
Guide des clauses environnementales (I)
Par Guillaume JULIA
Avocat
GJA
guillaumejuliaavocat@gmail.com
Posté le: 21/01/2010 14:08
Au préalable, il convient de préciser que l'analyse et les exemples ci-dessous sont tirées d'une brève expérience et ne prétendent aucunement à l'exhaustivité. L'unique objectif étant ici d'alimenter la réflexion autour du sujet des clauses environnementales.
L'analyse révèle que la rédaction des clauses environnementales est fonction à la fois des intérêts de l'auteur de la clause (s'il s'agit de l'acquéreur d'un site par exemple ou au contraire s'il s'agit des intérêts du vendeur) (1) et du type de contrat (2) :
•1 Si votre client est acheteur ou vendeur.
Si votre client est vendeur, son intérêt sera de tenter de limiter au maximum sa responsabilité en éliminant autant que possible les clauses de représentations et de garanties ou à tout le moins en tentant d’en restreindre la portée (par exemple en apposant une limite temporelle, et/ou une limite normative etc.).
En revanche, si vous représenter les intérêts de l’acheteur, il conviendra de procéder de manière opposée, savoir, renforcer l’étendue de la responsabilité du vendeur en ajoutant des clauses de représentations ou de garanties à l’offre d’achat.
A titre d’illustration, l’Ademe (l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) conseille sur son site Internet à l’acheteur, qu’il soit une personne publique ou une personne privée, (http://www2.ademe.fr/servlet/KBaseShow?sort=-1&cid=17467&m=3&catid=17513) de suivre les 3 étapes ci-dessous :
« 1 - Identifier des informations de référence :
• quels sont les enjeux environnementaux du produit ?
• quelles sont les pistes d’améliorations environnementales envisageables ?
• existe-t-il des déclarations environnementales existantes (écolabels officiels, labels privées et auto-déclarations…) ?
2 - Prendre des décisions propres à son marché, qui dépendront :
• de sa connaissance de l’offre du marché (offres de produits répondant à telle caractéristique environnementale ou aux exigences d’un référentiel écologique),
• de sa connaissance des aspects économiques (risque de surcoût pour le volume d’achat envisagé),
• de la définition de ses besoins spécifiques,
• du niveau d’exigence environnementale à fixer dans un souci d’efficacité écologique.
3 - Rédiger des clauses environnementales dans les spécifications techniques et / ou dans les critères d’attribution :
Quelle que soit la voie choisie, indiquez dès les spécifications techniques et conditions d’exécution que vous recherchez un produit à impacts réduits sur l’environnement. Joignez le descriptif précis du référentiel (ou la référence normative) ou de la caractéristique et n’oubliez pas de mentionner « ou équivalents ».
• Intégration d’un référentiel ou d’une caractéristique environnementale dans les spécifications techniques et conditions d’exécution :
Vous pouvez par exemple indiquer : « Le produit demandé devra avoir des performances environnementales équivalentes à celles définies par le [référentiel]. Les candidats préciseront dans leur offre (sur le modèle du formulaire type joint au dossier de consultation) comment leur produit satisfait aux critères définis dans le [référentiel] ou équivalents. »
Cette décision est généralement prise dans les cas suivants : nombre suffisant de titulaires certifiés par rapport au référentiel ou d’offres potentielles, pas de surcoût significatif non justifié, choix d’en faire un élément incontournable du marché, …
o Exemple 1 : Achats de cahiers
« Les cahiers devront répondre aux exigences de l’écolabel NF-Environnement ou équivalent ».
o Exemple 2 : Achat de photocopieurs
« Les photocopieurs permettront de faire des tirages recto verso et devront consommer moins de X watts ».
X watts précise l’exigence en matière de consommation électrique, c’est la valeur limite maximale autorisée pour les photocopieurs recherchés.
• Intégration d’un référentiel ou d’une caractéristique environnementale dans les critères de choix des offres :
Vous pourrez alors indiquer dans les spécifications techniques et conditions d’exécution :
« Le produit doit être issu d’un processus de fabrication ayant des impacts réduits sur l’environnement au regard des critères figurant dans le [nom du référentiel]. Les candidats préciseront dans leur offre (sur le modèle du formulaire type joint au dossier de consultation) comment le processus de fabrication de leur produit se situe au regard des critères figurant dans le [référentiel] »
… et indiquez dans vos critères de choix :
« Performances environnementales (critère noté sur X points) : les candidats préciseront dans leur offre (sur le modèle du formulaire type joint au dossier de consultation) comment leur produit répond à l’exigence fixée dans le cahier des charges ».
