Le bail rural à clauses environnementales: premier bilan

Le bail rural est un bail par lequel, le propriétaire de bâtiments ou de terrains agricoles les met à disposition d'un exploitant, en contrepartie d'un loyer (ou d'une part des récoltes). Il s'applique donc uniquement sur les biens à caractère agricole et peut être conclu entre un propriétaire agricole ou fermier, et un bailleur qui peut être un propriétaire, un usufruitier etc.
Les obligations du bailleur sont d'entretenir le bien loué, de prendre en charge les réparations importantes et de régler la prime d'assurance pour les incendies ainsi que les impôts fonciers, tandis que le locataire doit s'acquitter d'un loyer, de l'exploitation agricole du bien, du respect des pratiques environnementales etc.

L'environnement fait partie intégrante du bail rural et de l'agriculture depuis 1999 avec la loi d'orientation agricole, qui lui donne une place considérable, puis qui a été renforcée en 2006 avec une nouvelle loi d'orientation agricole qui a consacré la possibilité d'inclure des clauses environnementales dans les baux ruraux. Le bail rural environnemental est l'illustration d'une politique agro-écologique imposée par l'Union Européenne dans son règlement de 1992. Si le bail rural environnemental ne dispose pas d'un régime législatif différent du bail rural commun, le régime d'insertion des clauses diffère selon les acteurs.

I. Le champ d'application

Les clauses applicable à la totalité du territoire ne peuvent être incluses que par une personne morale de droit public; association agréée de protection de l'environnement; une personne morale agréée entreprise solidaire ou encore une fondation reconnue d'utilité publique. La liste des clauses concernées est prévue par l'article R 411-9-11-1 du Code rural et de la pêche maritime à la condition qu'elles répondent aux préoccupations environnementales du lieu où est situé le bien faisant l'objet du contrat.
Parmi celles-ci peuvent être retrouvées le non-retournement de prairie, la limitation ou l'interdiction de produits fertilisants etc.

Les bailleurs privés peuvent inclure des clauses relatives à certaines parcelles qui font l'objet d'une liste exhaustive de l'article R 411-27 du CRPM. Les clauses mises à leur disposition sont toutes celles de l'article R 41169-11-1 du CRPM qui sont conformes au document de gestion officiel de l'espace protégé.
Les documents de gestion peuvent être rédigés par une autorité administrative pour règlementer un site, comme les parcs nationaux; ou des chartes de planification qui couvre de grandes surfaces comme les SDAGE. Il y a des espaces où il n'y a pas de document de gestion mais où des textes spécifiques, comme des arrêtés préfectoraux, sont applicables. Pour ces espaces, le bailleur n'aura pas à s'en référer et il sera libre d'instaurer les clauses qu'il souhaite.

II. Le bilan

• Quand le BRE est-il utilisé?

Le Bail rural environnemental est un outil efficace pour la préservation de la biodiversité. Lorsqu'un espace dispose d'écosystèmes riches en espèces de faune et de flore, comme les réserves naturelles ou les sites classés Natura 2000, les BRE permettent une gestion durable. Les gestionnaires de ces sites peuvent donc l'exploiter avec l'assurance de préserver l'équilibre naturel. Les départements et autres collectivités territoriales ont donc recours à ces clauses afin d'assurer la pérennité de la biodiversité.
Le BRE permet aussi de protéger les ressources en eau: qu'il s'agisse d'une protection contre la pollution ou d'une gestion quantitative, les clauses sont un moyen pour les différents acteurs, comme l'Agence de l'Eau ou les collectivités territoriales, de s'assurer que les habitants disposent d'une eau de qualité. Les clauses peuvent concerner l'interdiction des fertilisants, afin de préserver les nappes phréatiques des produits chimiques.
Les clauses environnementales sont aussi un moyen de faire appliquer différentes mesures participant au concept d'agro-écologie, comme les mesures compensatoires ou l'agriculture biologique. En effet, il est tout à fait possible pour le bailleur d'exiger de l'exploitant qu'il respecte ces différents outils.
L'agriculture biologique passe par un système de certification, encadré par le règlement CE n°834/2007. Une clause d'agriculture biologique impose donc à l'exploitant de respecter certaines obligations, comme le recyclage des matières organiques, le désherbage thermique etc.

• Les limites?

La première nuance à apporter concernant le BRE est relative aux textes auxquels celui-ci doit se référer. Les documents de gestion font parfois preuve d'imprécision et ne permettent pas l'élaboration de clause en adéquation avec ces derniers. De plus, la difficulté se trouve amplifiée lorsque ces documents sont inexistants. C'est alors au bailleur d'évaluer les risques environnementaux qui sont présents pour rédiger des clauses qui répondraient aux préoccupations environnementales du lieu.
La deuxième limite peut être qualifiée d'incertitude: le contentieux relatif au BRE n'est pas assez étoffé pour permettre de mettre la lumière sur certains points qui restent flous. Cela est notamment dû à l'absence d'autorité compétente pour régler le contentieux et le peu de jurisprudence à cet égard.


Pour conclure, le BRE est indispensable pour assurer la transition écologique dans le domaine de l'agriculture. Aussi, il sait s'adapter et a étendu son champ d'application en parallèle des enjeux environnementaux, par exemple en matière la protection de la ressource en eau et aux mesures compensatoires. Si sa mise en place est parfois difficile, il constitue une assurance de préserver la biodiversité d'un site, en prenant en compte ses spécificités locales.

La liste des clauses environnementales:
Le non retournement des prairies;
La création, le maintien et les modalités de gestion de surface en herbe;
Les modalités de récolte;
L'ouverture d'un milieu embroussaillé et le maintien de l'ouverture d'un milieu menacé par l'embroussaillement;
La mise en défens de parcelle ou de partie de parcelle;
La limitation ou l'interdiction des apports en fertilisants;
La limitation ou l'interdiction des produits phytosanitaires;
La couverture végétale du sol périodique ou permanent pour les cultures annelles ou pérennes;
L'implantation, le maintien et les modalités d'entretien de couverts spécifiques à vocation environnementale;
L'interdiction de l'irrigation, du drainage, et toutes formes d'assainissement;
Les modalités de submersion des parcelles et de gestion du niveau des eaux;
La diversité des assolements;
La création, le maintien et les modalités d'entretien et haies, talus etc.;
Les techniques de travail du sol;
La conduite de culture suivant le cahier des charges de l'agriculture biologique.

Sources:

(1) CEREMA, Le bail rural à clauses environnementales et le paysage agro-environnemental. [en ligne] Consulté le 7/09/2015. Disponible sur:
< http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/BRE_Document_Juin_2015.pdf >

(2) Laurent Radisson, Le bail environnemental incontournable pour assurer la pérennité de la biodiversité, [en ligne], consulté le 7/09/2015. Disponible sur:
< http://www.actu-environnement.com/ae/news/bail-rural-environnemental-incontournable-preserver-biodiversite-25178.php4 >