La responsabilité civile nucléaire issue des Conventions de Vienne du 24 avril 1963 et de Paris du 29 juillet 1963 ne prévoyait pas l’indemnisation des atteintes à l’environnement mais uniquement celle des dommages aux personnes et aux biens.
Pourtant La réparation des atteintes à l’environnement en cas d’accident nucléaire constitue un enjeu capital au regard de l'importance des services écosystémiques. Il est donc essentiel de gérer, de protéger et de réparer de manière responsable le préjudice écologique causé par ces accidents.
Dès lors, il s’est avéré nécessaire d’élargir le champ d’application de la responsabilité environnementale à certaines atteintes environnementales
Ce n’est que le 12 février 2004, que le protocole relatif à l’application des Conventions de Paris et de Vienne est venu compléter le dispositif de la responsabilité civile environnementale afin d’y intégrer la réparation de certains dommages écologiques pouvant résulter d’un accident nucléaire.
Cette intégration se fait par le biais d’un élargissement de la notion de dommage nucléaire ouvrant droit à réparation du coût des mesures de sauvegarde de l’environnement, de coût des mesures restauration d’un environnement dégradé, ainsi que des mesures de compensation par équivalent mises en œuvre.
La réparation du préjudice moral issue de l’atteinte à l’environnement
L’article 1 a) vii. 3. prévoit l’indemnisation de « tout dommage immatériel résultant d’une perte ou d’un dommage visé aux sous-alinéas 1 ou 2 ci-dessus, pour autant qu’il ne soit pas inclus dans ces aliénas, s’il est subi par une personne qui est fondée à demander réparation de cette perte ou de ce dommage ». En d’autres termes, il s’agit de le tout préjudice pécuniaire résultant de la privation de jouissance d'un droit, de l'interruption d'un service rendu par un bien meuble ou immeuble ou de la perte de bénéfice qu'entraîne directement la survenance de dommages matériel.
L’indemnisation du coût des mesures de sauvegarde
L’article 1 de la Convention de Paris révisée par le protocole de 2004 prévoit que les mesures de sauvegarde de l’environnement peuvent être indemnisées dans le cadre de la responsabilité civile environnementale en intégrant au dommage nucléaire « le coût des mesures de sauvegarde et toute autre perte ou tout autre dommage causé par de telles mesures ». Les « mesures de sauvegarde » se définissent comme « toutes mesures raisonnables prises par quiconque, après que soit survenu un accident nucléaire ou un événement créant une menace grave et imminente de dommage nucléaire pour prévenir ou réduire au minimum les dommages nucléaires mentionnés aux points a) vii) 1 à 5, sous réserve de l'approbation des autorités compétentes si celle-ci est requise par la législation de l'État où les mesures sont prises ». Cette mesure constitue une application du principe de prévention et est particulièrement efficace en matière d’accident nucléaire en ce que la contamination par la radioactivité et l’étendue géographique potentielle des dommages issus d’un accident nucléaire est extrêmement importante.
L’indemnisation du coût des mesures de restauration
L’article 1 de la Convention de Paris révisée par le protocole du 12 février 2004 dispose que le « coût des mesures de restauration d’un environnement dégradé » est indemnisable en tant que dommage nucléaire. Les mesures de restauration incluent la possibilité « d’introduire, lorsque cela est raisonnable, l’équivalent de ces éléments dans l’environnement ». Ainsi lorsque la restauration de l’environnement dégradé est impossible il convient que la réparation soit effectuée sous forme de compensation par équivalent. Cette compensation peut alors consister en la protection d'espaces naturels, la restauration, la valorisation ou la gestion de l'habitat de certaines espèces. L’article 1er affirme que les coûts de restauration pourront être indemnisés « sauf si la dégradation est insignifiante », ce qui restreint le champ des dommages indemnisables tout en laissant une grande marge d’interprétation au juge.
Toutefois, il convient de relever que le régime de la responsabilité environnementale consolidé par le protocole de 2004 prévoit une réparation uniquement pécuniaire, or la réparation en nature constitue le mode de réparation le plus réaliste. La mise en œuvre de mesures de restauration ne peut donc pas être imposée sur le fondement de la responsabilité civile nucléaire, contrairement à d’autre régime de responsabilité comme celui de la Directive 2004/35 du 21 avril 2004, sur la responsabilité environnementale en ce qui concerne la prévention et la réparation des dommages environnementaux.
Si la responsabilité civile nucléaire consacre bien la réparation du préjudice écologique, il n’en demeure pas moins que les modalités de réparations restent contestables en ce qu’elles ne permettent pas une réparation en nature dudit préjudice. Il convient donc de réformer ces dispositions et de mettre en œuvre une réparation concrète du préjudice écologique à l’instar de ce que défend le rapport Jégouzo du 17 septembre 2013.