Cette décision est généralement prise dans les cas suivants : nombre faible ou nul de titulaires certifiés par rapport au référentiel choisi ou d’offres potentielles, connaissance peu précise de l’offre, éventuel surcoût non maîtrisé, volonté d’inciter les candidats à améliorer leurs offres, …
Exemple : achat de papier recyclé
Spécifications techniques et conditions d’exécution :
« Au moins 50 % des fibres de bois composant le papier doivent être des fibres recyclées. Le caractère recyclé des fibres de bois s’entend au sens de celui décrit dans la norme ISO 14021 ».
Critères de choix des offres : Critère « Proportion (A) de fibres recyclées » (noté sur X points).
- Si : 50 % < A ≤ 60 %, points attribués = 1/6 X
- Si : 60 % < A ≤ 70 %, points attribués = 2/6 X
- Si : 70 % < A ≤ 80 %, points attribués = 3/6 X
- Si : 80 % < A ≤ 90 %, points attribués = 4/6 X
- Si : 90 % < A < 100 %, points attribués = 5/6 X
- Si : A = 100 %, points attribués = X.
Les candidats préciseront dans leur offre (sur le modèle du formulaire type joint au dossier de consultation) comment leur produit répond à l’exigence fixée dans le cahier des charges.
Des exemples précis sont à votre disposition dans le guide « Achat public éco-responsable : achats de papier » du GPEM : consultez-les !
En dehors de critères spécifiques de performance environnementale, il existe d’autres façons de traduire sa volonté de prise en compte de l’environnement. Ainsi, l’utilisation de critères de choix « habituels » (coût d’utilisation, valeur technique) peut également avoir une conséquence sur la qualité environnementale de l’offre.
Par exemple, prendre comme critère de jugement le « coût global » d’un équipement électrique, c’est-à-dire en y incluant son coût d’utilisation, c’est valoriser les équipements présentant les consommations électriques les plus faibles … économie et environnement allant ici clairement dans le même sens !
De même, tous les critères relatifs à la durée de vie des produits sont généralement synonymes de moindres impacts négatifs sur l’environnement : ils permettent, en faisant durer plus longtemps un produit, de diminuer globalement le nombre de produits nécessaires (et donc d’économiser des matières et énergies de fabrication et de limiter les quantités de déchets). »
•2 Les clauses environnementales seront également plus ou moins détaillées en fonction de la nature du contrat et de l'avancée du processus contractuel (offre d’achat, acceptation d’une offre, contrat de vente avec exclusion de garantie, contrat de bail etc.). En effet, compte tenu des spécificités propres tant au droit de la vente qu’à celui du bail, il convient nécessairement de prévoir des clauses adaptées à chacune de ces situations.
A) Par exemple, dans le cadre de la vente d’un site industriel en 2004 où l’acquéreur avait eu connaissance d’un certain niveau de pollution et où le vendeur continuait son activité classée sur le site – objet de la vente, il avait été conseillé au client désireux d’acquérir le site d’inclure dans la clause environnementale les éléments suivants :
• Un historique sur les activités exercées sur le site ;
• Le rappel des autorisations et/ou déclarations existantes, des incidents, et des interventions de l'Administration quant au statut de l’activité.
• Un inventaire des injonctions que l’Administration aurait pu prendre à l’encontre des différents exploitants présents ou ayant été présents sur le site, ainsi que les éléments permettant à l’acquéreur de vérifier l’exécution de ces injonctions par leurs destinataires, en sa qualité de dernier exploitant.
• L’énonciation de l'audit technique réalisé.
• L’engagement du vendeur-exploitant qu’il a respecté les législations auxquelles il est soumis et notamment les dispositions relatives à la cessation d’activité des installations classées pour la protection de l’environnement, ainsi que celles relatives aux déchets.
Dans cette perspective, la proposition de clause de garantie de passif environnemental fut rédigée comme suit :
« L’acquéreur reconnaît avoir été averti dans les conditions prévues par la loi, de l'activité exercée par le vendeur sur le terrain, objet des présentes, et des risques de pollution, ainsi que des pollutions avérées, résultant de l'exercice de cette activité, notamment des risques de pollution du sous-sol et des eaux souterraines et d'une façon générale des dangers ou inconvénients importants résultant de l'exploitation. Dès lors, l'acquéreur ne saurait se prévaloir des dispositions du second alinéa de l'article L. 514-20 du Code de l’environnement.
