Depuis 2004, la réglementation relative au risque lié aux légionelles s'est nettement intensifiée. Les industriels se retrouvent désormais face une multitude de règlementations communautaires et nationales.

I - Le cadre international et communautaire

A) Le cadre international

La réglementation internationale, en terme de risque lié aux légionelles, est régie par les normes ISO 11731:1998 (1) et ISO 11731-2:2004 (2) "Qualité de l'eau - Recherche et dénombrement des Legionella". Cette dernière décrit une nouvelle méthode de contrôle pour l'isolation et le dénombrement des légionelles dans l'eau destinée à la consommation humaine.

Le Canada est un excellent exemple pour traiter de la réglementation internationale du risque lié aux légionelles. En effet, en 2012, la région de Québec a vécu l’une des plus importantes épidémies de légionellose décrites à l’échelle internationale. Pendant 8 semaines, 181 cas, dont 14 décès, ont été associés à 2 tours aéroréfrigérantes d’un édifice de la Basse-Ville de Québec (3). Suite à cette épidémie, la règlementation canadienne s'est fortement renforcée avec la création, en septembre 2012, d'un groupe de travail interministériel dans le but de mettre en place un nouveau règlement relatif aux TAR. Ainsi, le 12 mai 2013, un premier règlement modifiant le Code de sécurité est entré en vigueur. Ce dernier fait naître de nouvelles obligations à l'égard des propriétaires de toutes installations de tours de refroidissement à l’eau (TAR), y compris celles d’industries. Les deux grandes obligations qui en découlent sont : un suivi mensuel de Legionella pneumophila par culture et un enregistrement des TAR auprès de la Régie du bâtiment.

B) Le cadre communautaire

La réglementation européenne, en matière de maîtrise de risque lié aux légionelles, est marquée par la directive 98/83/CE du Conseil du 3 novembre 1998 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine. Elle a été transposée en France par l'intermédiaire de l'Arrêté du 1er février 2010 relatif à la surveillance des légionelles dans les réseaux de distribution d'eau chaude sanitaire.

L'acteur majeur européen en matière de risque lié à l'activité professionnelle est l'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (EU-OSHA). Le rapport de 2011 de l’EU-OSHA: « Legionella et maladie du légionnaire : un aperçu de la politique » (4) présente le cadre réglementaire relatif à Legionella et à la maladie du légionnaire dans l’Union européenne (UE), dans les États membres de l’UE et dans les pays non membres de l’UE, ainsi que d’autres documents normatifs concernant l’application pratique de cette législation (normes, lignes directrices, etc.). Le rapport résume également les politiques d’organisations internationales.

À l’échelle nationale, presque tous les pays européens ont adopté des politiques de santé publique luttant contre Legionella pneumophila, tandis que certains d’entre eux la mentionne en tant que sujet spécial dans leur législation relative à la sécurité et à la santé au travail. Dans la plupart des pays de l’UE, les risques professionnels dus à Legionella font l’objet de lois, de décrets, etc., basés sur la directive 2000/54/CE concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l’exposition à des agents biologiques au travail.

II - Le cadre national

La prévention de la légionellose et la gestion du risque lié aux légionelles, au sein des entreprises, sont encadrées en France par plusieurs textes officiels qui s’appliquent aux propriétaires et gestionnaires des installations. Hormis, l'ensemble des textes règlementaires qui encadrent le risque de contamination via les réseaux d'eau chaude sanitaire et les tours aéroréfrigérantes, la prévention de la légionellose est également présente au sein du Code de la Santé publique, du Code du travail, du Code de l'environnement ainsi que du Code de la construction et de l'habitation. On peut citer les articles L. 1321-4, R. 1321-1 à R. 1321-61 et L. 1324-1 du Code de la Santé publique, ainsi que l'article R. 123-2 du Code de la construction et de l'habitation. Le Code de l'environnement énonce également des dispositions particulières concernant la pollution de l'air : article L. 211-1 et L. 220-1.

