Le 30 juin 2016, un accord de la Commission, du Parlement et du Conseil Européen a été décidé et acté en faveur d’une interdiction pure et simple du chalutage en eaux profondes.

L’origine des négociations remonte à juillet 2012. La Commission propose alors que la technique de pêche industrielle du chalutage soit interdite au-delà d’une profondeur de 800 mètres dans l’ensemble des eaux européennes.

Plusieurs études ont démontré les ravages du chalutage en eaux profondes sur les écosystèmes et la biodiversité marine. En effet, cette technique fragilise les fonds marins, modifie l’habitat sous-marin empêchant ou ralentissant la reproduction de certaines espèces et touche des écosystèmes entiers, notamment les coraux. Des espèces se retrouvent en voie de disparition, c’est le cas des crevettes surexploitées qui sont à la base de la chaîne alimentaire. Leur déclin aurait donc des conséquences désastreuses sur d’autres espèces marines.

Outre les espèces vulnérables touchées et menacées par cette technique de pêche, le taux de gaspillage est très important. Selon une étude, 95% des poissons péchés sont jetés. Le chalutage en profondeur se résulte donc à une destruction des fonds marins, une menace de disparition pour de nombreuses espèces et un taux de gaspillage inacceptable.

Le principe d’interdiction du chalutage en profondeur dans les eaux européennes avait été rejeté par le Parlement Européen en décembre 2013. Et c’est le Luxembourg, qui assurait la présidence de l’Union Européenne jusqu’au 31 décembre 2015 qui a réinscrit l’interdiction de cette technique de pêche à l’agenda européen.

Par la suite, le Conseil Européen avait donné son accord le 6 novembre 2015, ce qui a permis l’ouverture des négociations en la matière. L’accord trouvé aujourd’hui entre la Commission, le Parlement et le Conseil définit les contours du règlement européen sur la pêche profonde avec comme principe une interdiction pure et simple.

Cette interdiction est une victoire pour les associations et les organisations non gouvernementales (ONG) de protection des océans. En effet, cela fait de longues années qu’elles se battent pour préserver les fonds marins de la pêche au chalut en eaux profondes et de ses filets maillants qui « mutilent » irréversiblement les abysses et leurs écosystèmes déjà sensibles et fragiles.

Outre le principe d’interdiction de la pêche au chalut au-delà de 800 mètres de profondeur, le règlement sur la pêche profonde crée un mécanisme juridiquement contraignant de fermeture des zones dès lors qu’elles abritent des écosystèmes vulnérables. La délimitation de ces zones se basera sur les cartographies des scientifiques. Ces dernières comprennent des prédictions sur l’état de vulnérabilité des écosystèmes compris dans ces zones en fonction des courants et de la topographie des fonds marins, une technique particulièrement fiable.

Le règlement impose également des observateurs embarqués à bord de 20% des navires afin de collecter des données (contre 8% en moyenne). Cela traduit donc un nouveau progrès vers la préservation et la protection des océans.

Cependant, l’avancée du texte est à modérer dans la mesure où la zone frappée par l’interdiction est réduite aux eaux de l’Union Européenne et à l’Atlantique du Centre-est. Elle ne touche donc pas l’Atlantique du Nord-est. Cela s’explique notamment par le « lobbying » intense de l’Espagne qui pêche surtout hors des eaux européennes et qui se retrouve alors hors de toute contrainte. D’où une nuance dans le succès de cette décision.

Néanmoins, un tel principe d’interdiction demeure un gage certain de protection de la biodiversité des océans. De plus, les fonds des eaux de l’Union Européenne et d’une partie de l’Atlantique s’ajoutent à une liste de zones dans le monde où la pêche profonde est interdite (par exemple, la Méditerranée ou encore, les eaux antarctiques internationales). A l’avenir, même les organisations régionales de gestion de la pêche pourraient entamer des négociations en faveur d’une interdiction dans l’Atlantique du Nord-ouest ou encore dans l’Atlantique du Nord-est.

Le règlement final devrait maintenant être adopté par le Parlement et le Conseil en novembre 2016 pour une application au plus tôt au 1er janvier 2017. A noter enfin qu’un tel principe d’interdiction pure et simple de pêche au-delà de 800 mètres dans les eaux européennes ouvre la voie et encourage l’Union Européenne à améliorer davantage la protection des écosystèmes marins profonds dans les eaux internationales. Restera alors à savoir si ce texte européen s’appliquera aux britanniques…