Lors d’une cession partielle ou totale d’une société exploitante d’activités polluantes, le cessionnaire détient le contrôle d’une société à laquelle est attaché un risque environnemental. Il y a plusieurs moyens de restructurer une société : la fusion, la scission et l’apport partiel d’actif.

Une fusion peut faire disparaître une société au profit de la société absorbante ou créer une nouvelle entité. Elle est à l’origine d’une transmission universelle du patrimoine, donc l’ensemble du patrimoine est transmis, le passif et l’actif. Cependant, une telle restructuration ne permet pas aux actionnaires ou aux associés de se protéger contre passif environnemental présent, puisque la fusion fait rentrer au patrimoine de la société absorbante le passif de la société absorbée.

La scission permet à la société de se scinder en deux entités nouvelles. Cette restructuration passe aussi par une transmission universelle de patrimoine : chaque entité sera dotée d’un patrimoine composé d’un actif et d’un passif. Les actionnaires ou associés pourront détenir des actions ou parts sociales dans les deux entités.
Cette restructuration permettrait au cessionnaire de détenir soit des actions dans les deux sociétés, soit dans l’une des deux sociétés. Cette solution peut lui permettre une protection de son investissement.
Par exemple, dans le cas d’une société de production de produits pharmaceutiques, elle est composée de plusieurs activités : des laboratoires pharmaceutiques et des activités chimiques. Les activités chimiques sont très polluantes et dans le cadre de la cession de cette société, de ces exploitations pourra découler un passif environnemental très important impactant l’investissement du cessionnaire. Dans ce cas, la scission de cette société en deux sociétés nouvelles, l’une regroupant les laboratoires et l’autre regroupant les activités chimiques, pourrait garantir une certaine valeur de l’investissement : le cessionnaire pourrait ne détenir d’action que dans la société pharmaceutique et ainsi supprimer le risque environnemental qu’une activité chimique engendre, ou détenir des actions dans les deux sociétés et garantir une partie de son investissement par la sécurité des actions détenues dans la société exploitante de l’activité pharmaceutique.
Cette restructuration pourrait être une solution possible pour que le cessionnaire sécurise la valeur de ses titres, ou du moins une partie.

L’apport partiel d’actif, à la différence de la scission, ne fait pas disparaître la première société. Elle transmet une partie de son patrimoine à une autre entreprise par une transmission universelle. Pour reprendre l’exemple développé plus haut, la société se sépare de ses activités polluantes en créant une nouvelle société dont elle détient la totalité des actions ou des parts sociales. La société de départ deviendra la mère de la société crée. Donc le cessionnaire détiendra le contrôle de la société mère qui elle-même détient les actions de la société fille. Ce moyen permet au cessionnaire de se débarrasser du risque environnemental issu du passif de la société exploitante des activités chimiques.
En effet, la loi du 3 août 2009 a tenté de mettre en place un régime de responsabilité de plein droit des sociétés mères à l’égard de leur filiale en matière environnementale. Cependant, le principe d’indépendance et d’autonomie des sociétés du groupe s’applique, et les mères ne peuvent pas être tenues des dettes et des obligations des filles. La seule exception issue de la loi Grenelle II concerne les dettes prises en charge volontairement par la société mère. Donc cette technique de filialisation pourrait protéger parfaitement le cessionnaire contre risque environnemental de la société cédée, puisque par ce moyen, la société fille sera seule concernée par les dettes comptabilisées à son passif environnemental. Si le passif est trop lourd, la société mère ne sera pas tenue du remboursement des dettes et la société fille se mettra en liquidation judiciaire.
La filialisation permet donc au cessionnaire de déplacer le passif environnemental dangereux issu d’activités polluantes. Cependant, cette restructuration a tout de même un coût. En effet, le juge du fond considère que la filialisation est abusive si la société mère n’a pas donné à la fille les moyens suffisants pour faire face aux difficultés d’une activité déficitaire à sa filiale: cela peut être considéré comme une faute d’imprudence ou de négligence de la part de la société mère. La société Rodia par exemple a reproché à la société Sanofi de lui avoir transférer une activité comportant un important passif environnemental sans l’avoir dotée d’actifs suffisants. Or la Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel au motif que l’actif transféré à la société fille était suffisant.

Donc le cessionnaire gère le risque environnemental en anticipant les conséquences désastreuses qui apparaitront du fait d’activités dangereuses. La filialisation se fait par un apport partiel d’actif qui impacte le patrimoine de la société mère, mais cet impact est réduit par rapport à l’impact issu de la remise en état d’activités polluées. Cette restructuration n’est ni abusive, ni fautive et permet au cessionnaire de limiter l’impact du passif environnemental.