Pour accompagner la transposition de la directive 2013/59/Euratom du 5 décembre 2013, il a été demandé à Pierre Barbey, maître de conférences en biologie cellulaire à l'Université de Caen-Normandie, et Dr Christine Gaudron de rédiger le livre blanc intitulé ''Surveillance radiologique des expositions des travailleurs''.

Ce livre blanc a été remis à la Direction Générale du Travail et publié le 15 septembre 2015. Il est issu de la collaboration d’un groupe de travail créé en 2013 par la Direction Générale du Travail (DGT), l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Ce groupe de travail pluridisciplinaire était composé d’experts, de partenaires sociaux, de professionnels concernés, de représentants des institutions et administrations concernées.

L’objectif de ce livre est d’« identifier les axes d'amélioration et de simplification du dispositif réglementaire de surveillance radiologique des travailleurs ».

Le bilan fait à l’issue du livre blanc est l’hétérogénéité de l’exécution des mesures de prévention par les employeurs en fonction des secteurs d’activités et des entreprises. La conséquence ce sont les travailleurs qui l’a subisse ; ils souffrent de conditions inégales de protection contre les rayonnements ionisants. Les moins bien lotis, sont les intérimaires et notamment les intérimaires des sous-traitants.

Les travailleurs à employeurs multiples ne disposent pas des mêmes garanties que les autres travailleurs dans la mesure où ils sont suivis par différents PCR sans réelle harmonisation. Pour ces travailleurs, il est à déplorer l’insuffisance de rigueur concernant le respect de la valeur limite de dose et de la traçabilité de l’ensemble des expositions.

Il est aussi recommandé le changement de la terminologie de « travailleur exposé » au profit de « travailleurs soumis à un risque rayonnement ionisant » pour englober l’ensemble des travailleurs.

Les auteurs du livre blanc préconisent une meilleure adéquation de la réglementation relative à la radioprotection avec celle concernant les autres risques afin de contribuer à l’harmonisation de la protection des travailleurs. Pour cela, il faut suivre une approche globale des risques auxquels les travailleurs sont susceptibles d’être exposés, approche pouvant être déclinée en fonction du secteur d’activité.

Une mesure d’application proposée est la surveillance des travailleurs à partir du moment où l’évaluation des risques signale un risque radiologique non négligeable. Elle est accompagnée d’un concept celui de la « valeur d’exposition déclenchant une action de prévention renforcée » (VDA). Cette valeur servira de curseur dans la mise en œuvre de la prévention des risques. En dessous de cette valeur, les dispositions générales de prévention des risques seront appliquées au travailleur. Au dessus, le travailleur sera catégorisé en catégorie A ou B.

Au niveau des acteurs de la radioprotection, la personne compétente en radioprotection est concernée. Il est souhaité que soit élargie les informations à sa disposition liées à la dosimétrie pour renforcer sa réactivité et son rôle de prévention. A ce jour les personnes compétentes en radioprotection n’ont accès qu’à la dosimétrie opérationnelle des travailleurs dont elles assurent le suivi. Il y a donc par cette réflexion la volonté d’étendre l’accès aux données de la dosimétrie passive, qui aujourd’hui ne sont accessibles qu’au travailleur pour ses propres résultats, au médecin du travail et à l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) à travers la base de données Système d'Information de la Surveillance de l'Exposition aux Rayonnements Ionisants (SISERI).

Le livre blanc insiste sur la collaboration de tous les acteurs de la protection des travailleurs : le médecin au sein des services de santé du travail, le service compétent en radioprotection lorsqu’il existe plus de deux personnes compétentes en radioprotection dans une entreprise. Concernant ces dernières, il est préconisé qu’elles intègrent le Comité d'Hygiène et de Sécurité et des Conditions de travail (CHSCT) en tant que membre consultatif.

La portée du livre blanc reste encore à déterminer dans la mesure où le Gouvernement doit encore décider de la place qu’auront les remarques et axes d’amélioration, intégrés dans le livre blanc, pour la transposition de la directive Euratom en droit interne. Pour l’instant, il faut attendre le 30 septembre pour disposer des résultats de la consultation du public sur le projet d’ordonnance portant diverses dispositions en matière nucléaire, dont l’objectif est la transposition des dispositions de nature législative de la directive. Autrement dit, le code du travail va subir un nouveau rafraîchissement dans son volet radioprotection, d’autres textes d’applications relatifs à la radioprotection des travailleurs seront mis à jour.