La Cour de Cassation juge que l’obligation de sécurité du salarié à la charge de l’entreprise est une obligation de résultat. L’objectif de sécurité doit donc être vu comme une composante fondamentale de l’entreprise au même titre que la qualité, l’efficacité de l’organisation du travail ou la rentabilité. C’est la volonté du législateur français et européen qui part de l’idée de l’adaptation du travail à l’homme et non de l’homme à son travail.

Cette sécurité doit être d’autant plus renforcée lors de la coactivité d’entreprises. En effet, les travaux effectués par une entreprise extérieure dans un établissement d’une autre entreprise, entreprise utilisatrice, peut générer des risques particuliers. Il faut alors prendre des mesures de sécurité particulière. Le chef de l’entreprise utilisatrice doit assurer la prévention générale, les chefs des entreprises extérieures restant responsables de l’application des règles de sécurité et de prévention nécessaires à la protection de son personnel.

1) Avant toute opération, une inspection commune doit être réalisée. Le lieu de travail doit être inspecté.

L’inspection préalable permet l’échange d’informations pour faire une analyse des risques, notamment, en vue de prendre les mesures qui doivent figurer dans le plan de prévention. Elle doit rendre compte des situations réelles. Les modalités de cette inspection sont décrites aux articles R4512-1 à R4512-5 du code du travail. Il s’agit là d’une première étape importante dans la démarche de prévention relativement aux opérations que vont effectuer les entreprises extérieures chez les entreprises utilisatrices.

L’inspection commune doit être faite à l’initiative de l’entreprise utilisatrice après sélection des entreprises extérieures. Les chefs d’entreprises ne peuvent pas y déroger sous prétexte que l’entreprise extérieure connaît déjà les lieux . Le cas échéant, ce serait une faute de la part des chefs d’entreprises d’y déroger. De même, un refus de l’entreprise extérieure d’effectuer une inspection préalable ne saurait exonérer le chef de l’entreprise utilisatrice en cas d’accident.

Toutes les entreprises utilisatrices et extérieures doivent participer à cette inspection, y compris les sous-traitants des entreprises extérieures . Les chefs des établissements des entreprises doivent être présents mais la représentation peut être déléguée à une personne compétente. Toutefois, il convient de s’assurer qu’en plus des compétences requises, le délégataire soit autorisé à prendre les mesures qui seront décidées. Il doit notamment avoir le pouvoir d’engager financièrement l’entreprise.

Pour ce qui concerne la bonne réalisation de l’inspection, il faut tout d’abord une bonne communication entre les chefs d’entreprises. Ils doivent notamment se communiquer les modes opératoires qui seront mis en œuvre . Il convient donc d’obtenir de chaque intervenant le descriptif de ses tâches respectives ainsi que des dangers y associés. Cela revient donc à identifier, avant exécution, les dangers respectifs de chaque activité, des locaux et des conditions d’interventions.

Ensuite doivent être identifiées les activités jugées incompatibles entres elles. C’est le principe de la planification. Pour cela, le planning doit être étudié. Sur cette base sont vérifiés la compatibilité des activités entre elles, et ce au regard des conditions optimales de sécurité. Ainsi, des opérations peuvent être décalées dans le temps pour éviter toutes interférences.

Le chef de l’entreprise utilisatrice devra également délimiter les secteurs d’intervention des entreprises extérieures en matérialisant les zones pouvant être dangereuses pour le personnel. Tous risques devront être signalés, y compris ceux ne paraissant pas constituer un danger direct pour l’intervention prévue.
Les principales difficultés qui se présentent dans un tel cas sont diverses. La première est le recueil des données. Par ailleurs, il n’est pas rare que les intervenants ou représentants des entreprises participant aux inspections communes n’ont pas toujours les compétences nécessaires en matière de prévention des risques.
Toutes ces analyses et la mise en commun des informations ainsi recueillies conduisent à l’établissement du plan de prévention.

2) Le plan de prévention est donc subordonné à l’existence de tels risques. Ce plan de prévention sert à informer les salariés sur les différents risques qu’ils encourent et comment ils peuvent/doivent s’en prémunir.

Il n’y a pas d’obligation de forme particulière pour l’établissement d’un plan de prévention. Toutefois, la forme écrite est requise si :

- la durée totale des opérations dépasse les 400 heures sur une période de 12 mois,

- les travaux effectués figurent sur la liste des travaux dangereux définis dans l’arrêté du 19 mars 1993, et ce quel que soit leur durée.

Le contenu minimum du plan de prévention est défini à l’article R4512-8 du code du travail. Ainsi, il doit identifier et rendre compte de l’analyse des risques et des mesures préventives prisent pour l’opération concernée.

Il doit comporter cinq éléments principaux :
1) La définition des différentes phases d’activités à risques et les moyens de prévention leur étant associés (EPI, consignes de sécurité, …).

2) L’adaptation des matériels, des installations et des dispositifs en fonction de la nature des opérations à effectuer ainsi que leur entretien.

3) Les instructions à donner aux travailleurs.

4) L’organisation et la mise en place des premiers secours en cas d’urgence et la description des dispositifs entrepris à cet effet (numéro d’urgence, personnel secouriste, …).

5) Les conditions selon lesquelles les travailleurs d’une entreprise participent aux travaux réalisés par une autre pour assurer la coordination nécessaire.

Certains compléments sont nécessaires en cas de situations à risques ou pour la prise en compte d’objectifs environnementaux. En matière d’amiante, les dossiers techniques qui regroupent toutes les informations relatives à la recherche et à l’identification des matériaux contenant de l’amiante doivent être joints.

Pour ce qui est des objectifs environnementaux, le plan de prévention peut intégrer des éléments en matière de développement durable, tel que les impacts environnementaux de l’opération à réaliser et les moyens pour les réduire, le choix des équipements à faible consommation ou non polluant, la traçabilité des déchets ou encore les filières de recyclage.

Des obligations de formation des intervenants pour certaines tâches peuvent également être prévues dans le plan.

D’autres annexes peuvent être jointes à ce plan, comme les permis de travail point chaud, les autorisations de pénétrer dans un espace isolé, le permis de consignation, le permis de fouille ou les consignes générales de sécurité.

Ce plan de prévention devra être validé par toutes les entreprises qui en conserveront chacune une copie. Elles devront ensuite diffuser en interne l’information à leur personnel.

Un suivi du plan devra être assuré, dans le temps, par le chef de l’entreprise utilisatrice, notamment par des réunions de prévention. En cas de non-respect des règles de prévention du plan, le chef de l’entreprise utilisatrice devra avertir le chef de l’entreprise en défaut. A ce titre, il peut donner des directives au salarié en défaut. Il peut aussi arrêter les travaux en cas de danger grave et imminent.