Il est en outre convenu, à titre de conditions essentielles et déterminantes du présent contrat ce qui suit :
Le vendeur déclare qu'il a respecté les réglementations en vigueur à l'époque où il exerçait son activité industrielle.
Le vendeur s'oblige à effectuer, selon les règles de l'art et dans les conditions sus-énoncées, les travaux qui seront ou pourront être à sa charge et à procéder à toutes les démarches auprès des administrations compétentes pour obtenir, le cas échéant le procès-verbal de récolement valant conformité.
En l’état, le vendeur s’engage à conserver les piézomètres installés sur le site objet des présentes par la Société X, dans le cadre des rapports précités.
Si l’un de ces piézomètres venait à être détruit ou détérioré, le vendeur s’engage à faire réinstaller de nouveaux piézomètres, au même endroit.
Le vendeur, dernier exploitant, supportera seule la charge financière de tous travaux de dépollution du sol et du sous-sol et des eaux (souterraines ou superficielles) qui pourraient être ultérieurement prescrits par l'autorité administrative, et ce, notamment en cas de cessation d’activité.
L'acquéreur prend acte de cet engagement et s'oblige à notifier au vendeur, dans le délai de 15 jours de leur réception, tous arrêtés (et plus largement toutes notifications) qui lui seraient délivrés et copie de toute correspondance aux administrations compétentes : la santé pour tout problème aux seules questions de la pollution du sol et des eaux ainsi que copie de la réponse de celle-ci et ce, à titre de simple information.
Le vendeur s'oblige, en sa qualité de dernier exploitant, vis-à-vis de l'acquéreur et de tout ayant cause de ce dernier, à assumer vis-à-vis de tout tiers toutes les conséquences matérielles et financières résultant d'un recours quelconque au titre de la pollution du terrain.
L'acquéreur s'oblige vis-à-vis du vendeur à l'informer dans les délais les plus brefs de toutes mises en demeure ou de tous recours qui seraient portés à sa connaissance. Le vendeur garantit l’acquéreur de tous recours ou mise en demeure.
Le vendeur s’engage de son côté à informer au moins trois mois à l’avance l’acquéreur, dans les meilleurs délais, par lettre recommandée avec accusé de réception, de toute modification de son siège social, ou de la cessation de son activité industrielle ou de laboratoire.
L’acquéreur s’engage à garder ces informations confidentielles, excepté à l’égard de l’administration compétente en matière d’installation classée.»
Cette dernière clause est justifiée par le fait que l’administration n’a un pouvoir d’injonction que pour autant que le dernier exploitant soit encore présent sur le territoire français.
B) Dans la même affaire, il avait été proposé d’insérer la clause suivante dans un contrat de bail pour un site industriel.
« Le preneur déclare qu’une installation classée soumise à déclaration est exploitée sur le site pris à bail. Cette activité peut se révéler potentiellement polluante et affecter les sols, sous-sols et eaux souterraines.
Cette activité a été recensée dans la nomenclature des installations classées sous le (ou les) numéro(s) suivants [à compléter].
Elle a fait l’objet d’un (ou d’) arrêté(s) préfectoral(aux) en date du [à compléter].
Partant, il est convenu, à titre de condition essentielle et déterminante de l’engagement du bailleur, ce qu’accepte expressément le preneur :
Le preneur assumera la charge, dans le strict respect de la législation applicable à l’activité décrite ci-dessus, tant de celle qui est actuellement en vigueur et que de ses éventuelles modifications et notamment celle relative à l’élimination des déchets,
Le preneur sera considéré comme le détenteur des déchets produits par son activité et renonce à tout recours contre le bailleur à cet égard, s’engageant à l’inverse, à le mettre hors de cause afin qu’il ne puisse jamais être impliqué en cas de vente de l’immeuble,
Toutes les dépenses résultant de l’application de tous les lois et règlements - actuels et futurs – et d’une façon générale, de l’activité du preneur, seront à la charge du preneur ou de ses ayants droit.
En cas de résolution ou résiliation du bail, pour quelque cause que ce soit, il sera procédé à une expertise afin de connaître l’état du sol et ce, aux frais exclusifs du preneur.
Tous les frais de décontamination et de remise en état du sol, du sous-sol et des eaux souterraines seront à la charge du preneur.
