Dans un arrêt n°380344 du 3 février 2016, le Conseil d'État juge que l'exploitant d'une Installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE) peut faire l'objet simultanément de poursuites pénales et de mesures administratives.

En l'espèce, un entrepôt de stockage de produits phytosanitaires à usage agricole exploité par la société Top sur le territoire de la commune de Villers-Bretonneux a fait l'objet d'une perquisition. Son représentant légal a été placé en garde à vue dans le cadre d'une enquête judiciaire relative à un trafic de produits toxiques non autorisés.
L'inspecteur des installations classées suite à sa visite, a dressé un procès verbal de plusieurs infractions dont celle d'exploitation sans titre d'une ICPE.
Des mesures administratives ont été prises conformément à l'article L171-7 du Code de l'environnement. Les articles L. 514-9 et suivants du code de l'environnement instaurent différentes infractions susceptibles de sanctions pénales à raison de l'exploitation sans titre d'une installation classée pour la protection de l'environnement ou de la méconnaissance des décisions de l'autorité préfectorale destinées à faire cesser une telle situation.
Le préfet de la Somme a pris plusieurs arrêtés par lesquels il a notamment mis en demeure la société Top de régulariser sa situation et de déposer un dossier de demande d'autorisation au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement. Le préfet a suspendu son activité et lui a imposé des prescriptions tendant à l'évacuation de produits dangereux stockés sur le site. La société et son représentant ont été mis en examen pour plusieurs chef d'infraction pénale à la législation sur les ICPE. Par un arrêt du 4 mai 2005 la cour d'appel d'Amiens a prononcé la relaxe de la société Top et de son représentant légal.
La société et son représentant ont saisi la Cour administrative d'appel d'une demande d'indemnisation des préjudices subis du fait de l'irrégularité des arrêtés préfectoraux pris. La Cour administrative d'appel a jugé que la légalité des arrêtés préfectoraux n'était pas subordonnée à la condition que les faits qui leur servent de fondement soient constitutifs d'une infraction pénale.
La société et son représentant légal ont formé un pourvoi devant le Conseil d'État, estimant que l'arrêt ainsi rendu était entaché d'une erreur de droit.
Le Conseil d'État rejette le pourvoi et considère que "Le préfet peut, en application des dispositions de l'article L. 514-2 du code de l'environnement, prendre les mesures prévues en cas d'exploitation sans titre d'une installation classée pour la protection de l'environnement, indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées en raison des infractions pénales susceptibles de résulter des mêmes faits".
Le Conseil d'État précise que la légalité des décisions préfectorales prises sur le fondement d'une exploitation sans titre d'une ICPE n'est pas subordonnée à la condition que les faits sur lesquels elles sont fondées soient constitutifs d'une des infractions pénales prévues par les article L514-9 du Code de l'environnement. Il en résulte en l'espèce, que la relaxe de l'exploitant dans le cadre du procès pénal n'a pas d'incidence sur la légalité des arrêtés préfectoraux.