A) Le risque professionnel

En ce qui concerne le risque professionnel, les articles R 231-60 à R231-35-3du Code du travail (5) fixent les règles particulières de prévention et de protection des travailleurs contre les risques résultant d'une exposition aux agents biologiques. Paradoxalement, la légionellose ne bénéficie à ce jour d'aucune reconnaissance en tant que maladie professionnelle, au titre des tableaux annexés au Code de la sécurité sociale. En effet, l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale prévoit qu' "est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau". Or, le tableau 66 bis des maladies professionnelles, figurant à l'annexe II du Code de la sécurité sociale, intitulé « pneumopathies d'hypersensibilité », évoque les deux maladies suivantes : la bronchoalvéolite aiguë et la fibrose pulmonaire avec signes radiologiques et troubles respiratoires confirmés. La légionellose n'est donc pas désignée dans ce tableau.

Dans ces conditions, de nombreux travailleurs atteints par cette infection suite à l'exercice de leur activité professionnelle doivent saisir le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles pour espérer une reconnaissance "hors tableau" et une prise en charge totale des frais médicaux et hospitaliers. C'est pourquoi, il paraîtrait opportun de faire figurer la légionellose au titre des maladies professionnelles reconnues par le Code de la sécurité sociale, afin de garantir le traitement des victimes professionnelles de cette infection. Cette suggestion a été formulée par l'ancienne sénatrice Mme SAN VICENTE-BAUDRIN Michèle.

Cette non-reconnaissance a donné lieu à plusieurs jurisprudences notamment l'arrêt du 3 mars 2010 de la 14ème chambre de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence (6).

B) La santé publique

La prévention de la légionellose est une préoccupation de santé publique. En effet, en plus de faire partie des priorités d'action du Plan National Santé-Environnement (PNSE) du Ministère français, elle donne lieu à l'élaboration de nombreuses normes françaises.

La réalisation des prélèvements d’eau, leur transport et leur analyse doivent être réalisés selon la norme NF T90-431 (7) et la réglementation en vigueur. Notamment les arrêtés du 1er février 2010 et du 13 décembre 2004. La norme NF T90-431 a été mise à jour par l’Agence française de normalisation (AFNOR) en novembre 2014. Elle remplace la version de septembre 2003, amendée en 2006. Cette mise à jour est mise en application depuis avril 2015. Elle permet de rechercher et de dénombrer les bactéries Legionella spp et Legionella pneumophila par une méthode de culture. En appliquant cette norme, chaque laboratoire s'assure de la fiabilité de sa méthode d'analyse et donc de ses résultats. Le lundi 11 mai 2015, le ministère des Affaires sociales a publié une note d'information (8) à l'attention des Agences Régionales de Santé. Ce document expose les modifications apportées à la norme ainsi que les conséquences de cette révision, notamment l'adaptation dont les laboratoires devront faire preuve.

D'autres normes françaises, plus anciennes, définissent des méthodes d’analyse pour la recherche et le dénombrement des Legionella. On peut citer notamment la norme NF E38-424 d'avril 2013 relative aux aéroréfrigérants humides. Elle fixe des exigences de conception vis-à-vis du risque légionellose.

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Référence :

(1) Norme ISO 11731:1998. Dernier examen en 2009.

(2) ISO 11731-2:2004 Partie 2: Méthode par filtration directe sur membrane pour les eaux à faible teneur en bactéries

Sources :

(3) Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale Nationale de Québec. François Desbiens, Isabelle Goupil-Sormany et al. Rapport du directeur de santé publique : Éclosion de légionellose dans la ville de Québec, Canada, Eté 2012. Québec, Décembre 2012, 145p

(4) European Agency for Safety and Health at Work. Working environment information - Literature review - ISSN 1831-9351- LEGIONELLA AND LEGIONNAIRES’ DISEASE: A POLICY OVERVIEW. 2011, 96p.

(5) Décret no 94-352 du 4 mai 1994 relatif à la protection des travailleurs contre les risques résultant de leur exposition à des agents biologiques et modifiant le code du travail (deuxième partie: Décrets en Conseil d'Etat) NOR: TEFT9400313D

(6) Arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, CH 14, 3 mars 2010, N°2010/291. Rôle N° 08/17012. Société ABB FRANCE c/ Murielle B.

(7) Norme NF T90-431(novembre 2014) FA182801_ Qualité de l'eau - Recherche et dénombrement de Legionella spp et de Legionella pneumophila - Méthode par ensemencement direct et après concentration par filtration sur membrane ou centrifugation