Le détenteur de déchets est défini par la Cour de cassationconformément à l’article 1er de la directive CEE 75-442 du 15 juillet 1975 comme « le producteur des déchets ou la personne physique ou morale qui a les déchets en sa possession ».
Toutefois, cette décision demeure imprécise en ce qu’elle n’indique pas si le propriétaire du site peut entrer dans cette catégorie.
La Cour de Cassation, à l’instar du Conseil d’Etat, regardent le propriétaire du terrain comme un « détenteur » potentiel des déchets au sens de l’article L. 541-2 précité (I), la loi ALUR est venu confortée cette interprétation (II)

I. Le propriétaire du terrain, un détenteur éventuel

La définition du propriétaire négligent a été construite et évolué de façon prétorienne.
En effet, dans un arrêt rendu par le Conseil d’Etat en date du 26 juillet 2011 (n° 328651) dit Wattelez II, le Conseil d'Etat a affirmé que « le propriétaire du terrain sur lequel ont été entreposés des déchets peut, en l'absence de détenteur connu de ces déchets, être regardé comme leur détenteur au sens de l'article L. 541-2 du code de l'environnement, notamment s'il a fait preuve de négligence à l'égard d'abandons sur son terrain ».
Le Conseil d’Etat conditionnait ainsi la responsabilité du propriétaire du terrain à la réunion de deux circonstances cumulatives :
- la responsabilité n’a lieu d’être recherchée qu’en l’absence d’autre responsable
- il faut un comportement caractérisé du propriétaire : notamment sa négligence

Dans un arrêt rendu par le troisième chambre civile en date du 11 juillet 2012 (n° 11-10.478) dit ADEME, celle-ci est venu affirmer qu'« en l'absence de tout autre responsable, le propriétaire d'un terrain où des déchets ont été entreposés en est, à ce seul titre, le détenteur au sens des articles L. 541-1 et suivants du code de l'environnement dans leur rédaction applicable, tels qu'éclairés par les dispositions de la directive CEE n° 75/442 du 15 juillet 1975, applicable, à moins qu'il ne démontre être étranger au fait de leur abandon et ne l'avoir pas permis ou facilité par négligence ou complaisance »
Dans cette affaire, le propriétaire du terrain ne pouvait pas se voir reprocher un comportement fautif, donc il n’était pas débiteur de l’obligation d’élimination de ces déchets.

Cette qualification est subordonnée, en amont au constat de 2 conditions cumulative :
- l'absence de tout autre responsable, c’est donc une responsabilité subsidiaire
- le propriétaire ne peut démontrer qu'il est « étranger » à l'abandon des déchets et qu'il ne l'a pas « permis ou facilité par négligence ou complaisance ».

Ainsi, la Cour de Cassation pose une présomption simple de responsabilité du propriétaire. Dès lors, celui-ci ne pourra s'exonérer qu'en présence de circonstances qui opèrent comme des causes.
Cette présentation emporte des conséquences fortes sur l'attribution de la charge de la preuve, puisque ce sera au propriétaire, présumé responsable, de s'exonérer de sa responsabilité par la preuve de l'une des causes d'exonération.

Le propriétaire devra démontrer qu’il n’a pas agi dans un but favorable au non abandon des déchets et remplir deux conditions cumulatives :
- être étranger au fait de leur abandon
- ne l’avoir par permis ou facilité par négligence ou complaisance

Donc, le propriétaire sera dit négligent dans deux types de situations :
- s’il a par son comportement été à l'origine directe de l'abandon des déchets
- s’il est resté passif, il n’a pas agi face à l'abandon des déchets fait à son insu alors qu'il en avait connaissance.
Seule une attitude active face à la connaissance de ces déchets peut exonérer le propriétaire.

Le Conseil d’Etat dans un arrêt rendu le 25 septembre 2013 (n° 358923) est ensuite venu préciser ce qu’il entendait par "faire preuve de négligence à l'égard d'abandons sur son terrain". Dans cette affaire, il y avait négligence, car les déchets litigieux résultaient pour l'essentiel de l'exploitation antérieure de l'activité par la société propriétaire du terrain. Celle-ci s'était en outre abstenue de toute surveillance et de tout entretien du terrain, n'avait procédé à aucun aménagement de nature à faciliter l'accès au site des services de secours et de lutte contre l'incendie, et n'avait pris aucune initiative pour assurer la sécurité du site ni pour faciliter l'organisation de l'élimination des déchets.
C’est la loi ALUR n° 2014-366 du 24 mars 2014 qui a entériné la définition prétorienne du propriétaire négligent.


II. Une qualification confirmée par Loi ALUR n° 2014-366 du 24 mars 2014

La loi Alur n° 2014-366 du 24 mars 2014, est venue ajouter un nouvel article L. 556-3 du Code de l'environnement, qui définie pour la première fois, la notion de responsable. Sont ainsi expressément visés, par ordre de priorité :

• le dernier exploitant, le tiers substitué, le maître d’ouvrage à l’initiative du changement d’usage, le producteur ou le détendeur de déchets fautif ;
• à titre subsidiaire, le propriétaire du terrain pollué qui a fait preuve de négligence ou n’est pas étranger à la pollution : le législateur consacre donc les solutions déjà admises par la jurisprudence

Il convient de relever dans ces formules une confirmation de l'affirmation de la responsabilité subsidiaire du propriétaire fautif. En effet, on retrouve dans la formule légale l'idée selon laquelle il ne sera responsable que « s'il est démontré » « qu'il a fait preuve de négligence ou qu'il n'est pas étranger à cette pollution ».