Le changement climatique a de nombreuses conséquences. Parmi elles, une moins évidente : l’afflux de migrants et de réfugiés cherchant asile en Europe.
C’est l’objet du débat ayant eu lieu ce mercredi 9 septembre lors de la conférence « Dérèglements climatiques et crises humanitaires » organisée par le ministère des affaires étrangères en partenariat avec l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), Action contre la Faim et CARE France.


I. Le changement climatique, facteur de migration forcée

Entre 2008 et 2014, environ 25 millions de personnes ont été contraintes au déplacement chaque année, en raison de catastrophes naturelles ou d’évènements hydro-climatiques telles des tempêtes, inondations, érosion des côtes. La réduction des terres arables, la multiplication des coupures d’eau, la baisse des réserves alimentaires et poissonnières, ainsi que l’allongement des périodes de sècheresse observés dans de nombreuses régions du monde expliquent ces migrations massives de populations.

Dès 1990, un rapport du Groupement Intergouvernemental d’Experts sur le Changement Climatique (GIEC) établissait d’ores et déjà que le plus grand impact du changement climatique porterait sur les migrations humaines. Pour autant les experts restaient prudents quant à l’établissement d’un lien de cause à effet direct entre les évènements résultants du changement climatique et les migrations.
L’Organisation Internationale pour les Migrations (IOM) considère par ailleurs qu’ « avec autant de facteurs exogènes à l’œuvre qu’ils soient de nature sociale, économique ou environnementale, établir une relation linéaire entre un changement climatique anthropogène et des migrations de population demeure jusqu’à ce jour un processus difficile ». De même, en 2009, au sommet sur le changement climatique de Copenhague, le patron du Haut Commissariat des Nations unies pour les Réfugiés, Antonio GUTERRES, confirmait cette idée de déplacement des populations tant à l’intérieur que par delà les frontières nationales.

François GEMENNE, chercheur et spécialiste des migrations environnementales, souligne que "la part attribuable au changement climatique ne peut être évaluée pour l’heure". Pour autant, tous s’accordent à dire que le climat est un facteur de déstabilisation.

Le dérèglement climatique peut avoir des incidences non négligeables sur la stabilité sociale et politique de certaines régions du monde, notamment au Proche Orient et en Afrique du Nord, où les ressources hydriques de la vallée du Jourdain et du bassin du Tigre et de l’Euphrate se raréfient, accentuant les tensions existantes.

Ainsi, la Chine s’efforce-t-elle de lutter contre la progression du désert qui grignote peu à peu, par l’effet du vent, de nombreux hectares cultivés de l’oasis de Minqin. Pour ce faire, elle a mis en place une barrière végétale pour protéger ses terres arables. Malgré cela, une grande partie de la population des villages avoisinants à été contrainte de se déplacer.

Il est à craindre qu’à la longue, le changement climatique induise une dégradation des terres et une raréfaction des ressources en eau. D’ici à 2050, les terres agricoles disponibles pourraient diminuer fortement, et l’écart entre les besoins en eau et les ressources disponibles pourraient atteindre 40% dans les deux prochaines décennies. Naturellement, les populations peinant à trouver de l’eau et des pâturages verts seront amenées à parcourir davantage de kilomètres, ce qui peut être source de conflit.

En conséquence, les capacités d’accueil de certaines parties du monde seront compromises par le changement climatique, certaines zones du globe devenant moins adaptées à la vie humaine.


II. Les conséquences du dérèglement climatique

Deux phénomènes météorologiques distincts sont à l’origine de ces migrations induites par le changement climatique : les processus climatiques et les évènements climatiques.

Les premiers regroupent des phénomènes tels que la raréfaction des ressources en eau, la montée du niveau des océans, la salinisation des terres agricoles due aux phénomènes de sécheresse et la désertification.

Les évènements climatiques regroupent, quant à eux, les inondations, tempêtes tropicales, ouragans ou encore les typhons. Leur nombre a d’ailleurs triplé au cours des trente dernières années, emportant des conséquences désastreuses sur les populations.

Les dégradations de notre environnement naturel sont également dues au dérèglement climatique. Tel est le cas de l’Himalaya, mais encore des pays comme le Népal ou les Maldives, dont l’existence même est menacée par la fonte des glaciers. A l’opposé, les populations rurales des régions arides d’Afrique et d’Amérique latine exposées à des périodes prolongées de sécheresse voient leur bétail décimé.

Le rôle des facteurs non climatiques ne doit pas non plus être négligé : l’accroissement explosif de la population, et les inégalités de revenus contribuent également à dégrader la situation.


III. Réfugiés ou migrants climatiques forcés ?

Alors que la crise des migrants fait l’objet de tous les débats, en raison notamment du vide juridique concernant le statut de réfugiés climatiques, il conviendrait d’adapter les instruments légaux et institutionnels que sont la Convention Cadre des Nations unies sur le Changement climatique, la convention des Nations unies sur les réfugiés, le Programme des Nations unies pour l’environnement et le Haut Commissariat aux Nations unies pour les Réfugiés.

En effet, la Convention des Nations unies de 1951 relative aux réfugiés et son protocole de 1967 limite la définition d’un réfugié à « toute personne craignant à raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouvant hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas la nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels évènements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

En outre, une polémique existe autour de la définition des personnes fuyant les catastrophes causées par le changement climatique. Certains activistes préfèrent employer le terme de « réfugié climatique » pour désigner ces victimes cherchant à se protéger des dégâts provoqués par le changement climatique. Alors que le terme de « migrant climatique » renvoie davantage à l’idée de déplacement volontaire vers une destination.

En tout état de cause, les principaux migrants climatiques forcés proviendront en premier lieu des pays les plus pauvres, qui par ailleurs portent la plus faible part de responsabilité dans l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre.

Sources :
- www.lemonde.fr
- www.amadeusonline.org
- www.vedura.fr