Le mercredi 24 juin 2015, la justice néerlandaise a condamné l’Etat Néerlandais pour l’obliger à réduire ses émissions de gaz à effet de serre dans le pays d’au moins 25% d’ici 2020, une décision qui a donné droit à l’ONG de défense de l’environnement URGENDA.
Une décision historique car c’est la première fois qu’un Gouvernement fut condamnée dans ce domaine, l’Etat Néerlandais doit relever ses ambitions climatiques.
Pour cela, les juges se sont fondés notamment sur le devoir de vigilance des Etats face au réchauffement climatique et le concept de « responsabilité commune mais différenciée » des Etats, un concept au cœur des négociations onusiennes sur le climat.

Un mouvement de justice environnementale qui depuis, se poursuit.

En mars 2016, la justice Néerlandaise se positionne sur le terrain du trafic de bois illégal, une criminalité environnementale qui ne cesse d’augmenter ces dernières années.

Au préalable et afin de se rendre compte de l’importance de ce crime parfois peu connu, il existe onze situations où le bois est considéré comme étant illégal :
1. les coupes de bois sont faites sans permis
2. la concession d’origine a été obtenue de manière illégale
3. les volumes coupés sont supérieurs aux volumes déclarés à l’administration locale
4. les arbres ont été coupés avant l’âge auquel ils doivent être coupé suivant les lois nationales
5. les taxes ne sont pas payées
6. les droits des populations ne sont pas respectés
7. les espèces sont interdites à l’exportation (CITES)
8. les espèces sont protégées par la loi nationale ou proviennent de zones protégées
9. les grumes de bois ne sont pas marquées ou marquées de manière frauduleuse
10. le bois a été coupé en dehors d’une concession forestière accréditée par les autorités administratives
11. les papiers attestant de la légalité du bois ont été falsifiés

Le 9 mars exactement, la NVWA, l’autorité administrative néerlandaise chargée de faire appliquer la réglementation sur le bois au Pays Bas, a imposé pour la première fois, des sanctions envers une société privé, la société Fibois BV, pour violation du règlement sur le bois de l’Union Européenne (RBUE), entrée en vigueur depuis mars 2013.
Elle fonde notamment cette décision sur le manquement de cette entreprise privé a son obligation de « diligence raisonnée », une obligation inscrite dans le RBUE et qui exige des importateurs de bois de prouver avoir tout mis en œuvre pour minimiser les risques d’illégalité. Une preuve qu’ils peuvent apporter notamment en documentant de façon précise leurs importations et en identifiant les possibles risques d’import de bois illégal en fonction des régions d’importations.
Dans le même temps, les Pays-Bas ont infligé à cette même société, une amende conditionnelle de 1800 € par m3 de bois qui serait mis sur le marché, tant que cette dernière ne serait pas en conformité avec cette obligation européenne de « diligence raisonnée ».

La création de ce délit de manquement à l’obligation de « diligence raisonnée » permet donc de sanctionner pénalement des entreprises peu assidues à des procédures de contrôles internes sur leurs importations. Indirectement, cela permet également de mettre à mal les vendeurs de ces bois illégaux, et donc de diminuer l’économie de ces trafiquants peu scrupuleux qui détruisent la biodiversité, mais également provoquent de nombreux crimes parallèles.

Suite à cette affaire, dans un communiqué de presse, les autorités néerlandaises ont énoncé qu’ « en raison de la situation politique dans le Bassin du Congo, le bois du Cameroun ne peut être mis sur le marché si l’importateur n’a pas pris des mesures suffisantes pour s’assurer que le risque que le bois soit récolté illégalement soit négligeable ».

Grace à cette prise de conscience, les autorités Néerlandaises ont renforcé leurs lois forestières en obligeant les entreprises importatrices à respecter le principe de « diligence raisonnée » sous peine d’amendes, fondement de la condamnation de la société Fibois BV.
Mais également, des contrôles administratifs importants ont été réalisés, et sur 150 sociétés contrôlées, près de 25% n’étaient pas en règle avec le système actuel. Un délai de 6 mois leur a été accordé pour se mettre en conformité. Un délai dont la société Fibois BV, elle, n’a pas bénéficié.