Tous les frais et honoraires que le bailleur serait amené à engager au titre de ce qui vient d’être exposé au présent article et pour le respect des conditions y exposées ainsi que toute consignation à laquelle serait assujetti le bailleur, constitueront une charge du preneur.
Le bailleur ne pourra jamais être recherché en raison de dommages causés à autrui, du fait de l’activité exercée par le preneur.
Le preneur s’engage à informer le bailleur, dans les meilleurs délais, de tout incident, accident ou injonction faite à lui par l’administration, dans le cadre de l’activité décrite ci-dessus.
Le preneur s’engage à informer le bailleur de toute modification qu’il entendrait apporter à son activité.
Cela étant, le preneur fera son affaire personnelle de l’obtention de toute autorisation ainsi que de l’exécution de toute obligation résultant de son activité.
Le preneur s’engage à souscrire une police d’assurance couvrant les risques de pollution, à maintenir cette police pendant toute la durée du bail et à en justifier au bailleur à première demande de ce dernier.
Le preneur renonce à se prévaloir des dispositions de l’article 1721 du Code civil.
A cet égard, le preneur reconnaît avoir été informé des pollutions constatées par la Société X, en date [à compléter] et s’engage à n’exercer aucun recours du fait de ces pollutions ou de leur aggravation ultérieure éventuelle.
Le preneur s’engage à conserver tous les piézomètres installés par la Société X, à l’occasion des rapport précités.
Si l’un de ces piézomètres venait à être détruit ou détérioré, le vendeur s’engage à faire réinstaller de nouveaux piézomètres, au même endroit.
En outre, le preneur s’engage à effectuer une surveillance régulière du site objet du présent bail. Il en rendra compte au bailleur tous les six mois.
Le preneur s’engage à informer le bailleur, dans les meilleurs délais, par lettre recommandée avec accusé de réception, de toute modification de son siège social.
Le bailleur s’engage à garder ces informations confidentielles, excepté à l’égard de l’administration compétente en matière d’installation classée.
Les dispositions qui précèdent seront applicables à tous les preneurs successifs du site ».
Dans un projet de vente, un projet clause environnementale pourrait contenir les dispositions suivantes :
« Les parties reconnaissent avoir été informées des dispositions de l’article L. 514-20 du code de l’Environnement ci-après énoncées : (reprendre les dispositions du texte)
En application de ces dispositions, le Vendeur informe l’Acquéreur qu’une aire de stockage et de distribution de gaz, aujourd’hui démantelée, a été exploitée sur le terrain objet des présentes.
Le Vendeur indique à l’Acquéreur qu’un local compresseur ainsi qu’une aire de stockage de déchets industriels banals sont encore en place sur le terrain, objet des présentes.
L’Acquéreur déclare avoir pris connaissance :
– de l’étude en date du [à compléter], annexée aux présentes, par laquelle la société X a réalisé un diagnostic préalable de l’ensemble du site, appartenant au Vendeur, situé [à compléter] ;
– de l’étude en date du [à compléter] portant spécifiquement sur le terrain objet des présentes et annexée aux présentes, par laquelle la société X d’une part, conclut à la présence au voisinage de l’ancienne cuve de substances très largement inférieures aux valeurs guides utilisées et, d’autre part, constate l’existence autour de l’ancien compresseur de traces [à compléter] sur le dallage en béton ;
– de l’étude en date du[à compléter] portant spécifiquement sur le terrain objet des présentes et annexée aux présentes, par laquelle la société X confirme, au vu des résultats des investigations complémentaires effectuées, les conclusions de son précèdent rapport en date du [à compléter] et précise, en ce qui concerne l’état de pollution du sol et du sous-sol du terrain objet des présentes, qu’aucune pollution significative n’a pu en particulier être constatée au droit et à proximité de l’aire de stockage et de distribution de gaz, du local compresseur ainsi que de l’aire de stockage de déchets industriels banals susvisés.
L’Acquéreur reconnaît avoir eu une parfaite connaissance, préalablement à la signature des présentes, des trois études précitées et déclare être lui-même propriétaire de terrains voisins, occupés autrefois par des dépôts de produits pétroliers.
L’Acquéreur accepte le terrain, objet des présentes, dans l’état où il se trouve à la date de signature du présent acte. L’Acquéreur renonce à tout recours contre le Vendeur du fait de pollutions passées, actuelles ou futures ».