait d'un délai abusivement prolongé.