Sur ce terrain, Meike Rijksen, chargé des campagnes-forêts à Greenpeace Pays-Bas, déclare qu’ « en sa qualité de président actuel du Conseil de l’Union Européenne, les Pays-Bas peuvent contribuer à mettre un terme au commerce de bois illégal en Europe ».
Au nom de l’ONG, il appelle le Gouvernement Néerlandais à exiger un réel engagement politique des Etats membres, en sorte que les entreprises européennes suivent la réglementation et gardent le bois illégal en dehors du marché.
Une mise en œuvre uniforme et efficace de la législation Européenne est d’une importance capitale pour cette criminalité environnementale.

Le déclenchement de cette procédure envers cette société Néerlandaise, fait suite à une enquête de l’ONG GREENPEACE sur le commerce de bois illégal qui a mis en lumière la controversée société Camerounaise CCT, qui commercialiserait du bois provenance d’exploitations forestières ayant des pratiques illégales.
L’ONG a donc tracé du bois illégal vendu par cette société, au sein des Pays-Bas, mais également au sein d’autres pays de l’Union, tels que l’Allemagne, la Belgique ou l’Espagne. Autant de pays où Greenpeace plaident pour que des procédures similaires à la procédure néerlandaises soient enclenchées.

Le commerce de bois illégal est mondialisé et difficile à démontrer en raison de son caractère occulte, et surtout de la « supply chain » qui est très longue. Pour le mobilier, le bois est la plupart du temps récoltés dans différents pays et assemblés via des chaines d’approvisionnement complexes. Puis, les différentes parties de meubles arrivent à un endroit donné et sont montés. Le producteur final a donc un important travail d’investigation pour s’assurer que toutes les parties qu’il reçoit ne proviennent pas de bois illégal.

En France, une procédure similaire a été engagée en février 2016 par une association française, sur le fondement du manquement à la diligence raisonnée. La procédure est toujours en cours.

Sur ce terrain de l’importation illégale de bois, l’ONG Global Witness classe la France au 3ème rang des importateurs européens de bois « à haut risque d’illégalité », et notre pays serait le 1er importateur européen de bois Brésilien, un pays où la déforestation illégale est repartie à la hausse depuis 2013.
La responsabilité des pays européen est donc avérée. Car certes c’est aux entreprises privées d’importation de s’assurer de l’origine et de la traçabilité du bois acheté, ainsi que d’étudier sérieusement la possibilité de fraude de leurs marchandises. Toutefois, il est du devoir des Etats de fixer les sanctions et de les appliquer concrètement.
Or en Europe, malgré le Règlement sur le Bois du 20 octobre 2010, applicable depuis le 3 mars 2013, les choses n’ont pas l’air d’évoluer.

Toutefois, les atteintes environnementales, économiques et sociales de cette criminalité organisée, elles, se font de plus en plus ressentir. Comme au Congo, où plus de 200 gardes forestiers du parc naturel des Virungas ont été tué ces dernières années par des milices organisant un commerce de charbon de bois, un commerce qui rapporterait environ près de 28 millions de dollars.
Où au Brésil, où le 18 novembre 2011, le chef guarani, Nisio Gomes, a été assassiné pour avoir osé retourner avec 60 membres de sa tribu sur leurs Terre ancestrales du Mato Grosso, un espace forestier dorénavant dévasté et d’où ils ont été expulsé par des éleveurs de bétail qui ont tout rasé.

En France et en Europe, nous ne ressentons pas directement les conséquences de cette criminalité environnementale qu’est le trafic de bois illégal. Toutefois, les mobilisations juridiques sont possibles, comme l’application plus stricte du règlement sur le bois, ou l’imposition légale d’étiquette prouvant l’origine du pays du bois, ou encore la création de normes ou de labels prouvant que le bois a été coupé en suivant un schéma global de développement durable des forêts, etc.

En conclusion, la justice environnementale se développe. Les Pays-Bas institue un mouvement qui, on l’espère, sera suivi au sein de toute l’Union Européenne.
Les juges français sont également de plus en plus sensibilisé au droit de l’environnement, et prennent davantage en compte les enjeux de ce pan du droit qui est voué à se développer dans les années à venir.
Par conséquent, à quant la mise en place en France d’un tribunal spécialisé ?