Le Roundup est le désherbant le plus utilisé au monde. Il est composé de glyphosate (N-(phosphonomethyl) glycine), un herbicide systémique à large spectre qui bloque un enzyme dont la plante a besoin pour fabriquer des acides aminés et des protéines.

Les propriétés herbicides de ce produit ont été brevetées par Monsanto dans les années 70, qui vend près de la moitié des herbicides à base de glyphosate commercialisés dans le monde. La société américaine Monsanto est spécialisée dans les biotechnologies agricoles et est, depuis près de 100 ans, le numéro 1 mondial sur le marché des semences et le premier fournisseur d’évènements de transformation génétique utilisés dans la production d’OGM.

Le glyphosate est utilisé à grande échelle par les agriculteurs pour nettoyer les champs ou encore pour faire sécher les plantes récoltées (colza, maïs, tournesol…). Elle est également utilisés par les particuliers, puisque vendu dans les grandes surfaces ou les jardineries. En France, cette substance « phytosanitaire » est la plus vendue entre 2008 et 2011.

Pourtant, en lisant la fiche toxicologique du glyphosate, présente sur le site de l’Institut National de Recherche et de Sécurité, il est indiqué dans les dangers que cette substance « provoque des lésions oculaires graves », et est « toxique pour les organismes aquatiques, entraîne des effets néfastes à long terme ».

On peut donc se demander si ce produit, semble-t-il dangereux pour la santé et l'environnement, devrait être interdit par application du principe de précaution.

En effet, il ressort d’une étude du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), une agence de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), publiée en mars 2015 que le glyphosate est classé dans la catégorie des « cancérogènes probables », estimant que l'exposition au glyphosate et le développement de cancers sont liés.

Cependant, les effets néfastes du produit ne font pas l’objet d’un consensus scientifique puisque le 17 mai 2016, alors que la Commission Européenne doit se prononcer sur un renouvellement de l’autorisation d’utiliser le Roundup ou de son interdiction le 18 mai 2016, l’OMS publie, après une nouvelle expertise, qu’il est « peu probable » que l’exposition alimentaire au glyphosate soit cancérogène. Une annonce qui fait bondir les associations de défense de l’environnement, souhaitant le retrait du produit sur le marché.

Le principe de précaution peut-il faire obstacle au principe de libre circulation des marchandises ?

La libre circulation des marchandises est l'une des quatre libertés fondamentales sur lesquelles repose le marché unique. Elle repose sur la suppression des droits de douane et l'interdiction de restrictions quantitatives aux échanges. Seule la protection de la santé, de l'environnement et des consommateurs peut justifier que ces barrières aux échanges de marchandises à l'intérieur de l'Union Européenne soient rétablies.

Le principe de précaution est quant à lui apparu pour la première fois en Allemagne à la fin des années 1960. Il a été introduit au niveau communautaire par le Traité de Maastricht en 1992 à l’article 174 sans en donner de définition précise. La jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne considère, cependant, que le principe de précaution ne doit pas être motivé par une approche purement hypothétique fondé sur de simples suppositions, l’existence et la portée du risque doivent être scientifiquement démontrées. Le risque doit être suffisamment documenté sur la base des données scientifiques disponibles au moment des faits (CJCE 05/02/2004, C-24/00).

En droit interne, le principe de précaution a été transposé à l’article L110-1 du Code de l’Environnement. Il est également présent à l’article 5 de la Charte de l’Environnement, conférant à ce principe une valeur constitutionnelle. Cet article indique que « Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. ». En droit interne le principe de précaution peut être mise en œuvre en l’absence de certitudes scientifique, ce qui semble être plus protecteur de l’environnement et de la santé publique.

La Commission européenne, pour trancher sur l’autorisation ou l’interdiction du Roundup, va devoir déterminer si le Roundup, produit dont les effets nocifs sur la santé et l’environnement ne font pas l’objet d’un consensus scientifique, doit être retiré du marché en application du principe de précaution.

La protection de la santé, de l'environnement et des consommateurs justifie-t-elle que des barrières aux échanges de marchandises, et donc au principe de libre circulation des marchandises, à l'intérieur de l'Union Européenne soient rétablies ?